Ruche, au domaine des Bruyères
« Gambais : quand Franck et Cybèle Idelot créent un petit paradis gourmand »
Franck et Cybèle Idelot ? Ils font florès en banlieue, séduisent les gourmets de Boulogne-Billancourt, à l’enseigne de la Table de Cybèle. Lui champenois et fils de vigneron, elle californienne quasi autodidacte, même si elle a exercé à Saint-Barth, notamment à l’Eden Rock – elle est notre Alice Waters à nous! – s’offrent une magnifique magnifique récréation aux champs. S’ils conservent leur table banlieusarde, qui excelle au quotidien avec la jeune Lucie Dehem aux fourneaux, ils ont fait d’un ancien relais de poste de 1850 revu à leur manière contemporaine avec chaleur et sobriété, un lieu de grand charme et de haut goût.
Le vaste potager leur fournit l’essentiel de leurs légumes et de leurs herbes. Leurs pêcheurs sont des amis. Le volailler est un voisin de Bazainville. Bref, on se dit que les Yvelines et les lisières nord de la haute vallée de Chevreuse, revus à leur manière, représentent un petit paradis gourmand ouvert à tous. Témoins ces recréations végétales qui ont nom cosses de fève en émulsion et marmelade feuille de tilleul et pâtisson fermenté sur chips de graines, servis en amuse-bouche, qui font des entrées en matière jolies, bonnes et fraîches.
Mais tout le reste est à l’avenant, comme la bonite fumée avec poireau, poutargue maison, rhubarbe et pistaches, puis les asperges blanches rôties avec leur léger bavarois de pain au levain torréfié, leurs mousserons, leurs jus végétal, et encore le maigre aux petits pois au lait fermenté, girolles, pousses de sapin, sauce fanes de carottes, sans omettre le filet de canette, tendre et juteux, subtilement marié avec la betterave rôtie au fenouil, plus un chutney de feuilles de betteraves et relevé de kumquat qui confère à ce plat carnassier une fine et subtile acidité.
On achève sur la rhubarbe et sa compote au curcuma frais, avec son moelleux et sa glace au tournesol torréfié ou encore la crème glacée à l’orge malté, avec son biscuit noisette, sa mousse à la confiture de petit lait et son caramel chocolaté. La grande cave des vins a bien de la ressource, plaçant le bio en avant. Mais, au verre, on propose l’Uivo moscatel gallego bianco du Portugal comme le beaujolais-Lantigné dit « Glou des Bret » signé Bret Brothers qui font tranquillement l’affaire et s’accordent parfaitement à une symphonie végétale.
Cinq chambres délicieuses sont là en prime pour l’étape heureuse. Question au Michelin : comment une table comme celle-ci, vive, légère, raffinée, au sens du goût si aiguisé, couronnée d’une étoile verte, peut-elle échapper encore à l’étoile rouge, la « vraie« ..?