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Les chuchotis du lundi : Marc Haeberlin et les siens, Braise et Sylvain Courivaud arrivent à Paris, l’avènement de Thomas Eblin à Ribeauvillé, Gilles Epié ouvre l’avant-garde à Washington, les succès franco-français d’Alain Caron à Amsterdam, Olivier Nasti fait son pain à Kaysersberg

Article du 22 août 2022

Marc Haeberlin et les siens

Marc Haberlin avec Guillaume Schuller et Jean-Paul Bostoen © GP

Il tient son auberge façon « maison de paradis », avec maestria. Cette Auberge de l’Ill, on la connaît par coeur et  on la vante depuis tant et temps. Y aller comme en pèlerinage, une fois l’an, c’est s’assurer un moment de bonheur sans ombre. Marc Haeberlin, le patient et discret héritier maison, a désormais soin d’indiquer le nom de ses collaborateurs de cuisine sur la nouvelle carte, illustrée d’un beau dessin du parrain et regretté Jean-Pierre. Ainsi le MOF 2011 Jean-Paul Bostoen, le sage Jean Winter, l’adjoint et second au passe Guillaume Schuller, avec lesquels il s’avance à visage découvert, renouvelant le style maison, mais sans brader les classiques ni renier l’héritage. Il rend également hommage au service de salle, ici magnifié avec la directrice du restaurant, qui n’est autre que sa soeur, Danielle Baumann, le premier maître d’hôtel, qui excelle dans le service du foie gras à la cuiller, Patrick Zuccolin, les maîtres d’hôtel, Laurent Schneider et Stéphane Laruelle, plus le jardinier qui entretient ce morceau d’Eden, à fleur d’Ill, Hubert Steib. Une manière de dire qu’à l’Auberge de l’Ill prime l’esprit d’équipe. La cuisine, elle, fait la part belle à la tradition comme à la modernité, on hésite toujours ici entre l’ancien et le nouveau, les « plats qui ont fait la renommée de l’Auberge de l’Ill » et ceux apportés par la saison et qui changeront à la suivante. On grappille, en liminaire, au jardin – le plus beau de France, sous les ombrages, face à l’Ill, les amuse-gueule exquis : croque monsieur à la truffe d’été, maki aux œufs de saumon et cornet au caviar. On se délecte ensuite de la délicate terrine de tomates avec eau de tomate et émulsion raifort qui fait une parfaite entrée estivale, fraîche, légère, désaltérante. On n’oublie pas la mousseline de grenouilles « Paul Haeberlin », créée par le père de Marc dans les années 1960 et qui demeure une incroyable prouesse technique où le croquant des grenouilles est « enfermé » dans un appareil à quenelle, avec une chair de sandre, plus une crème au riesling citronnée et relevée de ciboulette : à pleurer de bonheur. On vous dit tout très vite. Sachez que la maison demeure au sommet de son registre, en dépit des oukazes du Michelin qui sait mettre superbement à côté de la plaque.

Braise et Sylvain Courivaud arrivent à Paris

Sylvain Courivaud © DR

Ce sera, en septembre, la neuve table du groupe Eclore, un lieu dédié à la braise par son big boss Stéphane Manigold. Aux commandes des fourneaux, le jeune Sylvain Courivaud, qu’on a vu, quatre ans durant, chez Substance, en tant que sous-chef de Matthias Marc et qui doit trouver aujourd’hui ses nouvelles marques. Sous sa houlette, viandes, poissons et légumes seront cuits au feu de bois. Caille cuite au barbecue, laitue à la braise, rouget en portefeuille à l’anguille fumée, chocolat et émulsion de fromage de brebis fumé figurent notamment au programme. Retenez l’adresse : 19 rue d’Anjou. Sur la même artère, mais de l’autre côté du trottoir, le groupe Eclore possède le restaurant Contraste.

L’avènement de Thomas Eblin à Ribeauvillé

Thomas Eblin © GP

Dédiée au peintre Auguste Cammissar, dont une oeuvre (un beau paysage des abords de Ribeauvillé et ses châteaux dans la verdure) orne la salle, le Cammissar est la toute neuve table gourmande et raffinée de la cité des Ménétriers. Elle est signée du jeune Thomas Eblin, 23 ans, ancien de l’Abbaye de la Pommeraie à Sélestat, du Maximilien à Zellenberg, chez son cousin Jean-Michel Eblin, et, durant trois ans, de l’Auberge de l’Ill, dans l’équipe de Marc Haeberlin. Le cadre est raffiné, bâti avec l’aide de son père MOF menuisier, avec ses belles fenêtres, ses boiseries, son plafond à poutres, ses tables bien mises, sa terrasse d’été. L’extérieur – celui d’une demeure aristocratique à colombages, aux murs rouges – ne manque pas d’allure. Le service traine un peu, même si l’unique serveur fait ce qu’il peut pour faire plaisir à tous. Et côté mets, on se régale de choses fines et bonnes, relativement régionales, mais pas seulement. Le pain d’épice avec sa crème au raifort, comme le tartare de gambas pomme granny-smith avec sa tuile au parmesan font de plaisants amuse-bouche, le foie gras de canard en terrine mi cuit avec son chutney d’abricot de saison et l’effiloché de truite gravlax parfumé aux agrumes avec son sorbet petit pois constituent de séduisants hors d’oeuvre comme des entrées en matière. On vous en reparle vite.

Gilles Epié ouvre l’Avant-Garde à Washington

Gilles Epié © DR

Il était le petit prince nantais de Paris, formé jadis en Anjou chez les Augereau aux Rosiers-sur-Loire puis chez Michel Kéréver près de Rennes, où sa route croisera celle d’Alain Passard. Est passé à Paris chez Jean-Pierre Coffe à la Ciboulette, chef au Pavillon des Princes de François Clerc et Manon Letourneur en lisière de Boulogne dans le 16ème à Paris, puis suit Passard à Bruxelles, dans le groupe de Jean Mailian – Passard sera au Carlton, lui au Café de Paris à Bruxelles, avant de revenir à Paris, au Café Saint-Honoré, gagnant une étoile au Miravile quai de l’hôtel de Ville. Puis il part aux USA, dix ans durant, sera le chef des stars à Los Angeles, y rencontre la belle Elisabeth Nottolin avec laquelle il créera le Citrus Etoile à Paris, revenu depuis à Jean-Edern Hurstel. Régalera les passagers de Roissy chez « Frenchy’s ». Sa toute nouvelle aventure démarre fin septembre à Washington. La peinture sèche à peine. Le lieu, qui ne sera ouvert que le soir, fermera dimanche et lundi – rare aux Etats Unis, mais « c’est le moment, dit-il, où il faut songer à la qualité de vie« . Gilles Epié y proposera une cuisine franco-française avec des produits made in USA, une carte réduite (6 entrées, 8 plats, 6 desserts), mais précise, ludique et saisonnière. Avec la soupe façon bouillabaisse de poisson de roche avec macaroni et rouille, le homard du Maine aux épinards et oignons, les poireaux façon mimosa à la dijonnaise, les grenouilles à la coque, le bar au foie gras et artichauts camus, la cervelle d’agneau aux cèpes et girolles et la daube de boeuf aux olives noires, avec le baba au rhum flambé à l’orange et le « mokafeuille » sauce grain de café. Les coordonnées : L’Avant-Garde, 2915 M street NW, Washington DC 20007. Tét: (202) 652-1855 www.lavantgardedc.com

Les succès franco-français d’Alain Caron à Amsterdam

Alain Caron © DR

Il est le chef français qui a réussi à créer son petit empire de bouche à Amsterdam. Avec ses deux fils, David et Tom, qui ont développé ses affaires gourmandes, plus des collaborateurs de talent comme le jeune Thomas Demuth, qui a notamment oeuvré à Paris au George V avec Eric Briffard et Christian Le Squer, Alain Caron est devenu « le » chef français d’Amsterdam. Cafés, brasseries, bistrots, tous gourmands, le Cafe Caron (Frans Halsstraat 28h), le Petit Caron  (Gerard Douplein 10), comme un bistrot de famille, le Grand Caron (Westerasterrein), façon loft contemporain, enfin le Gouden Reael by Caron (Zanthoek 14), où il démarra jadis, non loin de la gare centrale, dans une demeure armstellodamoise de charme face aux quais, sont les quatre pièces du puzzle de son empire gourmand. Il sait y mixer les produits français et avec ceux des Pays Bas, donne une touche bistrot à des recettes de vérité, comme la fleur de courgette farcie de merlu aux moules marinière et le flétan mariés aux cocos de Paimpol avec sa vierge de légumes plus sa sauce Choron. Sublimer le goût sans jamais virer au chichi : tel est le credo de ce chef voyageur, qui fut musicien et batteur de jazz dans une vie antérieure, mixe ses activités de restaurateurs et celles de journaliste télé à l’écoute des autres, faisant connaître la cuisine française aux hollandais, copinant avec les chefs d’ici et de là-bas, toujours avec humour et une décontraction très séductrice. Ce bourlingueur est un charmeur.

Olivier Nasti fait son pain à Kaysersberg

Olivier Nasti chez Levain © Ilya Kagan

Il n’en est pas à son coup d’essai. Avait jadis créé « Koog – un singulier pâtissier », roi du kougelhopf à Kaysersberg, gérant également, côté Four, rue des Marchands à Colmar, une boulangerie artisanale dans l’ancienne maison Helmstetter avec l’entrepreneur Marc Rinaldi. Mais c’était avec son frère Emmanuel, devenu depuis négociant en vins à Mulhouse. MOF deux étoiles, appelé à un brillant avenir, Olivier Nasti a revu sa copie à zéro, notamment avec les conseils du boulanger de Digne-les-Bains, Luc Roux. Il a ouvert, la semaine passée, « Levain », rue du Tir à Kaysersberg, juste derrière son hôtel-restaurant affilié aux Relais & Châteaux. Il y propose un pain maison d’exception, au levain naturel et de longue conservation, issu de khorasan, des viennoiseries splendides et un kougelhopf comme on l’aime en Alsace, avec des amandes effilées et des raisins  trempés au marc de gewurz, le tout dans un décor boisé très charmeur.

 

A propos de cet article

Publié le 22 août 2022 par

Les chuchotis du lundi : Marc Haeberlin et les siens, Braise et Sylvain Courivaud arrivent à Paris, l’avènement de Thomas Eblin à Ribeauvillé, Gilles Epié ouvre l’avant-garde à Washington, les succès franco-français d’Alain Caron à Amsterdam, Olivier Nasti fait son pain à Kaysersberg” : 3 avis

  • Arnaud T.

    Finalement, que des bonnes nouvelles dans le blog! Je vais commencer par prévoir un petit tour à Washington 🙂 … Can’t wait to see the Epiés…

  • Margaret
    merci beaucoup de ta gentillesse
    i can’t wait to have you in DC , we are still under construction . the opening hopefully will be end of September.
    more information will be coming on my instagram page @chefgillesepie
    merci a Gilles pour tout ce qu’il fait depuis tant d’années pour l’ensemble de la profession ……….
    bises a vous tous all over the world

  • Merci d’être toujours en avance avec les news des chefs, restos, tout chose culinaire, gastro, délicieuse. J’ai les superbes souvenirs d’ Epié quand il était a Paris et aux USA. Un chef exceptionnel avec tellement de talent, passion, amour. Good luck to him and la belle Elizabeth à Washington. Gilles Epié for President?

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