NEO et le fantôme du cinéma

Article du 26 mars 2022

Vous adorez le cinéma, son histoire, sa légende, ses stars e ses ombres, mais vous ignorez tout de Max Toppard ? Ce dernier fut pourtant son gourou, son homme mystère, son chercheur de lumière, travailla pour Charles Pathé qui l’envoya à Hollywood, où il  fut figurant de D.W. Griffith pour « Naissance d’une nation« , avant d’assister Charlie Chaplin et de lui suggérer le personnage de Charlot, survécut, après son retour en France, à la Grande Guerre et aux tranchées, rédigea, avec ses compagnons de combat et de misères, l’Al-Cinéma, livre maudit mais visionnaire, publié par Bernard Grasset, qui avoua n’y rien comprendre, mais en pressentit le génie, fut le comparse de bamboche de Michel Simon, aida Jean Vigo à achever l’Atalante, poussa Jean Renoir à choisir Pierre Fresnay pour affronter Eric Von Stroheim dans « la Grande Illusion« , en lieu et place de Louis Jouvet, fréquenta Orson Welles et Marcel Carné. Mais on ne va pas tout vous raconter. D’autant que sa vie comme son nom (Maurice Taupard élevé dans un phare du Finistère devenu Max Toppard) demeure un mystère, que tente d’élucider une jeune journaliste des Etudes Cinématographiques très et même trop curieuse. Nicolas d’Estienne d’Orves, alias Néo, que nos lecteurs connaissent bien, ressuscite ici le mythe du « Fantôme de l’Opéra », imaginé par Gaston Leroux, plaçant ses pas sur les traces du roman populaire du XIXe siècle. Sauf que son livre traverse une bonne partie du XXe, que l’opéra est remplacé par un étrange cinéma nommé le Belphégor, situé rue Pirouette, dans l’ancien quartier des Halles, où s’offrent de non moins étranges projections du jeudi soir, où se déroulent parfois d’insolites bacchanales. Y rôdent des personnages que l’on croit connaître, cet architecte, émule du Corbusier, qui rêve d’éradiquer Paris, ce pape du nouveau roman, qui s’oppose, lors d’une homérique « Radioscopie » de Jacques Chancel, à cet as du roman populaire, sans omettre ce candidat à la présidentielle de 1965 nommé François Morland – qui fut, comme nul ne l’ignore, le nom de code de Mitterrand dans le Résistance. Plus des collaborationnistes spécialistes du cinéma français, chers à Néo, qui les a déjà évoqués dans les Fidélités Successives et la Gloire des Maudits, comme Lucien Rebatet ou Maurice Bardèche. Voilà, riche, foisonnant, trépidant, superbement documenté, un vaste roman piège qui se lit avec délectation.

Ce que l’on sait de Max Toppard de Nicolas d’Estienne d’Orves (Albin Michel, 506 p., 21,90 €.)

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Publié le 26 mars 2022 par

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