Akabeko
« Paris 7e : Yasuo Nanaumi, le grand retour »
Ce briscard nippon et tout bon, on le suit depuis belle lurette. On l’a connu jadis à la Maison d’Amérique Latine, puis chez Wa, et encore chez Ao Izakaya, jouant d’abord d’une registre franco-français avec des finesses nippones, rigoureuses et légères, ensuite en version japonais fusion, avec rolls et sushis, un brin californiennes. Voilà Yasuo Nanaumi enfin chez lui, associé à son fils Ken, qui fut chef dans une vie antérieure, avec Louis Grondard et Yannick Alléno puis dans des tables étoilées en Angleterre.
Lui, qui apprit le métier en France et travailla notamment chez Vergé au Moulin de Mougins puis au Lucas Carton avec Michel Comby, fit partie de la première vague nippone (celle des Taira Kurihara chez Taira ou de Katsumaru Ishimaru aux Géorgiques) venue se frotter à la manière hexagonale. Après avoir pratiqué une cuisine japonaise version fusion sous la houlette d’un propriétaire chinois, il s’amuse à composer la cuisine de son coeur : française et japonaise à la fois, produits d’ici et d’ailleurs, rigueur technique et légèreté sans faille.
Le lieu, qui se nomme Akabeko et fait référence à la vache rouge, genre jouet pour enfant petits et grands de Fukushima, dont il est originaire, a le chic design sur deux étages : salle cosy et panoramique au premier étage, comptoir avec sa vue sur la cuisine ouverte, où s’exerce le chef et ses rares commis, voilà ce qu’on trouve là. Et le septuagénaire mince comme soba et en grande forme éblouit son monde à chaque bouchée.
>Tempura de saint Jacques avec yuzu kosho, caviar de Sologne, shizo et mayonnaise épicée, carpaccio de sériole japonaise façon sashimi, tobiko au wasabi, yuzu fumi ou rouleau d’asperge verte, asperge blanche panée au Panko et Aonori, écume de sauce nantaise, tuile matcha sont la fraîcheur même. Le foie gras poêlé sur sushimeshi (un splendide riz koshi hikari) est la légèreté même, que relève une sauce teriyaki, un tempura de betterave, des fleurs comestibles (souci et pensée).
Les mets de résistance sont classiques, mais fort chics, comme ces goujonnettes de sole sauce champagne à l’oseille, roulé de chou chinois et épinard, tuile curcuma avec son feuilletage léger genre bouchée à la reine ou si l’on préfère de vol au vent. Ou encore le duo de boeuf, avec filet de charolais et wagyu A5, mousseline de céleri rave, champignon eringi, sauce vin rouge et yuzu kosho, mille-feuilles de pomme de terre fondante: superbe !
On achève sur les quenelles de chocolat noir infusé à la fève de tonka, crémeux de café, tuile et crumble chocolat amande, guimauve maison et on loue le choix de vins au verre en rapport: chablis 1er Vaucoupin de Cyril Gautheron 2020, pinot gris de Laurent Vogt Wolxheim 2021, pouilly-fuissé domaine Vaupré « terroir » 2021 et côte de nuits villages du clos des Langres, monopole 2018 du domaine d’Ardhuy avec le doux aleatico, toscan 2019, sovana superiors de la fattoria Aldobrandesca impeccable sur le chocolat. Voilà, ou on n’y connaît rien, une divine surprise !