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Les chuchotis du lundi : le Fooding a changé de boussole, la Mère Germaine à Paris, Séverine Pétilaire-Bellet en Bourgogne, hommage à Claude Lebey, le comptoir marin de Christophe Hiérax, adieu à Michel Rochedy, Sarah Cicolini la nouvelle star romaine

Article du 22 novembre 2021

Le Fooding a changé de boussole

Plus campagnard qu’urbain, plus provincial que parisien, plus cher aussi (15€ contre 9,90€), plus court aussi (avec seulement des nouveautés imprimées en gros, les adresses anciennes, sont, elles, à  lire sur internet) : le nouveau guide Fooding de l’ère Michelin est arrivé. Tournant délibérément le dos à l’héritage laissé par Alexandre Cammas et son associée Marine Bidaud, le nouveau Fooding est allé chercher ses nouveaux lauréats entre la Manche et les Alpes-Maritimes, avec des clins d’oeil à Marseille (le bar à vins Livingstone), Bordeaux (le bar à cocktail Baston), Barritz et Lyon (pour le Sillon de Mathieu Rostaing-Tayard) ou encore Perpignan ((la pizzeria Baston), mais surtout à Servon (l’Auberge Sauvage), Valdeblore (Auberge de la Roche, dans l’arrière-pays niçois, sacrée à la fois meilleure table et meilleure chambre), Savigny-les-Beaune (le Soleil), la Couarde-sur-Mer sur l’île de Ré (Méthod). Ce nouveau Fooding tonique et décalé qui laisse la portion congrue à Paris (un glacier nommé Folderol, une cave dite Rerenga Wines) détonne et déboussole. Commerces de bouche et caves de soif y sont mis en avant. Et les inconnus, qui seront les stars underground d’après-demain, se bousculent au portillon. Bref, cette nouvelle édition, concoctée sous la houlette de la belge imprévisible Elisabeth Debourse, ne manque pas de fraîcheur.

La Mère Germaine à Paris

Antoine Petrus et Isabelle Strasser © Arbes

153 boulevard Saint-Germain : c’est la nouvelle adresse de la Mère Germaine qui monte de Châteauneuf-du-Pape près d’Avignon à Paris la grand ville. Isabelle Strasser et son ambassadeur, le double MOF – sommelier et de salle-, Antoine Pétrus, ancien directeur de Lasserre, du Clarence et du Taillevent,  ouvrent une cave de luxe où l’on trouvera mille références dont les vins de leurs domaines (le Prieuré des Papes à Châteauneuf,  la Pousterle en Luberon, domaine de Coyeux à Beaumes-de-Venise), de toute la France et pas seulement de Provence et de la vallée du Rhône, selon une sélection orchestrée par le savant Antoine, qui a glissé là, entre les casiers, son ouvrage dédié aux bons vins et au métier de vigneron. Une première adresse qui devrait être suivie de bien d’autres.

Séverine Pétilaire-Bellet en Bourgogne

Séverine Pétilaire-Bellet à Levernois © GP

Sacrée carrure et grand charisme, elle était « mademoiselle » à Courchevel (avec Raymonde Fenestraz qu’elle appelait « madame ») et à Val d’Isère (où elle créa un hôtel à ce nom dans l’ancien Brussel’s). Séverine Pétilaire-Bellet, native de Dijon, est revenue à ses sources bourguignonnes en rachetant l’Hostellerie de Levernois à Beaune et le château de Sainte-Sabine à Pouilly-en-Auxois à Jean-Luc Bottigliero dont elle fut directrice du F&B au Martinez à Cannes. Cette grande dame de l’Hostellerie, au propre comme au figuré, qui fut championne dans une vie antérieure et fit la liaison entre les Fenestraz et Stéphane Courbit aux Airelles dont elle dirigea le groupe, va développer son nouveau domaine, avec une « cabane sur le toit » et sept chambres neuves à Levernois, plus un spa à Sainte-Sabine. Dans les deux cas, le chef étoilé Philippe Augé et une équipe de salle au taquet continuent de mener la danse gourmande avec brio.

Hommage à Claude Lebey

Il était, nous le disions ici-même le jour de son décès, en janvier 2017, un des derniers seigneurs de la table. Homme de goût et de caractère, éditeur de talent, si riche de belles idées (on lui doit notamment la grande collection des chefs de la nouvelle cuisine chez Robert Laffont, de Guérard à Chapel, de Maximin à Girardet, de Peyrot à Gagnaire), auteur et fondateur du guide qui porte son nom, il était aussi le promoteur d’associations gourmandes et bienveillantes, comme le club des croqueurs de chocolats, celui des amateurs de Havane et, bien sûr, l’association de la sauvegarde de l’oeuf mayonnaise. C’est d’ailleurs grâce à cette dernière (l’ASOM) que ses disciples lui rendent hommage dans un fort beau livre co-signé par Vincent Brenot – son petit-fils, Pierre-Yves Chupin, Sébastien Mayol et Gwilherm de Cerval, préfacé par François-Régis Gaudry, illustré par Thomas Dhellemes, pour les photos, et Clément Déranlot, pour les croquis, enrichis de 49 recettes signées de chefs plus ou moins célèbres, de Juan Arbelaez à Alcidia Vulpiau, de Yannick Alléno à Antoine Westermann, sans omettre Thomas Brachet, Guillaume Dunos, Alain Ducasse ou Laurent Petit. On regrette juste que Jean-François Piège, spécialiste du genre chez Mimosa à Paris, ne fasse pas partie de la troupe. Il en aurait été le fier 50e. Outre les belles recettes, créatives et alléchantes, on trouvera d’heureux conseils vineux, plus tout un tas de bons trucs sur l’art de confectionner une mayonnaise ou de conserver les oeufs. Le morceau de bravoure du livre? Le bel hommage rendu à notre vieil ami Claude, fondateur et instigateur de l’ASOM, qui fut ce résistant combatif et pugnace, amoureux infatigable des bons bistros, apologue très raisonné de la tête de veau et du bon café, homme d’influence, qui a su essaimer les bons disciples qui continuent dans sa voie. Salut à toi Claude! Et sache qu’on ne t’oublie pas …

Le comptoir marin de Christophe Hiérax

Chez Christophe © GP

Il est le poissonnier des stars de la cuisine. Alain Ducasse, Eric Frechon, Alain Passard, Pascal Barbot ou Christian Le Squer fréquentent sa poissonnerie de la rue de la Pompe ou ses étals du marché de Passy. Christophe Hiérax vient d’ouvrir, sous la halle du marché de Passy, son comptoir de bouche. Relayé par sa femme et son fils au service, il propose ses poissons du jour (bar de ligne, saint-pierre, daurade royale, rouget de rose) poêlé, planché et en sushi, à toute heure. Et c’est le nouveau rendez-vous marin chic du 16e parisien.

Adieu à Michel Rochedy

Michel Rochedy © Maurice Rougemont

Pour son épitaphe, on avait envisagé de mettre simplement « Michel Rochedy, homme de coeur ». Ce natif de Saint Agrève, devenu le premier grand chef doublement étoilé de Courchevel (avec ses voisins immédiats de l’autre côté de la rue Jean et Jean-Pierre Jacob au Bateau Ivre, aujourd’hui disparu), aura la gloire à son Chabichou durant un demi-siècle. Ardéchois coeur fidèle à la Savoie, il aura même présidé l’Office de Tourisme de sa commune d’adoption. Son grand livre et son beau titre  – « la Montagne Apprivoisée » (Glénat, 2007) – disent tout. Il n’y a pas plus civilisé que cet éternel jeune homme qui avait fêté en grandes pompes avec ses amis chefs ses 80 ans, dont plus 60 ans de cuisine. Son fidèle lieutenant et MOF Stéphane Buron, lorrain de Nancy, formé jadis au Grand Hôtel Bragard à Gérardmer, continue de promouvoir la »maison de Michel », propriété aujourd’hui du groupe Lavorel, qui s’est dédoublée, avec une brasserie et une boulangerie. Michel, qui avait toujours bon mot et un sourire pour chacun, était l’ami des artistes (il descendait les pistes, un tissu sous les fesses, avec son ami le peintre Ladislas Kijno, dont les toiles et les lithos figuraient au mur chez lui), organisait des repas homériques pour les amis stars de passage, était le plus convivial de ses confrères, avait toujours à coeur de me signaler « le petit jeune qui monte » dans les parages du village et se montrait toujours partant, avec mon copain Jean-Luc Petitrenaud, habitué de longue date, pour un « apéro à toute heure« . Il était la gentillesse incarnée, la bienveillance même, la tendresse faite homme. Une pensée affectueuse à Maryse ton bon ange et à tes deux fils, comme à Stéphane Buron, ton héritier spirituel qui continue ton oeuvre.

Sarah Cicolini la nouvelle star romaine

Sarah Cicolini © GP

Elle est la nouvelle star de la trattoria romaine. Native des Abruzzes,  étudiante en sciences sociales, puis en médecine, rêvant de devenir nutritionniste, elle se souvient des recettes de sa grand-mère, accomplit quelques stages chez de grands chefs. L’Italie, le terroir romain, quoique pas seulement : voilà ce qui la requiert, cette autodidacte passionnée, drôle, vive, tatouée, dans cette trattoria moderne et tendance dont elle a fait son nid. Le cadre a le chic contemporain, avec ses tables mixant marbre et bois. Sarah Cicolini, qui travaille avec deux aides, refait sa carte chaque jour, mais garde ses fondamentaux. Ses tripes à la romaine (avec tomates, menthe, céleri, carotte, oignons, pecorino) sont un miracle de finesse et de bon goût qui valent, à elles seules, le voyage jusqu’à son adresse excentrée. Qui se paye le luxe de ne pas indiquer d’enseigne. Retenez le nom et l’adresse : Santo Palato Piazza Tarquinia, 4 a/b, Rome, Italie. Tél. : +39 06 7720 7354

 

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Publié le 22 novembre 2021 par

Les chuchotis du lundi : le Fooding a changé de boussole, la Mère Germaine à Paris, Séverine Pétilaire-Bellet en Bourgogne, hommage à Claude Lebey, le comptoir marin de Christophe Hiérax, adieu à Michel Rochedy, Sarah Cicolini la nouvelle star romaine” : 1 avis

  • Hubert Couilloud

    Bonjour
    Juste un petit rectificatif :
    Le chateau de Sainte Sabine n’est pas à Semur en Auxois mais dans le village de Sainte Sabine.
    Amitiés à Gilles Pudlowski.
    Hubert Couilloud

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