Sea Grill

Yves Mattagne © Maurice Rougemont

Il est le n°1 de la mer à Bruxelles, le prince du Sea Grill, au coeur de ce qui fut jadis le SAS Royal et devenu le Radisson. Il est véritablement chez lui, chef et patron à part entière, dans cette salle élégante et chic au coeur d’un hôtel moderne en béton enclavé dans des restes d’anciens remparts. Autant dire que voilà un lieu à part. Il y a un service de grande maison, une cave abondante, un directeur/sommelier disert, Fabrice d’Hulster, qui est présent ici depuis quinze ans, une équipe de salle rodée, élégante et stylée. Jacques Le Divellec, qui fut jadis le conseiller de la maison, a donné son « la » au répertoire culinaire d’ici: les poissons traités comme de la viande, les mariages terre/mer, l’océan revu avec finesse et solidité, le turbot avec sa béarnaise de homard, ses pommes pont neuf, le tartare de thon avec ses frites, le homard à la presse, façon canard au sang, le foie gras aux langoustines. Il y a tout cela ici même, revu en légèreté, servi avec  un éclat princier.

Maquereau © Maurice Rougemont

Yves Mattagne, natif d’Etterbeek, a retenu la leçon. Le bon élève de jadis s’est mué en maître tout court. Il conseille à son tour des tables de choix (comme le Pressoir d’Argent du Régent Grand Hôtel de Bordeaux où officie son élève Pascal Nibeaudau), anime des brasseries en vogue (Yu-Me), surtout il a su, à son tour, imposer un style, sophistiqué, certes, mais sans outrance. Mettant en valeur le produit et lui seul. Comme avec ses jolis tours sur le thème de la boîte de caviar relevé de concombre, qu’il a exporté à Bordeaux et que d’autres ont copié et que l’on a vu faire, récemment, notamment, au Bristol à Paris.

Caviar "Royal Belgium" © Maurice Rougemont

Le nouveau Mattagne, celui qui a deux étoiles et file sur sa troisième? C’est précisemment celui que vous pourrez découvrir ces temps-ci à Bruxelles. Et qui se révèle avec sa manière fine, vive, iodée, inspirée. Ainsi, à travers ses jolies mise sen bouche qui se nomment tartare de saumon fumé à l’huile de noisettes avec son espuma de chou vert, ses croûtons et lardons. Ou encore son joli maquereau mariné aux agrumes, avec wakamé, concombre, gel au wasabi.

St jacques et gyoza © Maurice Rougemont

Les points d’orgue? Ce sera sans nul doute le joli couplet sur le caviar (belge et dit « Royal Belgium »), présenté sur un socle en marbre, voilant un carpaccio de langoustine, escorté d’une fine crème aigrelette et tomates, ainsi que d’une gaufre de Bruxelles aux algues: ébouriffant! Il y a ensuite les vives noix de Saint-Jacques poêlées, flanquées de leurs divins ravioli japonais (les gyosa) au foie gras, avec céleri rave et truffe noire: superbe! Enfin, le bel exercice classique, mais joliment revu en finesse, de la sole meunière avec sa formidable béarnaise d’huîtres, ses coquillages, sa lie de vin rouge.

Desserts © Maurice Rougemont

Pas de grands repas sans grands desserts! Le point final des douceurs se nomme framboise et meringue façon crumble finement crémée ou chocolat Taïnori, avec mandarine, en sorbet, feuillantine, praliné. On souligne encore les vins de partout (grüner veltliner du Kremstal en Autriche, rully de Bouchard, rouge séveux du Minervois-La Livinière Château Laville-Bertrou) qui escortent cette cuisine océane sachant se faire terrienne avec malice. Bref, le capitaine Mattagne tient bon le cap du Sea Grill sur la route des trois étoiles…