Sources

Nicolas le Tirrand et Camille Irasque-Morvan © GP

On l’a connu à Paris, chez Lasserre, trop brièvement. Nicolas le Tirrand a préféré revenir à ses sources morbihannaises, et ouvrir, en compagnie de son frère Mathieu qui fait la salle, une table moderne, claire, contemporaine, face à l’un des quais de sa ville natale. Et c’est un événénement. Tout ce que touche cet enchanteur, qui a travaillé chez les grands (Yannick Alléno dont il fit le chef chez Ledoyen, Eric Briffard au George V, Christophe Moret au Plaza-Athénée, Jean-Marie Amat à Bordeaux ), est de très haut niveau.

Amuse-bouche © GP

Les goûts vifs, marqués, volontiers acides et vinaigrés, les alliances de produits nets, les fermentations et extractions comme il le fit chez le maestro du genre, Alléno, à Paris, mis au service d’une Bretagne conquérante: voilà sa marque. On sait, on sent bien que la maison aura une étoile en mars prochain. On glissera que tout ce qu’on a goûté chez lui dans un cadre clair, moderne et gai, est déjà au niveau des deux sans nulle hésitation.

Châtaigne de mer © GP

Les jolis amuse-bouche, comme le croustillant de livèche à l’andouille de Gueméné, les anchois séchés en beignets, les algues croquantes font de jolis préludes. La bouleversante « châtaigne de mer » (autrement dit l’oursin) mariée superbement au traditionnel lait ribot, qui en adoucit le fort côté iodé, sans l’amoindrir, un petit chef d’oeuvre marin, un brin terrien, jamais goûté ailleurs.

Crème de riz fermentée, butternut au gel de sapin © GP

On embraye sur la très digeste crème de riz fermentée au butternut au gel et vinaigre de sapin, les splendides noix de Saint Jacques de la baie de Quiberon, magnifiées par leur cuisson au barbecue, avec topinambours et jus d’oseille, dont l’acidité résonne avec justesse, les aiguillettes de bar au chou rave et parfum d’aneth d’une justesse de ton sans faille, avant le juteux pigeon à la braise, avec son salsifis iodé et son jus tranché.

Aiguillettes de bar, chou rave, aneth © GP

Assez pour comprendre que quelque chose de grand se trame là. On aime encore les jolis desserts de la pâtissière autodidacte et surdouée Camille Irasque-Morvan, ex graphiste reconvertie en maîtresse des douceurs, passé à Thoiry dans l’Ain chez Sébastien Brocard ou au Meltin’Choc à Evian, dont la glace au lait de Kerbastard avec son caramel au beurre salé ou encore son coing au sauternes et sa crème glacée à la baie de genièvre sont des pépites à peine sucrée.

Pigeon à la braise, salsifis iodé et jus tranché © GP

On louera encore les tuiles de sarrasin caramélisées très bretonnes bretonnantes nouvelle vague et on vantera sans mal les jolis flacons proposés par Mathieu le Tirrand avec sagacité, comme le montlouis la Taille aux Loups de Jacky Blot et le savigny-les-beaune de Nicolas Rossignol à Volnay. Gloire aux Le Tirrand !

Glace au lait de Kerbastard et caramel au beurre salé © GP