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La Mare aux Oiseaux

« St Joachim et la Brière : Eric Guérin, l’enfant du marais »

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Article du 10 avril 2012

Eric Guérin © MAO

Sur son bout d’île au cœur des terres, il évoque René-Guy Cadou, poète de l’école de Rochefort et voisin de Sainte Reine de Bretagne, qui répondait préférer « l’odeur des lys, la liberté des feuilles » à ceux qui lui demandaient : « pourquoi n’allez vous pas à Paris ? ». Eric Guérin, élève du Taillevent, de la Tour d’Argent et du Jules Verne, allure de berger ou de pâtre grec, les boucles à l’oreille, a choisi, lui aussi, la liberté et le grand air, le règne végétal et l’amitié des oiseaux dans un domaine du cœur des marais de Brière qu’il agrandit avec ardeur. Il a triplé le nombre de chambres depuis ses débuts, imaginant des suites romantiques et champêtres, gardant le toit de chaume, glissant là des fauteuils Adirondack dans son jardin riches en oiseaux et volatiles de basse-cour en liberté. Non loin de la Maison de la Mariée et de l’éco-musée où se raconte la vie des gens attachés à leur marais indivis, vivant de la tourbe, l’or noir, dont Alphonse de Châteaubriant (relire « la Brière », Cahiers Rouges, Grasset) conta la vie difficile et la fidélité, il a su élargir son domaine avec caractère.

Salade d’avocat © MAO

Le Briéron d’aujourd’hui cultive son jardin, fait faire un bout de conduite au touriste sur un chaland qui dérive entre les roseaux, où le pays se raconte: vols de vanneaux, de busards, de hérons, de fauvettes, de mésanges, de cols verts, de bécassines ou de sarcelles, glissements sourds d’hermines, de visons, de loutres ou de fouines, pêche furtive à travers chaumes et  roseaux. Beaucoup réapprennent les chemins sinueux du pays grâce à Eric Guérin, devenu l’enfant du marais. Alors qu’il se contente de jouer son rôle : celui de  barde sans instrument, de héraut sans oriflamme, de cuisinier poète. Relayé en salle par un jeune service motivé, il écrit ses menus comme on entonne un chant profond. Il y a aura l’anguille en matelote au vert, avec le céleri perpétuel, la coriandre et l’ortie sauvage, ou la grenouille, frottée d’herbes et de persil, ou la croq’pomme de terre servi avec sa burrata crémeuse, ses pousses de saison, sa vinaigrette poireau/gingembre, ou les petits pois frais, la fine purée verte au lait de coco, gambas et shitakés comme un élixir de champignon noir juste épicé. Et puis la truite de Bretagne avec rhubarbe, asperges, beurre noisette au sésame noir ou encore la dorade au kombu, ses crêtes et sot l’y laisse de coq.

Thon, tomate,framboise, livèche © MAO

Vers la Bretagne, la Loire, les îles, le plus lointain, cette cuisine fait voyager. Sébastien Soïc, le directeur maître d’hôtel, raconte, disserte, commente, tandis que le sommelier Cyrille Carré fait connaître ses crus de cœur qui se marient avec aise avec ces mets de funambule agile. Ils jouent les contrepoints fruités et discrets, tels le muscadet Amphibolite Nature de Joseph Landron ou le saumur-champigny Amatéüs de Sébastien Bobinet. On se laisse guider au long de menus qui ont nom « Balade en Brière », « Mare aux Oiseaux », « Picorons Ensemble » ou encore « Coeur de Brière, Terre, Mer et Marais ». Une grue couronnée s’immisce en terrasse, tandis que les colombes encagées chantent au salon. On goûte encore le biscuit aux algues et le curé nantais avec son sorbet muscadet citron vert, puis la pinacolada à l’ananas, avec sa crème glacée Cuba libre ou la boîte praliné avec amandes et fraises. Sans omettre l’esquimau au lait d’amande, à retomber en enfance. C’est un instant de poésie au cœur d’un pays ailé, tendre comme une brise marine. C’est un moment heureux.

Crousti chèvre  @ MAO

La Mare aux Oiseaux

162, île de Fedrun
44720 Saint-Joachim
Tél. 02 40 88 53 01
Chambres : 145-160 €
Menus : 30 (formule), 42, 57, 67, 87 €
Carte : 70-90 €
Site: www.mareauxoiseaux.fr

A propos de cet article

Publié le 10 avril 2012 par

La Mare aux Oiseaux” : 2 avis

  • Charcolin Hélène

    Très belle approche de ce chef qui jamais, ne perd de vue qu’il faut surprendre le palais et les papilles. Cette poésie qu’il porte en lui donne à rêver, les fumets sont étonnants, oui c’est bien cela la » Mare aux Oiseaux  » de Eric Guérin et son équipe.

  • Une maison de vie, la Brière à l’état brut

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