Piero aux Airelles
« Courchevel : la folie Garfagnini »
C’était Piero par Pierre Gagnaire. C’est désormais Piero tout court avec une carte signée Marco Garfagnini. On connaît la manière du grand Marco depuis le Four Seasons Bergues à Genève, où il obtint une étoile avec Il Lago, en passant par le George du George V, où il imprima sa marque et son style, ses « crudo » et ses raviolis divins, ses idées créatives, sans omettre la tradition transalpine transgressée par ce natif de Carrare qui a voyagé, au domaine de Noirieux, à Dubaï, dans le groupe Jumeira, à Saint-Tropez, désormais, où il conçoit l’été les cartes des tables du groupe « Lov Collection-Airelles », comme la chic pizzeria Zetta, le Dolceva du Pan Dei Palais et la table méditerranéenne de la Messardière.
Aux Airelles de Courchevel, dans cette magnifique réplique du Posthotel de Lech, dans le massif de l’Arlberg, jadis créé par Raymonde Fenestraz, repris et enjolivé, depuis 2007, par Stéphane Courbit, on retrouve, sans surprise la folie Garfagni, ses hors d’oeuvres exquis, ses mises en bouches de grand style, ses pâtes maison à fondre, servis avec componction par l’adorable « Monsieur Roger », alias Roger Boccia, trente ans de maison, que l’on connut jadis l’été à la Pinède tropézienne au temps des Delion, et qui apporte sa classe naturelle, à ce lieu théâtral, digne d’une opérette de Franz Lehar, façon Auberge du Cheval Blanc.
La nouveauté, aussi : la venue du sommelier Benoît Bouquin, intarissable sur les vins de Savoie, d’Alsace, de Bourgogne, d’Italie et d’ailleurs, qui vante, explique, détaille cépages, cuvées, flacons et millésimes avec la foi d’un avocat de cour d’assises soucieux de défendre la tête de son client. Avec l’impétueux Garfagnini, Bouquin, troublant sosie de Jean Dujardin forme un duo passionnant, étonnant.
On se régale là de craquantes pizza aux truffes, divins crudos de saumon, sériole et bar, joliment épicés et même relevés de piment, de tacos de saumon sur le même mode, de tartare de thon sur sa galette de riz craquante, de carpaccio de bœuf parsemé de truffe et parmesan, de rigatoni façon Cacio & Pepe, avec pecorino et poivre, de divins tortelini à la pintade et truffe.
On n’oublie pas, au passage, le tronçon de sole poêlée à la vinaigrette au citron ni la fringante milanaise relevée de sauce jalapeno. Et applaudit les bouteilles du maestro Bouquin : comme la « cuvée royale » de la Colombiere 2018 de Rossillon à Brison-Saint-Innocent en Savoie, le joli chianti classico 2016 de la Fattoria le Fonti, gorgé de soleil, le séducteur fixin 2016 vieilles vignes d’Humbert frères au fruité sans faille.
Côté dessert, on raffole sans mal, du tiramisu aérien et glacé et du pandoro façon panetonne en pain perdu avec glace fior di latte aux cerises amarena, tout en faisant un sort au gewurztraminer 2018 cuvée Laurence domaine Weinbach de Cathy Faller à Kayserberg avant de céder au plaisir du café en ristretto et du génépi les Airelles qui vous remet le palais net et l’esprit d’aplomb. Vive l’Italie conquérante du signor Garfagnini!