Hostellerie Jérôme

« La Turbie : Cirino, mage hors pair et sorcier fou »

Article du 9 octobre 2022

Bruno Cirino en cuisine © GP

On vous a déjà tout dit ou presque de Bruno Cirino, ce chef hors pair que l’on suit depuis au moins trente ans – il était, à l’époque le maestro gourmand du Grand Hôtel à Saint-Jean-de-Luz. Installé depuis deux décennies au moins à la Turbie, dans l’ancienne hostellerie Jérôme, avec ses trois chambres, sa belle salle à manger sous les voûtes, sa cuisine qui jouxte, à l’entrée, les lieux où l’on dîne, ce « cuisinier pour cuisinier », que ses pairs, comme Jean-François Piège qui fut son élève au Château Eza d’Eze-Village, révèrent et que les connaisseurs portent au pinacle, est capable d’accomplir des kilomètres pour quérir le bon produit, légumes tout frais ou langoustine vivante, sur les marchés d’Imperia et de San Remo.

Ambiance © GP

A la Turbie, dont un monument romain – le trophée des Alpes – rappelle la victoire d’Auguste sur les tribus ligures, il veille sur son proche Café de la Fontaine et chaque soir, sauf dimanche et lundi, il s’affaire à garnir ses fines assiettes de choses exquises, jamais goûtées ailleurs. On ajoute que Marion, sa bonne fée, qui fut harpiste au Royal Monceau dans une vie antérieure – alors que celui-ci en était le chef tonitruant – , devenue sommelière experte, a composé l’une des plus belles cartes des vins de France avec quelques 40 000 bouteilles, tarifées sans excès, sa Bourgogne natale en ligne de mire.

Marion Cirino et la dégustation © GP

Un lieu à part ? Vous l’avez compris. Avec ce service dévoué et aux aguets, ces clients passionnés, qui mangent délicieusement, boivent bien, et davantage de vin que d’eau, cette atmosphère de club de connaisseurs, où l’on vient découvrir les dernières idées du maître, comme une sorte de chapelle gourmande sous ses lumières modernes où l’on est forcément recueilli. Il y a aura ainsi les amuse bouche sur le thème des moules, des noix fraîches, des cèpes et de la crème d’ail, les écrevisses, savamment décortiquées avec les haricots cocos au bouillon corsé formant de bien jolis préludes.

Écrevisses et cocos au bouillon corsé © GP

Puis ce singulier homard rôti aux mirabelles savamment dénoyautées, avec son eau de vie du même fruit, sa brioche en fine chapelure, rappelant que ce natif du Sud de l’Italie (côté Campanie) est venu à un an dans le grand Est avec sa famille nombreuse. Elevé à Wisches, dans la vallée de la Bruche, ayant fait ses premières armes, à 14 ans, au Parc de Marc Wucher à Obernai, il sera le second des Vannes à Liverdun des Simunic, près de Nancy, alors titulaire de deux étoiles, avant d’oeuvrer chez Jacques Maximin , pour lequel il inventa jadis, c’était au temps du Négresco, la fameuse courgette-fleur au beurre de truffe. Il a été ensuite chef saucier à la Bonne Auberge de Jo Rostang à Antibes, lieutenant d’Alain Ducasse au Juana à Juan les Pins, puis chef à Paris au Vernet et au Jardin du Royal Monceau où il rencontra Marion.

Homard rôti, mirabelles, eau de vie, brioche © GP

Mais revenons à nos moutons, on veut dire à ce repas d’exception qui sonne comme une leçon de choses.On embraye ainsi sur le « mare nostrum », méli-mélo de crustacés et poissons du moment, en coupelle, avec agrumes et concombre doux, puis on craque sur l’émincé de seiches, comme des tagliatelle, raidies à la vapeur avec leur jus iodé. Puis on picore les langoustines au jus Bellini avec pêche et verveine, avant de craquer pour la soupette de gamberoni aux noix nouvelles. On fera l’économie, cette fois-ci, du pageot aux champignons de petite cueillette comme l’amanite des Césars comme du chapon dit « rouge feu », avec son bouillon safrané, pour se concentrer sur les plaisirs carnassiers.

Soupette de gamberoni aux noix nouvelles © GP

Ces derniers sont la finesse même, entre splendide agnelet à l’ail doux, truffe noire, morilles blanches d’automne ou craquant pigeonneau rôti avec sa réduction aux olives noires que parfume le vin de Bandol. Côté vins d’ailleurs, on se sera fait plaisir avec le rare champagne Rémy Leroy avec ses fins arômes briochés ou le chambolle-musigny 2009 de Christophe Roumier tout en élégance retenue et en finesse pour s’harmoniser avec des produits de la  terre comme de la mer, des plaisirs sucrés autant que salés.

Agnelet, ail doux, truffe noire, morilles © GP

Et l’on fait une place aux desserts qui ont toujours été là un temps fort, avec le sorbet dattes blanches et citron confit, la figue blanche “goutte d’or” et la noire parfumée au fenouil sauvage, le kaki flanqué si finement avec la glace straciatella, pistache et noix, le « 100% grenade », pur jus, pur fruit, d’extrême concentration, la craquante poire Coscia rôtie au romarin, noix, pistaches et raisin avec un mini et fort craquant millefeuille à la crème vanille. On craque enfin sur les mignardises avec un coup de chapeau au concentré de citron et au gianduja maison, mais aussi aux petites tartelettes framboises et myrtilles. Comme on vous le disait il y a onze ans, il y a toujours un sorcier à la Turbie ..

Poire rôtie, noix, pistaches, raisin, millefeuille vanille © GP

Hostellerie Jérôme

20, rue Comte de Cessole
06320 La Turbie
Tél. 04 92 41 51 51
Chambres : 105-165 €
Menus : 139, 185 €
Carte : 250 €
Fermeture hebdo. : Tous les midis. Lundi, dimanche
Site: www.hostellerie-jerome.com

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Publié le 9 octobre 2022 par

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