Le Relais Princesse Maria Leczinska

Momoko et Akira Okamoto © GP

Je vous ai parlé de René Fieger et d’Umami. Depuis quatre ans, la maison où il exerça, dans le joli village de pèlerinage de  Marienthal, au coeur de la forêt d’Haguenau a été reprise par un couple d’Alsaciens peu ordinaires. Momoko et Akira Okamoto,  travaillaient auparavant à Philipsbourg (Moselle, pays de Bitche), au château de Falkenstein, elle en salle et en pâtisserie, lui en cuisine.  formés à l’école Tsuji à Tokyo, voulaient faire un stage à l’Arnsbourg. Mais le trois étoiles de Baerenthal ne recrutait plus de stagiaires.

Pastilla et girolles © GP

Il s’étaient ainsi retrouvés à Philipsbourg, en Moselle, au château de Fleckenstein, quatre durant. Depuis 2007, les voilà dans ce relais qui s’honora d’avoir eu jadis la visite de l’épouse de Louis XV. Le lieu est cosy, discret, à deux pas de jolies demeures campagnardes ornées de portails en fer forgé façon Sissi. Bref, voilà un village où l’on cultive volontiers le baroque, où le chaleur est d’abord dans le décor. Il y a un beau poêle vert  en faïence, des  tomettes au sol, des poutres blanches au plafond. Insolites : les bannières japonaises au mur qui indiquent d’improbables légendes de samouraï. Et contrastent avec le plus traditionnel vitrail. Tout l’esprit de la demeure est dans ces raccourcis.

Nougat de foie gras © GP

Avec, en prime, la cuisine de l’Est revue par l’Est extrême. Ce que reflète les idées d’Akira. Ainsi l’exquis nougat de foie gras de canard mariné à la fleur de bière avec ses incrustations de figue, la raviole de langoustine avec son bouillon de queue de bœuf aux algues Wakamé à la coréenne, sa fricassée d’escargots au cerfeuil. Et puis encore le petit pâté chaud de lapin avec sa sauce banyuls, son coulis de figue (qui réclame une cuisson de 30 mn) et qui fait un exercice classique de haute volée.

Ravioles de langoustines au escargots © GP

On oublie au passage les petits amuse-gueule du moment : gaspacho et gougère à la bourguignonne, pastilla de veau au curry plus tajine de girolles. Et puis les plats malicieux que constituent le « kabayaki » de filet de bar en croûte d’herbes et de sésame, cuit relativement peu, avec son jus corsé au pinot noir, son risotto aux crustacés. Enfin le filet de canette rôtie au miel de fleurs avec sa fine sauce au vinaigre de framboise – et ses framboises fraîches ! -, sa mijotée de lentilles aux pieds de cochon, sa mousseline de pomme de terre : fin, vif, frais. Bref, de l’esprit nippon distillé avec rigueur, appliqué aux produits d’Alsace avec des clins d’œil d’ailleurs.

Pâté chaud de lapin © GP

En dessert, la mousse noix de coco avec coulis de mangue et framboise, avec  le croustillant noix de coco, plus le sorbet fruit de la passion font une belle issue exotique. Mais le melon et groseilles pochés à la verveine menthe avec mousse mascarpone au Grand Marnier et sa glace vanille sont pareillement ciselés. Avec cela, le muscat signé Martin Schaetzel à Ammerschwihr et le pinot gris le Cormier du maestro Etienne Loew de Westhoffen coulent comme de l’eau de source.

Bar en croûte d’herbes © GP

On sort de là léger comme une plume, même après une dégustation ample et suffisante. Et on est tout disposé à brûler un cierge à la grande église voisine pour sanctifier l’avenir des exquis Momoka et Akira Okamoto, pèlerins nippons de bonne volonté, comme missionnés pour la bonne cause gourmande en terre de Nord Alsace.

Mousse coco, coulis de framboise