Les Marronniers

La cour du château © GP

Haroué : c’est un Versailles lorrain à la campagne. Il y a la demeure exquise avec ses douves, ses clochetons, ses beaux salons, ses expositions charmeuses (comme ces robes de mariées exceptionnelles choisies par Hubert de Givenchy), le tout sous le regard bienveillant de Minnie de Beauvau-Craon qui veille le lieu avec amour et un joli mélange de vigueur et de tendresse. Haroué et son château accueillent aussi de belles soirées d’opéra dans le grand parc.

Minnie de Beauvau-Craon « shootée » par Maurice Rougemont © GP

Il y avait là, face au château, au bout de la grand place ombragée, un bistrot de village qui cherchait sa destinée. Francis Staub, prince de la cocotte à Turckheim, et désormais homme d’idées, de tables accortes (le Théâtre à Colmar, c’est lui) et de convivialité, est tombé amoureux du lieu et lui a redonné vie avec l’aide de son copain designer Alberto Bali.

Trois angelots de la cour d’honneur © GP

Voilà désormais un bistrot moderne à l’ancienne revivifié, avec sa terrasse double – sur le village et sur la rivière proche -, son coin bar, son décor d’hier et d’aujourd’hui, ses tables en bois, son premier étage genre lounge auquel un accède par un escalier tournant et high tech. Bref, c’est lieu comme un coup de coeur. Aux commandes, un couple artiste et passionné lui a redonné du nerf, une atmosphère, non sans générosité. Isabelle Spaini fait ainsi la salle avec bonne humeur, tandis que Fabien Larose cuisine avec doigté, franchise et probité.

Les plats © Maurice Rougemont

On aime, sans mal, la terrine de lapin aux pistaches, le carpaccio de truite et radis marinés, le filet de perche en écailles de chorizo, le risotto aux crevettes, avec roquette et parmesan ou encore le joli faux filet grillé servi avec de belles frites au couteau présentées dans leur petite cocotte en fonte signée qui vous savez. Voilà qui fait simplement bon, vif, savoureux, peu cher. En dessert, on hésite entre mousse au chocolat blanc, blanc-manger vanillé ou encore irish coffee qui alternent ici avec le café gourmand. Quelques vins séducteurs, comme  le blanc aligoté de la Chablisienne ou Les Aigles d’Anthonic, petit moulis en Médoc, passent là-dessus avec grâce.

Ambiance et décor © Maurice Rougemont

Bien sûr, il y a parfois un peu d’attente entre les plats. On sent que le lieu – tout neuf – n’est pas encore rôdé et peut être victime de son succès. Et que l’on pourrait ajouter au registre de vins de partout quelques idées venues du terroir d’ici – on pense évidemment aux côtes de Toul de chez Laroppe ou Régina à Bruley, ceux des côtes de Meuse côté Lelièvre et même les mosellans du château de Vaux ou de Contz, sans omettre, pourquoi pas, des idées d’Alsace.

Isabelle Spaini et Fabien Larose © Maurice Rougemont

Mais, tel quel, le lieu séduit. Il y a comme l’amorce d’une belle demeure en devenir, comme la « ba » qui permet à un village lorrain fameux et tant visité de trouver « la » bonne et belle auberge qui lui manquait, avec son âme, ses idées, sa gaîté.

Une tour d’angle face aux douves © GP