Jean-Marc Roberts? Nous nous sommes connus en 1972, à la fête de l’Huma, où il signait son premier roman « Samedi, dimanche et fêtes », publié à 18 ans, qu’il me dédicaça avec drôlerie, déjà, et une faute de grammaire. On se retrouvera en 1974, dans l’équipe littéraire de Jean Le Marchand au Quotidien de Paris, alors qu’il défendait les auteurs qu’il aimait, Patrick Modiano en toute première ligne, se promenait autour de la place Saint-Sulpice, clamant très fort, pour que tout le monde l’entende : « un jour, tout cela sera à moi!« . On déjeunait chez Tiburce  rue du Dragon ou chez Lipp, et on refaisait le monde. Il est devenu le grand éditeur que l’on sait, passant de Julliard au Seuil, puis au Mercure de France, avant Fayard et enfin Stock, où il imposera la fameuse collection « bleue ». Il publiera, entre autres, Christine Angot, Nina Bouraoui, Philippe Claudel, Brigitte Giraud, Simonetta Greggio, Jean-Louis Fournier, Franck Maubert, Erik Orsenna, Eric Reinhardt qui – ils sont vingt sept en tout – lui rendent aujourd’hui hommage. Grand lecteur, ami passionné, donnant à tous l’impression d’être unique, grand magouilleur aussi, se battant – avec quelle verve ! – pour que ses protégés obtiennent un grand prix d’automne. Ce joueur de poker était un risque-tout. Il obtint lui-même le Renaudot en 1979 pour « Affaires Etrangères » , m’engueulant vertement auparavant car j’avais eu l’audace de préciser, dans « les Nouvelles Littéraires », que l’éditeur maléfique de son roman était inspiré de son big boss Bernard de Fallois. Jean-Marc était un prince, un poète, un manipulateur de génie que nous aimions tous et tant. Disparu trop tôt  à 58 ans – il a toujours été précoce … – , regretté par tous., il provoque aujourd’hui ce magnifique hommage littéraire rassemblé par la fidèle Capucine Ruat. Un beau livre et une belle action.

Je vous ai lu cette nuit, hommage à Jean-Marc Roberts (Albin Michel, 250 pages, 20,90 €).