Bürestuebel

Burestubel © GP

Si vous avez des amis désireux de découvrir l’Alsace en une seule soirée, en une seule auberge, avec une seule carte, dans un seul cadre, j’ai votre adresse. Unique en son genre. Cela s’appelle le Bürestuebel. Nous sommes à Pfulgriesheim, au coeur du Kochersberg, qui est la Beauce de l’Alsace, avec ses riches fermes, ses champs de maïs, de tabac, de légumes, de houblon. Le nom de l’enseigne explique bien des choses (“ la table du paysan ”). Comme le lieu  (une ancienne ferme fort joliment retapée), le style culinaire de la demeure, qui mélange tartes flambées en rafales, mets de terroir, plats de toujours, sans omettre le service féminin charmant et, bien sûr, l’accueil familial adorable.

Sarah Meyer et le pied de porc © GP

La prouesse ici ? Servir 250 couverts et que tout le monde soit ravi. Les salles multiples, les recoins, les plafonds peints, les boiseries polychromes, les poteries de Soufflenheim et de Betschdorf, la grande cour pleine à ras bord aux beaux jours : bref on est au théâtre ou au musée. Mais un théâtre bien réél et un musée vivant. Les Meyer, qui font tout en famille, ont réussi à conjuguer rigueur et mesure, gentillesse et sérieux, convivialité et professionnalisme. Rachel est tout sourire à l’accueil, sa fille Sarah sert en salle avec vivacité. Tandis que Pierre, le mari, qui assure aux fourneaux le relais de la troisième génération présente ici même. Cet ancien de Mischler, au Cheval Blanc de Lembach pratique la cuisine régionale en finesse dans un laboratoire apparent.

Tarte flambée © GP

Le four à tartes “ flammées ” (juste traduction de l’alsacien sur une carte qui ne triche pas et tient du lexique bon enfant) est visible, avec ses plaques en pierres tournantes, qui délivrent les diverses tartes en version classique, au fromage blanc et crème épaisse, à l’emmenthal suisse, aux grattons maison. La pâte est fine autant que croquante, l’assaisonnement parfait. On ajoutera les plats chauds ou froids de qualité parfaits dans leur registre simple, au demeurant parfaitement tenu : harengs marinés à la crème et aux pommes, pied de porc pané servi en portion gargantuesque, avec pommes sautées craquantes, « rippele » – plates côtes salées – aux lentilles vertes, “ grumbeerekiechle ” – les fines galettes de pommes de terre – et salade verte, tête de veau croustillante et choucroute géante.

Hareng à la crème © GP

La salade de pot au feu, le baeckoffe, les quenelles de foie ou le boudin sont à l’avenant. Les pommes de terres craquantes et la salade bien assaisonnée sont des « plus ». En accompagnement, le pinot blanc de Stoeffler à Barr, rond et fruité, coule joyeusement dans les verres. La Licorne, servie à la pression, est dessoiffante. Les desserts (pâtisseries et glaces – c’est rare) sont faits maison. L’on se délecte ainsi de  kougelhopf glacé au kirsch, vacherin grand mère, tarte Linz à la framboise ou coupe Suzel, unissant glace vanille et quetsches, qui constituent des modèles du genre.

Salade de pot au feu © GP

Les prix ? Angéliques, tout simplement. Avec des menus qui permettent de faire bombance sans se priver. Bref, voilà une auberge alsacienne qui prône la simplicité comme un bel art et la sincérité comme une religion. Une « boîte » à tarte flambée? Une table familiale? Une taverne géante? Un restaurant champêtre? Sans doute tout cela ensemble. Et côté table de tradition bonhomme, voilà la Rolls du genre.

Kougelhopf glacé au kirsch © GP