Hommage à Alain Ducasse: le chef « gobe-trotter » fête, avec gourmandise, son quart de siècle de présence sur le Rocher.

Alain Ducasse en cuisine © Maurice Rougemont

« La rencontre avec Monaco fut un événement magique et important dans ma vie. C’est sur ce rocher entre France et Italie que j’ai concentré mes Rivieras. Je sais aujourd’hui que cette terre fait partie de mon destin. Toute ma cuisine s’inspire de ce terroir qui chante le soleil. Elle y puise sa force et sa vérité. » Voilà ce que dit Alain Ducasse, qui fête cette année ses 25 ans de présence sur le Rocher.

Ce Landais, né à Orthez, élevé dans une ferme de Chalosse proche de Castelsarrasin, formé au Pavillon Landais à Soustons, puis à la grande cuisine chez Michel Guérard à Eugénie-les-Bains, a eu la révélation du beau produit et de son culte chez Alain Chapel à Mionnay. Sa « seconde naissance », comme il le dit lui-même, fut sa rencontre avec la Méditerranée, ses traditions, ses produits de la mer, comme de la terre, son huile d’olive, qu’il impose à la table du Louis XV, comme les grands crus. Cette mer prodigue « en poissons de roche plus goûteux qu’aucun autre », ces « produits uniques gorgés de soleil » : voilà ses nouvelles racines. Qu’il découvrira et mettra en œuvre chez Roger Vergé au Moulin de Mougins, puis, dans sa cuisine propre, au Juana de Juan les Pins, enfin à Monaco, où il fait le pari réussi d’obtenir trois étoiles en un temps record au sein d’un grand palace hôtelier.

25 ans après, ses trois étoiles si  vite conquises ont fait des petits. Alain Ducasse est désormais une star planétaire, présent à Tokyo, Hong Kong, Las Vegas, New York, Londres ou Paris, comme à l’île Maurice. Il tient des bistrots de qualité (Benoît ou les Lyonnais), met en vedette la mer à Paris, chez Rech, avec la complicité de Jacques Maximin, qu’il côtoya jadis chez Vergé à Mougins et à qui il a chipé, sans guerre aucune, la place de leader gourmand sur la côte.

Alain Ducasse en quatre mouvements © Maurice Rougemont

Le plus bel acte d’amour adressé à la Riviera ? Outre un beau livre de recettes portant ce titre et publié chez Albin Michel en 1992, déjà : un tout récent « J’aime Monaco », co-écrit avec Jacques Gantié, illustré par Pierre Monetta et publié par lui-même. Il y vante les belles tables de la Méditerranée d’entre Porquerolles et Imperia, mais aussi les maisons de bouche, boulangers, primeurs et poissonniers. Il y fait, bien sûr, une place à part à Monaco, avec les tables de tradition de la Principauté, ses commerces gourmands (comme Cesar Poma Traiteur ou le boucher Formia), et aussi bien sûr, Gérard Rinaldi, pêcheur et poissonnier vedette, représentant la 4^e génération de la même famille dans ce métier voué à la mer.

Comme toutes les belles fêtes se terminent par de bons repas, le Louis XV, son navire amiral monégasque, propose toute l’année un menu des 25 ans où les produits de la grande bleue sont mis en relief. Comme les gamberoni de San Remo avec sa gelée de poisson de roche et caviar, ses rougets et courgettes trompettes aux condiments au goût « d’ici ». Tandis que ses disciples placés dans ses autres maisons, tel Jérémy Brouet au Jules Verne à Paris, cuisinant le rouget de Méditerranée farci et braisé au fumet de bouillabaisse, ou Jocelyn Herland du Dorchester londonien, promouvant le pavé de bar rôti avec ses artichauts poivrades aux palets d’ail doux, mettront leur carte au diapason.

Qu’il règne sur une école de cuisine (il l’a créée en 1999) ou sur un aréopage d’élèves au mieux de leur mission, Alain Ducasse est devenu le plus star des cuisiniers de la Méditerranée, proposant non seulement une certaine idée de la cuisine, mais une vision du monde.

Louis XV/Alain Ducasse, Hôtel de Paris, pl. du Casino, Monte-Carlo. Tél. +377.98.06.88.64. Menus : 140 (déj.), 210, 280 (menu des 25 ans) €.

J’aime Monaco « Ma Méditerranée en 170 adresses », (Alain Ducasse Editions, 594 pages, 35 €).