Les chuchotis du lundi : Christophe Moret quitte le Shangri-La, l’Archestrate nouvelle vague du 7e, attention le Chardonnay arrive ! Paul Pairet fera simple au Crillon, quand Inaki Aizpitarte se raconte, Ghislain Varillon l’outsider du pays beaujolais

Article du 19 décembre 2022

Christophe Moret quitte le Shangri-La

Christophe Moret © GP

On se doutait bien qu’il allait finir par trouver son bonheur ailleurs. L’Abeille, la table deux étoiles où il livrait le meilleur de lui-même n’avait pas réouvert après le premier confinement et la brasserie fusion, la Bauhinia, ne lui permettait pas de s’exprimer pleinement. Christophe Moret quitte donc le Shangri-La à la fin de ce mois. Il va prendre un peu de recul (de deux mois au moins) avant de décider de son avenir. Pour l’ancien chef d’Alain Ducasse au Plaza-Athénée, qui fut également celui, titulaire de deux étoiles de Lasserre, c’est une nouvelle période de sa vie qui commence.

L’Archestrate nouvelle vague du 7e

Shirley Duthilleux © GP

Il faut un peu de culot pour nommer l’Archestrate une table située à 200 mètres (240 exactement !) de la maison légendaire d’Alain Senderens, qui abrite aujourd’hui l’Arpège d’Alain Passard. Mais le nom était vacant, et la maison fait ainsi, avec une carte historique du grand Alain S., chez qui travailla le grand Alain P., déposée sur une crédence, un clin d’oeil à cette enseigne disparue, demeurée chère au coeur des gourmets. L’adresse, en tout cas, n’est pas une inconnue. Ce fut (sous le nom de « Trentaquattro »), au 34 rue de Bourgogne, dans le 7e parisien, une trattoria de qualité, très authentique,  spécialiste  en risotti de toutes sortes, et aussi une table gastronomique française, nommée Savarin, avec des coups de chapeau au Vivarois de Claude Peyrot, signée Mehdi Kebboul. Voilà donc l’heure des Vaissière, qui possèdent notamment le 122 rue de Grenelle, qui ont placé là aux fourneaux la jeune Shirley Duthilleux, 24 ans, ancienne de la Maison d’Amérique Latine (avec Thierry Vaissière), du Ritz avec Nicolas Sale et du Cheval Blanc aux côtés d’Arnaud Donckèle. Au menu, plutôt bref, des mets vifs et néo-classiques, qui sortent volontiers de l’ordinaire. On en parle très prochainement.

Attention, le Chardonnay arrive !

La façade © GP

C’est la nouvelle maison des Dumant, juste à côté de leurs Crus de Bourgogne. Après l’Auberge Bressane, dans le 7e, les Marches, leur « routier sympa », la Kontxa et le Paris Seize dans le 16e,  plus Aux Bons Crus dans le 11e, cette neuve demeure, même si le lieu a l’air de dater des années 1950, avec ses luminaires Art déco, ses banquettes de moleskine, son grand miroir avec sa carte du vignoble champenois, ses vieux menus de restaurants oubliés (comme ce Coq Hardi de Reims, qu’on ne se souvient guère d’avoir croisé) – est leur 7e maison si l’on compte bien. C’est le malicieux Félix, le fils de Jérôme, l’aîné des deux frères fondateurs, qui se colle à la besogne, mixant ici tout ce qu’on aime chez eux, un vieux et beau décor – on l’a dit -, une « bonne cuisine parisienne », aux racines provinciales et notamment rhônalpine, des vins choisis, des tarifs sages et un sens de la tradition affirmé avec netteté, plus quelques innovations du moment, avec des hommages à la « street-food » et des clins d’oeil à la cuisine fusion. On vous dit tout très vite…

Paul Pairet fera simple au Crillon

Paul Pairet © M6

Il conserve ses trois étoiles, pour son restaurant Ultra Violet dans le guide Michelin Shanghai sorti en Chine la semaine passée – publié dans le contexte quasi-psychotique de la politique du « zéro covid » prôné par le gouvernement chinois, mais il sera présent à Paris. Paul Pairet ouvre, en effet, sa brasserie, annoncée depuis deux ans, au Crillon. Ce natif de Perpignan, qu’on connut au Café Mosaïc à la fin des années 1990, avenue George V, à l’emplacement de l’actuel hôtel Fouquet’s Barrière, fait ainsi son grand retour dans la capitale. Passé jadis avec José Lampréia à la Maison Blanche dans le 14e arrondissement, un temps chef à la Table d’Harmonie dans le 5e, le chef à la casquette, qui est membre du jury Top Chef, va redonner du sens à la brasserie d’Aumont qui devrait ouvrir dans la décontraction avec un décor rafraîchi par Tristan Auer, le tout sous sa gouverne et sous le nom de « Nonos et Comestibles« . L’établissement se partagera entre deux formules : « Nonos » proposera une carte « longue, comme dans les restaurants chinois, avec des propositions allant de 6 à 250 €, sans omettre un steak frites, plus une sélection de belles pièces de viandes et de poissons grillés au Josper ; tandis que « Comestibles »  se veut un « snack » offrant tapas et snacking chic, avec  un oeuf mimosa, comme un tartare plus « de belles olives, du tarama, des huîtres, des bulots mayo, du saumon fumé« … Ouverture prévue : le 18 janvier prochain

Quand Inaki Aizpitarte se raconte

 

Cela s’appelle « Tocino de Celo«  (autrement dit « lard du ciel« ) et c’est le premier livre d’Inaki Aizpitarte,. Pas un livre de recettes, non, le chef-patron du Chateaubriand s’y est toujours refusé. Mais une confession, une autobiographie, un entretien à bâtons rompu où ce diable d’Inaki se raconte, dialogue avec Catherine Flohic qui pratique ici l’art de la « maïeutique », fait parler ce « taiseux », l’accouche de ses pensées, de son itinéraire sinueux, de sa démarche un peu à part. Ce cuisinier qui n’appartient à aucune école mais a initié des modes, se montre « libre, imprévisible, direct et sensible« , maniant « l’art du paradoxe gourmand et l’émotion gustative » avec un talent évident. Ce quasi autodidacte, qui a été chef de partie chez Gilles Choukroun au temps du « Café des Délices », a connu le grand émoi à Tel Aviv, sur une scène gourmande et libre,  puis a fait son « grand voyage » entre Amérique du Nord et Centrale, Mexique, Nicaragua, avant de connaître l’Espagne. Le titre de ce livre est emprunté à un flan andalou devenu son dessert fétiche,  le tocino de cielo. Ce petit ouvrage étrange, oublié dans une collection rare (où l’on a apprécié les volumes consacrés à l’amer ou le fade), intrigue, interroge sur l’art de la cuisine, et finalement séduit comme un met singulier.

Ghislain Varillon l’outsider du pays beaujolais

Ghislain Varillon © GP

Il est né à Paris, a été élevé en Bretagne, a appris la cuisine à l’Institut Paul Bocuse d’Ecully, a bourlingué, en Normandie (à la Ferme Saint-Siméon d’Honfleur), au pays basque (avec Jean-Marie Gauthier au Palais à Biarritz), en Corse (à la Villa de Calvi, avec Christophe Bacquié). Ghislain Varillon s’est enraciné en terre beaujolaise sans oublier les bonnes leçons apprises, mariant avec aise tradition et création. Il s’est installé à Cercié, à deux pas de Villié-Morgon, à l’enseigne de l’Ecume Gourmande. Son cadre, sobre et contemporain, a du chic, avec ses bouteilles sous vitre, sa cave est richissime, le jeune service fait ses gammes avec application et les jolis menus racontent son idée changeante et moderne de la « grande cuisine française » revue au goût du jour, avec notamment un lièvre à la royale d’exception. Etoile en vue.

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Publié le 19 décembre 2022 par

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