Erckmann-Chatrian

Netty Richert © GP

Phalsbourg, ville carrefour, bourg repère de Lorraine vers l’Alsace, est célèbre à plusieurs titres. C’est d’abord la commune d’où partent André et Julien Volden, au début du « Tour de la France par deux Enfants » de G. Bruno, ouvrage dans lequel toute une partie de la France du début mais encore du milieu du XXe siècle, apprit les plaisirs de la lecture pédagogique et de la dictée appliquée. « Par un épais brouillard du mois de septembre, deux enfants, deux frères, sortaient de la ville de Phalsbourg en Lorraine. Ils venaient de franchir la grande porte fortifiée qu’on appelle porte de France ».

C’est encore celle d’Emile Erckmann, le double d’Alexandre Chatrian, né, lui, non loin, à Grand Soldat (anciennement Soldatentahl), au cœur de la grande forêt domaniale d’Abreschviller, que l’on atteint par un petit train touristique. Un monument issu d’une souscription nationale de 1922 figure, rue Emile-Erckmann, juste derrière la salle des fêtes, avec le portrait gravé des deux auteurs, une sculpture géante représentant quelques-uns de leurs héros, dont, au premier chef, la cantinière, Madame Thérèse, dominant les autres personnages issus de leurs titres les plus populaires. Et le musée historique, sis au premier étage de l’hôtel de ville avec son immense toit de tuiles, raconte leur union contrastée, leurs succès (l’Ami Fritz, l’Invasion,  le Conscrit de 1813, le Blocus…) comme leur séparation.

Douceur de mangue et coulis de framboise © GP

Le restaurant qui leur est dédié, de l’autre côté de la vaste place d’Armes que domine la statue du général Mouton, comte de Lobau  (dont Napoléon disait « Mon Mouton est un lion »), vaut largement la halte. Bien sûr, il y a, dans la même commune, le Soldat de l’an II de Georges Schmitt, dans un registre créatif, et la winstub rigolote dite Elsass Gargote. Mais le Erckmann-Chatrian des Richert mérite le coup de projecteur pour son air d’institution de toujours. Il y a le cadre boisé, cossu, un brin années 1950/1960, la belle argenterie, le service alerte, les chambres coquettes et peu chères, l’accueil de l’exquise Netty qui est la vivacité, la drôlerie, l’élégance mêmes, plus la cuisine de son mari Roland, chef de tradition, fou de bons produits et les traitant au petit point.

Sorbet poire et caramel © GP

Prenez les menus gentils et généreux qui, en symphonies alertes, proposent, par exemple, le foie gras ou le poussin grillé avant la meringue glacée (à 19,60 €!) ou les propositions dans l’air du temps (à l’échelon au-dessus).  La jolie  poêlée de cèpes et girolles cueillis dans la grande forêt d’ici, le saint-pierre avec sa tomate au safran, le mignon et ris de veau en viennoise fine font merveille. Comme les jolis desserts. Le sorbet poire au caramel en guise de « trou » digestif ou la douceur de mousse de mangue avec son sorbet et son coulis de framboise indiquent que le sucré est l’une des parties fortes de la maison. Et la cave (avec le riesling Altenberg de Wolxheim signé  Siebert et le meursault Narvaux d’Olivier Leflaive) donne envie de prendre pension.

A l’évidence, l’ami Fritz aurait été heureux chez les Richert!