Les chuchotis du lundi : Laurent Petit fête ses 30 ans au Clos des Sens, Evian : Roussin part, Dussart arrive, Vincent Favre-Félix l’éternel retour, Lyon-Ecully : du rififi chez Bocuse, Jean-Michel Cazes dit tout, Alexandre Semperé aux Ombres, Martin Simolka bouleverse le roof-top du Molitor

Article du 11 juillet 2022

Laurent Petit fête ses 30 ans au Clos des Sens

Laurent Petit © GP

Le 8 novembre prochain, Laurent Petit fêtera ses 30 ans de présence au Clos des Sens d’Annecy-le-Vieux. Il rachetait alors, avec son épouse Martine, l’antique maison Salino, reprise un temps par un élève de Guy Savoy, Didier Roque. Depuis, on connait l’histoire. Natif de Haute-Marne, devenu depuis le plus militant des grands chefs de Savoie, Laurent a gagné les trois étoiles en imposant sa vision de la cuisine savoyarde, lacustre et végétale.  Son repas d’anniversaire comme un hommage à toutes les étapes de sa démarche. « Avec mes anciens élèves qui font briller la gastronomie savoyarde par leurs étoiles – dans l’ordre de leur présence (tous plusieurs années ) : Alain Perrillat-Mercerot chez Atmosphères du Bourget du lac, Florian Favario à l’Auberge de Montmin au col de la Forclaz, Yoann Conte à la Maison Bleue à Veyrier-du-lac et Stéphane Dattrino à l’Esquisse à Annecy, nous composerons un repas à dix mains, note-t-il, exprimant une, voire plutôt cinq pensées culinaro-savoyardes. Le 8 novembre, cela fait trente ans que l’on arrivait, avec Martine, avec notre valise en carton pleine d’envies » !

Evian : Roussin part, Dussart arrive

Laurent Roussin © GP

Après sept ans de bons et loyaux services au Royal Evian, dont il a développé le resort, avec le voisin Hermitage, et le proche la Verniaz des Verdier, qui fut Relais & Châteaux jadis et a été racheté par Danone et son domaine hôtelier, Laurent Roussin s’en va vers d’autres horizons. Il lancera l’an prochain le nouveau Royal Mansour de Casablanca, qui a pour mission d’acquérir le prestige de son grand frère de Marrakech, où officie Jean-Claude Messant, qui fut le prédécesseur de Laurent au Royal de Deauville. Laurent Roussin est remplacé par une pointure de l’hostellerie de luxe, François Dussart, qui a fait une bonne partie de sa carrière en Suisse, notamment au Beau Rivage Palace à Lausanne pour la fondation Sandoz, chez Michel Reybier Hospitality et à l’Ecole hôtelière de Lausanne. Une carte de visite pleine de sérieux qui en dit long sur le nouvel impétrant, qui n’aura qu’à traverser le lac pour découvrir son nouveau territoire.

François Dussart © DR

Vincent Favre-Félix l’éternel retour

Vincent Favre-Félix © GP

Vincent Favre-Félix fut 3e ligne de rugby à Oloron Sainte-Marie dans une vie antérieure, arpète aussi chez Marc Veyrat qui nous le fit connaître jadis au col de la Forclaz. C’était à l’Auberge de la Pricaz où cet Annécyien pur jus pratiquait une sublime tête de veau roulée et panée avec adresse et envie. Le voilà désormais, après un passage remarqué à Veyrier, à l’Auberge du Lac, en chef étoilé conquérant et fin dans un lieu moderne qui fut jadis une fonderie de cloches Paccard. Le lieu et l’environnement avec son parc orné d’oeuvre d’art ? La fondation Christian Réal, avec ses belles sculptures disséminées au jardin, près d’une abbaye qui fut jadis un hôtel de grand confort. Son cadre est moderne, avec ses grandes baies vitrées sur le dehors, ses meubles high tech, sa cuisine visible, ses tables espacées, son service policé. Et les mets fusent et rusent sur le mode savoyard rajeuni. La maison a vite gagné une étoile avec ses menus qui offrent des balades en Savoie en plusieurs temps, à 96 et 149 €. Mais Vincent Favre-Félix ne s’arrête pas là, car il vient de créer un bistrot dans les toutes neuves Galeries Lafayette annécyennes. Un 3e ligne qui a du coffre!

Lyon-Ecully : du rififi chez Bocuse

A l’institut Bocuse d’Ecully © GP

Révélé par notre consoeur Léna Lutaud du Figaro, le conflit opposant Jérôme Bocuse à l’Institut d’Ecully, qui porte le nom de son père, déchire le tout-Lyon et devrait se régler à l’issue d’un procès en 2023. «Cela m’attriste car, à la fin, personne ne sera gagnant mais ils ne m’ont pas laissé le choix, je suis dans la conciliation plus qu’autre chose, explique Jérôme Bocuse. Les valeurs prônées par mon père sont trahies. Personne ne nous volera son nom. Toute sa vie, il m’a répété à quel point il en était fier. Avec les autres entités à Lyon qui portent le nom de mon père, comme Les Halles Paul Bocuse et les Bocuse d’or, tout va très bien. Les Halles ne me versent pas un centime et aucun commerçant n’aurait l’idée d’étiqueter des saucissons au nom de Bocuse.» De son côté, Dominique Giraudier le directeur de l’Institut Paul Bocuse d’Ecully, affirme que Jérôme Bocuse lui demande désormais une redevance, pour porter le nom de son père, que l’Institut ne peut acquitter, alors que Paul Bocuse avait autorisé l’école à utiliser son nom gratuitement jusqu’en 2037 . «Nous sommes fiers de porter le nom de Bocuse. S’il faut l’enlever, ce sera à contrecœur», commente Dominique Giraudier.

Jean-Michel Cazes dit tout

Ne vous fiez pas au titre, sans nul doute choisi par l’éditeur et qui semble carrément à côté de la plaque : Jean-Michel ici parle d’abord de Cazes et réciproquement. Dans ce fort volume de mémoires, paru aux éditions Glénat, Jean-Michel Cazes fait le bilan d’une vie. Cet ancien ingénieur IBM à Paris, qui rejoindra l’agence d’assurance familiale à Pauillac, reprenant en main le domaine de vins maison (Lynch-Bages, mais aussi Haut-Bages Averous devenu Echo de Bages et les Ormes de Pez), le développant, du Médoc à Châteauneuf du Pape, s’intéressant à la gastronomie (le Chapon Fin, avec sa soeur Sylvie), l’hôtellerie (Cordeillan-Bages), faisant connaître Thierry Marx, alors à ses débuts médiatiques, travaillant en parallèle avec Axa (de Pichon-Baron à Suduiraut, de Quinta Da Noval dans le Douro à Disznókő en Tokaji), ce travailleur infatigable part à la conquête de l’Ouest (l’Amérique du Sud et du Nord, New-York en large et en travers), de l’Est (la Chine, principalement), sans omettre de porter haut la bonne parole de Bordeaux et du Médoc un peu partout. Il vante à l’envi et longuement la Commanderie du Bontemps, club d’honnêtes gens, désireux de faire connaître ses vins au monde entier en se démultipliant. Tançant en parallèle l’immobilisme du Syndicat des Grand Crus classés du Médoc et du classement de 1855, qui ne changera qu’en 1973 pour attribuer la primauté à Mouton. Et c’est tout. Jean-Michel se révèle à la fois mémorialiste doué d’humour et polémiste brillant avec mesure. Il prend le temps de tirer son chapeau à Robert Parker qui a lancé quelques pierres dans le classement et impose sa vision d’un Bordelais moderne, ariégeois d’origine, cosmopolite de coeur, défendant son terroir avec une générosité et une fougue hors pair. A 87 ans sonnés, ce conquérant passionné n’a jamais paru aussi jeune.

Alexandre Semperé aux Ombres

Alexandre Semperé et le service aux Ombres © GP

Il a travaillé avec Romain Meder au Plaza Athénée, après Christian Constant au Violon d’Ingres et chez Ladurée. Alexandre Semperé oeuvre désormais aux Ombres, sous le sceau d’Alain Ducasse et de Musiam-Paris, livrant une prestation d’une grande finesse dans un lieu d’exception. La terrasse est magique, la vue sur la Tour Eiffel garantie grand format, les tables sont bien dressées, l’accueil policé et la cuisine suit, sur un mode classique chic et un menu du midi à 48 € qui constitue une grandissime affaire. Tout ce qui est servi là – notamment le registre marin et végétal – vaut largement le type d’éloges dévolue habituellement aux tables étoilées.

Martin Simolka bouleverse le roof-top du Molitor

Martin Simolka sur le rooftop du Molitor © GP

A 36 ans, il est devenu, en prenant en main les cuisines de l’hôtel Molitor, une des étoiles montantes du groupe Accor. Martin Simolka, natif de l’ex-Allemagne de l’Est, aux environs de Leipzig, a laissé tomber les études de sciences économiques pour la cuisine. Formé à l’Adlon à Berlin, avant Alain Ducasse à Paris au Plaza, puis au Shangri-La avec Philippe Labbé et le Peninsula avec Christophe Raoult, ce technicien zélé aux airs de bon élève parfait sait tout faire. Il le prouve en bouleversant le « roof-top » de l’hôtel Molitor, devenu, sous sa palette, un petit table de la cuisine de partage. Tataki de thon sauce sashimi, poulpe de Galice à la plancha, vitello tonnato au condiment anchois/yuzu et exceptionnel espadon de Méditerranée au moelleux imparable avec son souskay à la mangue et courgette violon font partie de ses plats stars. La vue sur tout-Paris est en prime.

 

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Publié le 11 juillet 2022 par

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