Oui, les Lorrains ont le bec salé!

Article du 14 décembre 2012

Intervention pour la télévision de la région Lorraine dans le cadre de l’émission des Toques et des Etoiles, animée par Jérôme Prod’homme,  à laquelle participaient Franck Kestener, chocolatier et pâtissier à Sarreguemines, et Michel Roth, chef du Ritz, présentement en disponibilité, deux MOF de leur registre. Tous deux parlaient des pains d’épices et le chocolats de Noël. A moi le rôle de vanter les produits « non sucrés ». En voici le texte in extenso…

GP, Michel Roth, Franck Kestener, avec Jérôme Prod’homme © GP

Que le Lorrain ait le bec sucré, on le savait, en énumérant son si doux patrimoine : bergamote de Nancy, macaron de Boulay, bonbon des Vosges, croquet de St Mihel, dragée de Verdun ou madeleine de Commercy ou boulet de Metz, parmi cent autres.

Mais le lorrain qui peut dire à l’instar de son historien de la cuisine Jean-Marie Cuny « pour la gueule, j’en suis ! », adore autant le salé, les poissons de rivière et crustacés d’eau douce, la truite au bleu, aux amandes ou en pâté, la carpe farcie, les perches, le brochet, en quenelle bien sûr, mais aussi escalopé aux fines herbes, l’anguille, les écrevisses pattes rouges en nage corsée ou en gratin, sans omettre les grenouilles à l’ail ou à la crème et au vin blanc, plaisamment décortiquées, « à la mode de Boulay ».

Les accompagnements légumiers, les pissenlits, les œufs que l’on sert pochés ou cassés, la truffe de Meuse, les pommes sautées à la poêlée ou rôtis dans la cocotte en fonte (celles qu’on nomme « tofailles » dans les Vosges) font des escortes exquises qu’on accompagne et qu’on relève avec le roi d’ici.

Le roi de la cuisine lorraine ? L’empereur non dit ? C’est le lard… A tout petit lorrain, la même question est posée. « Qui préfères tu : ton père ou ta mère ? » Et la réponse suit : « je préfère le lard » Et le lard sous ses plus gourmands aspects : gras, craquant, fumé, issu du ventre du porc bien sûr, servant aussi dans les multiples saucissons de la région. Saucisse de foie (dans lequel peut entrer également du veau), saucisse blanche à griller, fuseau lorrain ou poids d’horloge…

Sans omettre le pâté lorrain, avec maigre et gras de porc, marinés au vin blanc, enfermé dans de la pâte feuilletée dorées au four. Ni la quiche, avec sa migaine, sa crème douce qui doit être « chevelotte », un brin  tremblotante, selon l’adage.

Les divines charcuteries lorraines s’expliquent par le culte voué au cochon sous toutes ses formes : cochon de lait à la broche, en gelée, à la mode de Metz, avec ses fins morceaux. Rien que de l’évoquer, frais, vif, craquant, j’en ai l’eau à la bouche…

La différence avec la charcuterie d’Alsace, qui cousine elle avec celle de la Forêt Noire, la lorraine se fume au feuillus, non aux résineux, ce qui lui laisse davantage son goût.

Je n’oublie pas le cochon de lait rôti en cocotte qu’on marie à la mirabelle, le boudin noir et blanc, le cervelas, la quenelle de foie ou les quenelles de moelle que l’on sert en bouillon, comme aux repas de noces et de communion. Et encore le lapin de basse cour que l’on cuit doucement à la moutarde, la volaille des Vosges à rôtir avec la peau craquante, qu’on accompagne de crème et champignons.

Ah, quelle est douce, ma Lorraine salée !

A propos de cet article

Publié le 14 décembre 2012 par

Et vous, qu'en avez-vous pensé ? Donnez-nous votre avis !