On avait loupé, il y a deux ans, ce beau livre qui a obtenu prix Jean Freustié 2021. Voilà, avec sa parution en poche, l’occasion de se rattraper. Sébastien Lapaque, que nous lecteurs connaissent bien pour ses livres épicuriens, notamment sur le vin, s’y révèle en contempteur du monde moderne, dressant le portrait d’un homme prénommé Lazare, prof’ d’histoire/géo, perdu dans un univers contemporain, gâté par la vulgarité et nommé par lui « l’immonde« . Il est séparé, bien malgré de lui, de sa compagne Béatrice, qui le quitte pour un temps indéterminé et rejoint ses parents à la Rochelle. Son drame? N’avoir pu lui faire d’enfant. Il va chercher un nouveau sens à son existence, rencontrer l’étrange et séduisante Lucie, retrouver peu à peu tous ses amis d’enfance, revenir chez lui, en famille, à Chartres, et y découvrir une nouvelle illumination. L’amour, la foi, l’amitié, la désillusion, l’interrogation face à Dieu : voilà quelques uns des thèmes abordés dans ce roman rédigé avec une vraie ferveur, qui est celle d’un disciple, hors mode, de Bernanos et de Péguy. Comme l’hédoniste qui sommeille – à peine – en Sébastien Lapaque se réveille, l’une des plus belles scènes du livre se passe à Chartres, à l’Auberge du Grand Monarque, où Lazare invité par son père, va partager coquilles saint-jacques et mâcon-villages, lièvre à la royale et romanée saint vivant du domaine de la Romanée Conti, avec un sorte de naturel confondant, se muant en royale indifférence, qui permet à l’auteur de « Chez Marcel Lapierre » de se montrer à la fois juste, sobre – c’est le mot – et sensible, dans le regard père/fils vu à travers le prisme de la table et du vin. Clair et riche d’espoir, voilà un livre bien digne de son beau titre. A lire, relire et partager.

Ce monde est tellement beau de Sébastien Lapaque (Actes Sud, Babel, 430 pages, 10,50 €