Haguenau, ville d’art

Article du 5 août 2010

Le repas des paysans de Louis-Philippe Kamm © GP

Elle est la méconnue de l’Alsace du Nord. Comme un petit Strasbourg, bruyant et animé plein centre, un mini bourg de province avec ses abords forestiers, proche d’un nœud autoroutier, ou un gros faubourg de la capitale européenne : tel apparaît Haguenau aujourd’hui. Ce fut, jadis, la cité de l’empereur Frédéric Ier Barberousse, après celle de son père, Frédéric de Hohenstaufen, qui  fondit le Saint Empire Romain Germanique et bâtit la ville sur une île de la Moder. Puis elle devient le chef lieu administratif des biens impériaux en Alsace, avant que la résidence impériale ne soit occupée par un grand bailli.

Détruite par la guerre ou plutôt par les guerres, glorifiée par ses musées à l’architecture étrange – un musée historique dans un étonnant palais néo-gothique, face à la chapelle des Annonciades, un musée alsacien dans un rouge castel en ville -, elle a gardé son tracé en rond, celui d’autrefois, qui suit ses anciens remparts,  de belles constructions, comme sa halle aux houblons, son ancienne douane,  qui a gardé sa façade et son ancienne, son grenier Saint Georges de de 1527,  qui abritait les produit de la dîme, le Moulin Dischlach, qui a conservé sa roue à aubes, l’ancien collège des Jésuite, l’ancien hôpital de noble allure, devenu le trésor public, sans omettre de belles églises et une synagogue de 1820.

Ville d’art, riche de ses collections variées, Haguenau abrite son  beau musée alsacien dans la chancellerie de 1484, avec son horloge astronomique en façade, sa salle des archives, ses costumes, ses coiffes, sa riche collection de meubles polychromes, de poteries et d’imageries, sa « stub » de campagne, reconstituée, son atelier de potiers, ses quelques tableaux pittoresques, dont ce superbe Kamm de 1932, représentant des jeunes filles à l’église. Que l’on prendrait, à s’y méprendre, pour de pieuses petites Bretonnes, avec leur jolies robes en noire et jaune ou vert et leurs coiffes de dentelles…

Haguenau, musée historique de la ville © GP

Le monument le plus amusant de la ville, sinon le plus précieux ? Le musée historique, de type néo-gothique, légué par l’annexion. Ce pastiche de château fort, que bâtirent, de 1900 à 1905, les architectes Kuder et Müller, vainqueurs d’un concours lancé par le maire Xavier Nessel en 1897 pour la construction d’un bâtiment destiné à recevoir sa collection privée, mais aussi la bibliothèque et les archives municipales, ne manque pas d’allure. Beaucoup de visiteurs s’imaginent découvrir ici l’ancien château de Frédéric Barberousse, disparu depuis des siècles. Il est vrai qu’une sculpture représente ce dernier en tenue de croisé à l’angle du porche qui en délimite l’entrée.

On découvre là les fresques en céramique de Charles Bastian de type Renaissance et un vitrail de Léo Schnug, sans omettre un campanile haut de 48 mètres qu’orne une horloge. Au sous-sol, les objets de l’âge de bronze ou du fer, découverts jadis dans la forêt de Haguenau, au rez-de-chaussée, les monnaies et médailles frappées sur place, les collections  médiévales de la période mérovingienne, les livres précieux imprimés ici même entre 1489 et 1530 peuvent retenir le visiteur.

Mais c’est le premier étage qui me requiert, avec sa collection de faïences Hannong, de cristal Lalique, mais surtout ses quelques tableaux de peintres locaux représentant des visages de toujours. Ainsi le portrait de Jacques Gachot, mi-sévère, mi-complice, signé de son copain et complice Luc Hueber, le doux portrait de femme âgée (sa mère?) signé Edouard Hirth. Ou encore ceux, géants, si expressifs, de Gustave Stoskopf (« la Lecture », « le Messager Boîteux »), avec ses paysans austères et leurs belles figures des années 1920 à 1930, aux visages tournés vers l’éternité durable. Et puis ce port de Saint-Malo réinventé par  le discret Martin Hubrecht. Ces peintres des années 20, qui se regroupèrent sous le nom de « Groupe de Mai » et qui s’apparentent à la Nouvelle Objectivité allemande, témoignent d’une vérité sur le temps qui nous émeut aujourd’hui avec tant de force.

J’allais oublier ce chef d’oeuvre qui vaut le voyage ici même: ce beau « Repas des Paysans » de Louis-Philippe Kamm, avec ses couleurs nettes, ses traits solides, ses gestes sûrs, ceux du tableaux bien sûrs, ceux de leurs modèles aussi, qui pourraient être nos parents proches, nos ancêtres modestes, et qui nous parlent d’une Alsace fière, douce, solide, nostalgique, éternelle.

Exposition temporaire à la Chapelle des Annonciades consacrée à Lucien Binaepfel, disciple alsacien de Rouault. Tljrs de 14h à 18h.

Ville de Haguenau – Hôtel de Ville – Place Charles de Gaulle – BP 10249 – 67504 Haguenau Cedex. Tél. 03 88 90 68 50 – 03 88 90 68 91
Office de Tourisme, pl. de la Gare. Tél. 03 88 93 70 00.
Site : www.tourisme-haguenau.eu

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Publié le 5 août 2010 par

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