North Abraxas
« Tel Aviv : les délices d’Abraxas »
Abraxas ? Une des premières maisons d’Eyal Shani, roi de la streetfood israélienne chez Miznon et Romano, qui a essaimé de Tel Aviv à Paris, de Melbourne à New-York, de Singapour à Vienne, en passant par Cannes. Et dont vous connaissez au moins Port Saïd, Ha’Salon et, bien sûr, le premier Miznon. Mais il cumule encore Malka et Dafna, Teder et Mirage, Dirty et Dvora. Découvrir North Abraxas, sur Lielenblum, en lisière du boulevard Rothschild, c’est comme accomplir un retour aux sources du style Shani. Du végétal, bien trempé, du marin, bien équilibré, des viandes, bien senties, le tout en portion juste, avec des cuissons exactes, qui mettent le produit en vedette et donnent envie de tout partager.
Des exemples ? Les filets d’aubergines légèrement fumés, cuits au naturel, les bébés courgettes avec fin sel en cristaux et huile d’olive dans un bouillon goûtu, un pain au levain maison à fondre, servi avec oignons, crème fraîche et condiment tomate, un carpaccio de betteraves au raifort en neige ou encore les épinards arabes cuits dans leur jus, sans omettre un sashimi de sériole dans sa justesse, sa précision, sa vérité.
Il y a, bien sûr, car tout dépend ici du marché, les plats vedettes, comme le fameux chou fleur caramélisé, qui a fait la réputation de Miznon et qui se trouve ce soir aux abonnés absents. Mais il y a aussi le carpaccio de poivrons à la ricotta « en rupture », mais qui fait jolie figure sur la table à côté. On ajoute que la salle du premier a du chic et de la gaité, même si le rez-de-chaussée au comptoir et en terrasse est très prisé, que le service féminin est efficace autant que charmant.
On y ajoute que l’ombrine dans son plat, cuite au beurre et vin blanc, flambée devant vous à l’arak, fait un grand moment où le poisson, ferme, servi dans sa darne, est d’une précision de goût parfaite. Mais les instants carnassiers, comme la shawarma d’agneau, au poivron vert, sauge et huile d’olive ou le kebab d’agneau dit « souvenir des allées Jérusalem », où est né Eyal Shani ne sont pas mal.
Côté vins, on boit local et régional – et raisonnable, en évitant au passage les grands bourgognes aux tarifs meurtriers – avec l’épatant Tsora des collines de Jérusalem, avec quatre cépages (cabernet sauvignon, syrah, merlot, petit verdot), avec une note boisées et de jolis parfums de fruits rouges, dans sa prime jeunesse en 2020, et qu’on monte d’un cran avec le déjà légendaire « Garage de Papa » pure syrah, d’Ido Lewinsohn, en 2018, propre à faire la nique nos côtes rôties et dont l’étiquette est un clin d’oeil (très) appuyé à la « Grange à Papa » du grand Stéphane Montez.
In fine, on ne fait pas l’impasse sur les desserts, et, après un « shot » d’arak israélien, on se régale avec le malabi aux pistaches et la tarte au miel. Lehaïm, bete havon et vive Eyal Shani, Janus protéiforme de la cuisine israélienne nouvelle vague !