A un détail près, de François Cérésa

Article du 22 août 2021

François Cérésa ? On le suit depuis quatre décennies, au moins depuis « le cimetière des grands enfants » (1983 – voilà qui ne nous rajeunit pas !), et on ne l’a jamais quitté, ni d’ailleurs laissé tomber. On l’a pisté dans toutes ses métamorphoses. Mémorialiste de lui même et de sa famille (« Moume », « Poupe »), gastronome militant, autour d’un exquis « petit roman de la gastronomie », livrant des chroniques gourmandes, acerbes et passionnées sous le nom de Jules Magret, as et prince de l’argot, disciple d’Alphonse Boudard et de Louis Nucéra, qui furent ses oncles spirituels, cultivant l’amitié comme un bel art, tissant ses souvenirs comme une tapisserie de Bayeux personnelle, rendant, dans tous ses livres, des hommages appuyés au cinéma en général et hollywoodien en particulier (et pas seulement dans son récent « La montre d’Errol Flynn »), il reste fidèle à lui-même, sans négliger aux grands auteurs plus ou moins anciens, de Balzac à Dumas, de Hugo à… Cécil Saint-Laurent. On retrouve toutes ses passions, tous ses tics, toutes ses références dans son petit dernier qui appartient à sa verve romantique.

Comme dans « l’une et l’autre » ou dans « la femme au cheveux rouges« , pour ne citer que ces deux là, le beau François, éternel passionné, perpétuel mécontent, volontiers grincheux, cherche la femme éternelle, qui se trouve quelque part entre Jane Fonda et Ava Gardner, Jean Seberg et Maureen O’Hara. Lui? C’est plutôt Clark Gable façon Rhett Butler qui aurait lu l’abbé Prévost. Son héros fréquente assidûment la BnF, accomplit des recherches sur Manon Lescaut, tombe amoureux d’une Manon… Duparc, avec laquelle il part en Italie, à Trouville, à Marseille, fréquente les bonnes tables, peste contre sa prostate, se shoote au Cialis, devient un amoureux jaloux et transi, comparant sans cesse la belle Manon à la non moins belle Victoire, son épouse défunte, dont tout la rapproche… à un détail près. On ne sait si les hommes préfèrent les blondes ou sortent avec les brunes. Mais François Cérésa, comme son héros, prouve qu’il a le coeur large. Il nous embarque avec brio dans une aventure amoureuse qui sait ménager ses effets, évoquant avec nuances les méandres du coeur, sillonnant des chemins de traverse épicés, bâtissant un vrai suspens, brouillant les pistes, pratiquant l’aphorisme léger avec aisance (exemple, ce joli : « la littérature est faite pour oublier la vie« ). Bref, cette quête amoureuse, drôle, vive, cursive, qui flirte avec le jeu de dupes, est une réjouissante réussite.

A un détail près de François Cérésa (Ecriture, 175 pages, 178 €).

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Publié le 22 août 2021 par

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