Ceto au Maybourne Riviera
« Roquebrune-Cap-Martin : Ceto en plein ciel ! »
Soyons de bonne foi, juste et factuel : voilà le restaurant gastronomique le plus panoramique de la Cote d’Azur (même si le genre ne manque pas – entre le château Eza et la Chèvre d’Or à Eze, le Petit Nice à Marseille, le Louroc au Cap d’Antibes ou le château Saint-Martin à Vence), avec son service jeune et attentionné, ses propositions marines fort bien venues, le soin accordé à toute chose par une équipe jeune et dynamique, mise en place par le magicien italo-argentin de Menton, Mauro Colagreco.
Aux commandes des fourneaux, son jeune et excellent disciple Andrea Moscardino, vénitien de 29 ans, passé chez lui au Mirazur, mais aussi chez Alléno à Paris et Bras à Laguiole, qui pratique la cuisine marine avec une dextérité sans faille. Le cadre est superbement neutre, tout entier tourné vers la mer, surplombant le rocher monégasque et la Principauté avec ses tours vertigineuses, au sommet du Maybourne Riviera, ce bel hôtel moderne qui a remplacé – avec quelle adresse ! – l’ancien Vista Palace de Roquebrune Cap Martin.
La carte des vins est séductrice, les choix abondant dans tous les vignobles et le joli rosé de Provence du domaine de la Realtière « Cante Gau » (autrement dit : « chant du coq ») signé Pierre Michelland fait un bien joi flacon qui s’accorde avec tous les plats marins, vifs, iodés, mordants et singuliers d’une carte séductrice. On vous en a, certes, parlé au début, alors que la maison était en rodage. On savait, on pressentait que l’étoile allait vite arriver.
Ce qui est d’ailleurs advenu sans tarder, sans équivoque, ni contestation d’aucune sorte. Le vibrionnant Mauro veille d’ailleurs sur le lieu d’assez près, depuis les parages de Menton. Ce qui vous attend là ? Du bon, du rigoureux, de l’insolite, dominé avec pertinence par l’équipe en place. Ainsi les amuse bouche marins dont une splendide brandade de merlu, la fraîche salade d’haricots de terre et mer aux prunes, le superbe thon rouge, issu de ventrèche maturée aux algues kombu, avec sa sauce XO, accompagné d’un whisky signé Benjamin Kuentz- immergé a Ouessant. Le « caviar du thon » !
C’est savoureux, cérébral sans nul doute, mais dominé avec une constante maestria et exécuté comme à la parade sur une partition soignée. Ainsi, la très fine raviole de laitue de mer aux gamberoni et son diaphane consommé de tomates aux agrumes, son retour de petit bateau (une daurade rose), avec sa « texture » de maïs (grains, en crème, mixés) aux couteaux de mer, son sabayon au micro-algues ou son retour de pêche (une daurade coryphène), avec sa cueillette gourmande de bord de mer.
On n’oublie pas au passage le gâteau de courgettes niçoises, ses saveurs iodées, son écume de vin jaune, qui fait un couplet végétal de haute tenue. Ni la laitue de mer avec crumble et pastèque ou encore l’amusant millefeuille marin à l’algue Nori, vanille Bourbon et sauce « toffee », autrement dit, et pour parler français, caramel. Manière de mettre la mer dans tous ses états et à toutes les sauces…
On insiste sur le décor vaste, clair et singulier, le sentiment d’être en « plein ciel ». Et on loue, in fine, les bien jolies mignardises servies dans une boîte à tiroirs, en fin de parcours, sans omettre de saluer le service prompt et souriant, même s’il ralentit un tantinet son rythme sur la fin…