Villa Pinewood
« Payrin-Augmontel : les tours de magie de Thomas Cabrol »
Dans le Tarn, côté Sud, entre Causse et Montagne Noire, dans un environnement de pins, une villa et son cuisinier artiste, pur autodidacte, qui fut élu meilleur bar à vin du monde trois fois à Toulouse : c’est Thomas Cabrol, qui a ouvert la Villa Pinewood. Il y a là trois chambres contemporaines, une piscine, puis la table ouverte cinq soirs par semaine, seulement, du mardi au samedi, avec ses douze couverts au comptoir, face à la cuisine ouverte et à un écran plat pédagogique, qui décrit, vante et raconte tout ce qu’on mange.
Anne, l’épouse de Thomas, le relaye au service des vins. Chaque assiette est peaufinée, bichonnée, comme une sorte de moment ludique et artiste. Les produits sont d’exception, les goûts sont nets, les cuissons parfaites. Le menu est unique. Le choix de vins varie. Les petits accompagnements frôlent aussi la perfection comme ce pain confectionné ici même avec un levain rafraîchi chaque semaine avec un verre d’Yquem, ce tartinable aux chénopodes, ce beurre à la berce spondyle, cette crème fermière à la vanille boréale aux fleurs de mélilot.
Tout se passe ici comme si un petit neveu de Michel Bras ou de Marc Veyrat était passé de la salle à la cuisine et jouait en one man chaud pour tous. De la magie? C’est bien ce que l’on déniche dans le genévrier avec ses baies fraîches du causse, cylindre concombre, œufs d’omble, sa carotte sauvage dans sa tartelette translucide, sa truffe et ail noir, mariant truffe du Causse, ail rose bio de Lautrec devenu noir, le poireau et réglisse sauvage, sauce au polypode commun ou encore l’exceptionnelle asperge croquante à la chlorophylle des bois, lierre terrestre, aspirine sauvage, menthe et ail des ours.
Il y a encore le tapis végétal aux 24 saveurs, avec bouillon d’ombellifères, écume d’alliaire, crustacé, l’infusion iodée avec mauve et framboises aux racines d’apiacées en guise de « trou tarnais », l’omble de la Montagne Noire, occis en ikejimé et confit à l’huile de feuille de caprifiguier – une merveille de précision, de finesse et de goût – , les ravioli au foie gras et menthe des cerfs, comme le tendre pigeon du mont-royal flambé au flambadou, contisé, cuit sur coffre, terminé au lard de cochon laineux.
On boit là-dessus le champagne de Sousa, le riesling Hirtzberger de la Wachau en Autriche à fleur de Danube, le magnifique chassagne-montrachet de Fontaine-Gagnard beurré et noisette, comme le séducteur chardonnay Greywacke de Nouvelle Zélande ou encore la syrah toscane de Cortona de Stefano Amerighi, sans omettre le maury du domaine des terres de Fagayra qui cadre joliment avec les beaux desserts.
Ainsi l’épicéa et lait glacé, avec reine des prés et crème d’ulmaire, pimprenelle et hesperides, avec mousse à la pimprenelle anisée et cœur d’agrumes ou « Pic de Nore », hommage à la montagne proche avec une ganache au sapin baumier aux notes de fruits rouges, dôme au whisky Black Mountain, une poussière d’or aux morilles.
On achève sur les jolies mignardises : cynorhodons du Causse et rocher noisette et chocolat, en félicitant l’artiste pour ce dîner-spectacle d’une réussite totale et légère, comme d’une beauté sans faille. Il y a un magicien à Payrin, en lisière de la Montagne Noire !