Les chuchotis du lundi : les débuts tonitruants de Boubalé à Paris, 3 étoiles pour Ana Roš et la Slovénie, Oscar Garcia le retour en Corrèze, Stéphane Nougier le Bocuse creusois, le fabuleux destin de Rémi Poulain, un nouveau chef à Germigney, tous au bistrot !
Les débuts tonitruants de Boubalé à Paris
Il réussit tout ce qu’il entreprend. Parvient à se dédoubler sans coup férir, à multiplier les lieux et les équipes. Présent à Londres, Jérusalem, Berlin et, bien sûr, Paris, avec Shabour, Shosh, Tekes, sans oublier Balagan, qui doit bientôt réouvrir, Assaf Granit assure les débuts de Boubalé, sa nouvelle table dédiée à la cuisine ashkenaze en version glamour et raffinée – une prouesse ! – abritée au sein de l’hôtel Grand Mazarin du groupe Pariente. Il y sera relayé par son disciple Itamar Gargi, tandis que la salle est veillée par le fidèle Tomer Lanzmann à qui on doit le choix de la belle porcelaine qui renforce l’éclat nostalgique de cette belle cuisine de mémoire. Le lieu possède sa façade autonome, son entrée séparée de l’hôtel, sa cuisine ouverte, quelques places au comptoir face aux labos et aux chefs qui oeuvrent avec ardeur, des tables dans deux salles différentes. C’est, bien sûr, un événement et tout Paris frappe à la porte. Pour la sériole en marinade, mariée au raifort, le foie de volaille haché (« gehackte leber« , en yiddish, devenu sur la carte, en hébreu phonétique, « Kaved Katzutz« ), présenté dans une grande cuiller avec sa poudre d’oeuf, ses oignons caramélisés, son poivre noir, ses croûtons, ses cornichons, le chef d’oeuvre du genre. Et le reste à l’avenant. On vous raconte tout très vite.
3 étoiles pour Ana Roš et la Slovénie
On l’a connue à l’automne 2005, au coeur d’un voyage touristique en Slovénie. Elle venait de reprendre l’auberge familiale d’Hisa Franko de Kobarid, non loin de la frontière et de la station de ski de Kranjska Gora. Cette autodidacte inspirée, qui fut toute jeune championne de ski dans l’équipe de Yougoslavie, puis étudiante en relations internationales, pratiquait alors, en autodidacte inspirée, une cuisine néo-italienne dans le vent et nous charmait alors avec ses tagliatelles au lièvre et ses fleurs de courgette au chèvre – le Frioul n’est guère loin de ces parages montagneux et slovènes, dans la maison de famille de son compagnon Valter Kramar. Valter est aujourd’hui son sommelier et voilà que Ana Roš reçoit l’onction des 3 étoiles dans le nouveau Michelin Slovénie avec une cuisine enracinée volontiers minimaliste, mettant en valeur les produits de son pays. Désignée en 2017 comme « meilleure cheffe du monde », elle est aujourd’hui la première cuisinière européenne – outre Italie et France – a obtenir trois étoiles (trois ans, seulement, après les deux étoiles gagnées dans le tout premier guide Michelin Slovénie paru en 2020). Outre le restaurant d’Ana Roš, le restaurant Milka de David Žefran situé à Kranjska Gora obtient deux étoiles. Sept restaurants qui détenaient une étoile l’an passé la conservent. Sept autres restaurants sont laurés d’un bib gourmand indiquant le bon rapport qualité. Tout cela fait de la Slovénie le pays émergeant les plus couronné au monde rapporté à son faible nombre d’habitants (un peu plus de 2 millions).
Oscar Garcia, le retour en Corrèze
Oscar Garcia ? On l’a connu débutant a 25 ans, au moment où le Michelin faisait de lui le plus jeune étoilé de France. C’était à Uzès (Gard), dans la demeure éponyme, affiliée alors aux Relais & Châteaux dont ce toulousain d’origine avait fait une table d’élite fort recherchée. Formé chez Dominique Toulousy aux Jardins de l’Opéra dans sa ville natale, puis chez Franck Putelat à Carcassonne, qui fut conseiller de sa demeure étoilée, il frappait déjà par sa précision technique et sa maturité. Voilà qu’on retrouve, huit ans après, ce magicien zélé et discret, qui sait faire simple avec science en gérant d’une demeure hors norme, appartenant à la famille Andros qui produit en autres les fameuses sucettes Pierrot Gourmand et les jus de fruits frais à l’orange sanguine. Un manoir du XIXe, plus un ajout très contemporain et même futuriste abrite cinq chambres confortables, une cuisine ultra-moderne, une belle terrasse avec vue sur la campagne corrézienne et ses proches parages lotois : voilà son lot au sud de la Corrèze. La maison accueille pour des déjeuners simples mais délicieux et peu chers en semaine, une dînette dégustation plus onéreuse le soir. Et Oscar qui n’a rien perdu de son talent, de ses belles idées, jouant de la cueillette dans les jardins proches (d’où le nom du lieu) est entouré de sa compagne Julie Pons, avec qui il tint, après Uzès, « Bonbonne », cave à manger dans sa ville natale, plus le talentueux pâtissier Moulay Fanny, ancien de chez Rouquette au Park Hyatt-Vendôme, star d’instagram, réputé pour ses créations sans sucre superflu. Le lieu se nomme Cueillette. Et le village « perdu » : Altillac. A noter sur vos tablettes !
Stéphane Nougier, le Bocuse creusois
Il est, on le sait, le « Bocuse creusois » et le chef – le seul du genre ! – qui vaut le voyage dans son département pile pour lui-même. Ce bon disciple devenu un maître est passé jadis chez Roland Durand, le maestro auvergnat et doublement étoilé du Relais de Sèvres dans le 15e, avant de partir avec lui au Camélia de Bougival, sans omettre d’oeuvrer chez Monsieur Paul à Collonges-au-Mont-d’Or et de filer sur la Côte d’Azur aux Issambres à la Villa Saint-Elme. Stéphane Nougier, qui représente la 3e génération présente dans sa classique auberge de Saint-Etienne-de-Fursac, sise non loin de la gare de la Souterraine, qui permet de relier la Creuse à la capitale en moins de 3h, a modernisé sa demeure, embelli ses chambres, éclairci sa salle et ses salons d’accueil, mais aussi allégé sa manière. Il joue aujourd’hui, pour un nombre de couverts restreint, le menu surprise avec brio, mettant en valeur les produits de sa région, mais n’hésitant pas à enrichir sa palette et aller voir ailleurs. Tout ce qu’il propose dans un cadre raffiné avec un maître d’hôtel stylé et une carte des vins au diapason se situe nettement au niveau de l’étoile. Et bien au-dessus du bib gourmand qui exprime sa générosité mais où ce technicien hors pair est bien à l’étroit. On y revient vite.
Le fabuleux destin de Rémi Poulain
Rémi Poulain? On a connu ce jeune ancien de la Tour d’Argent et du Laurent au Sinople dans le Marais, puis chez Jean-Paul Arabian au Caméléon, avant le Christine dans le 6e. Il a repris depuis avec succès Escudella du Top Chef Arthur Berlan dans le 7e. Voilà qu’il ouvre « l’Evadé » avec son associé Anthony Riviere, dans l’ex demeure de Julie Rivière, qui fut jadis une auberge du 9e parisien dédiée au Sud-Ouest en général et au Sud Ouest en particulier. Rémy et Anthony ont modernisé le lieu qui conserve son cadre en pierres, bois et poutres à l’ancienne, avec ses éclairages un peu vif. Le service va de l’avant. Et le registre proposé est bistronomique mais très gastronomique, insistant, au déjeuner, sur le bon rapport qualité prix avec un menu à 39€. Notez l’adresse : 23 rue Clauzel, près de la place Saint-Georges. On en reparle!
Un nouveau chef à Germigney
Les changements du Château de Germigney, à Port-Lesney dans le Jura, on vous en a parlé déjà plusieurs fois. La maison, affilée aux Relais & Châteaux, avait deux étoiles pour sa table dite « Maison Jeunet », administrée par le belge Steven Naessens qui avait succédé à Jean-Paul Jeunet à Arbois et y avait transposé son enseigne. Celui-ci étant officiellement « en congé maladie », le patron de la maison, Jocelyn Gelé, qui possède, également et entre autres, l’excellent Parc à Besançon, a recruté pour Germigney une pointure en la personne de Francesco di Marzio. Ce jeune romain qui a démarré sa carrière à l’Open Colonna dans sa ville natale, a voyagé au fil de grandes tables où il a oeuvré sur le mode de la cuisine française créative : ainsi le trois étoiles Benu de San Francisco, en compagnie de Corey Lee, l’ancien chef de cuisine du French Laundry de Thomas Keller, puis la Green House, le deux étoiles de Mayfair à Londres, puis dans un autre deux étoiles, à Hong Kong, cette fois Amber, avant de devenir le chef d’Anne-Sophie Pic à Singapour et d’obtenir avec elle une étoile au Raffles. Son objectif à Germigney : y regagner rapidement une étoile, puis deux si possible. La table du lieu change, en tout cas, de nom et se nommera, à partir de fin septembre, Villa Rosella, en hommage à la maman du chef qui lui a enseigné l’art de la cuisine et des saveurs justes dès ses 14 ans.
Pure homonymie !
Merci pour tout ça ! Un lien entre Anthony Rivière et Julie Rivière ou simple accident d’homonymie ?