Blois : l’irrésistible ascension de Christophe Hay
Ca y est ! Il est chez lui, en grand, en technicolor et en majuscules, avec son cadre « à fleur de Loire », son vaste labo moderne devant laquelle déjeuner ou dîner est un privilège. Dire que Christophe Hay a réussi son transfert de Montlivault à Blois est un euphémisme. Il s’épanouit, avec son équipe nombreuse, ses forts en thème en cuisine, ses jeunes gens enthousiastes et énergiques en salle, bref une équipe de vainqueurs qui savent que l’objectif est clair : récupérer la 2e étoile de la Maison d’A Côté et grimper encore d’un cran.
La 3e étoile ? Elle pointe à l’horizon. Seuls jadis, Charles Barrier avait réussi à la conquérir à Tours, notamment avec sa fameuse terrine aux trois poissons de Loire. Christophe, lui, entonne le grand chant ligérien avec allant, mettant le caviar de Sologne, les viandes d’ici, le mulet, le brochet et les autres produits de la pêche locale, plus les légumes d’ici en vedette et en scène. Il y a du grand opéra dans ses menus qui racontent entre 4, 6 ou 9 séquences les idées du moment, de la saison et du Val de Loire en majesté.
Les amuse-bouche sont ici des poèmes : feuilles de consoude gaufrée, gel aux agrumes, gardons de Loire à la moutarde d’Orléans, gavotte croustillante de sarrasin accompagnée d’un crémeux de gouda de Touraine, sans omettre le fin travail autour du pois chiche de Beauce fumé ou encore la tartelette de tarama de brochet de Loire (superbe !) avec son voile de pomelo. On boit là-dessus le joli et frais vouvray « le Compte Marc » 2018 de Julien Vedel, qui met le palais net et les papilles en éveil.
Ensuite ? Le caviar osciètre de Sologne avec l’esturgeon cuit au bouillon, les haricots verts au sureau, l’anguille grillée aux petits pois, tablier de sapeur (hommage néo-lyonnais au maître Paul Bocuse chez qui Christophe apprit les belles manières), le mulet de Loire, avec concombre, vinaigre de coucou, arêtes croustillantes, la tomate du jardin concentrée comme une tarte, avec son eau de tomate à la feuille de poivre du Sichuan. Splendide!
Il y a ces hommages au fleuve roi et roi des fleuves, avec le barbeau flanqué de navet « sweet bell », pousses de colza, graines en condiments, la très culottée crêpe soufflée au brochet, flambée au Cointreau (de Saint-Sylvain d’Anjou!), au quinoa croustillant, laitue celtuce et capucine et, ce grand plat classique revisité, créé jadis pour le maréchal de Saxe au temps de Louis XV, qu’est la carpe à la Chambord, avec truffe aestivum, écrevisse, sauce au vin rouge de Cheverny et lard. Somptueux dans le genre rustico/raffiné!
On y ajoute le bœuf wagyu de l’élevage de Christophe, flanqué d’une pomme soufflée farcie à l’oignon rouge de Florence et d’une pomme nouvelle à l’effilochée de boeuf. et sa fine crème au wasabi, dite « wasabine « , sur lequel le chinon « les Roches » – produit hors appellation, en « vin de France » ! – produit par l’artiste Jérôme Lenoir en 2010. Plus cet exercice sur le fromage travaillé qu’est le chèvre de Bréviande, mêlant mousse légère, copeaux, poire tapée, fleurs et herbes sauvages.
On achève sur un festival de douceurs malicieuses et légères du pâtissier Maxime Maniez : sorbet citron et thym, pâtisson confit et crème vanille, chocolat pure origine Pérou, tuile Oabika, fraises de mai, agastache cristallisée, soufflé aux framboises, pomelos de la serre maison et poivre Timut du jardin, mais aussi rhubarbe Valentine en croûte de sucre, miel et coriandre ou enfin fraises de monsieur Mercier confites, crème fermière, huile de colza torréfié. Bref, du bon, du grand, de l’aérien, qui vous laisse, in fine, le palais net et l’esprit vif.
D’ailleurs, tous ces jeunes gens filiformes qui gravitent autour de vous trahissent sans mal l’esprit de ce qui se trame ici, magique, créatif, mais sans outrance ni nulle lourdeur !
Christophe Hay à Fleur de Loire
Quai Villebois Mareuil
41000 Blois
Tél. : 02 30 32 14 37
Fermeture hebdo. : dim., lundi.
Menu : 98, 145 (vins c.) 158, 218, 225 (vins c.), 325 (vins c.) €.
Site : fleurdeloire.com