La définition du bonheur, de Catherine Cusset

Article du 15 août 2021

Mon Goncourt 2021? Catherine Cusset et son nouvel opus. On suit depuis ses débuts cette narratrice experte et surdouée qui sait jouer comme personne avec ses personnages, en narrant les tours et détours de leur vie, quitte à annoncer leur mort en liminaire (coup déjà fait avec « L’autre qu’on adorait »), use du procédé du manuscrit retrouvé (cf « Le problème avec Jane ») et inverse ses héroïnes au fil des chapitres du récit (procédé à succès de « Un brillant avenir »). Autant dire, que cette « Définition du bonheur » est le plus Cusset de ses livres, pour ne pas dire le plus culotté, le plus audacieux, le plus vibrant et peut-être le plus réussi de cette auteur si finaude.

De quoi s’agit-il? De deux destins parallèles, ceux de deux femmes qui racontent leurs années de jeunesse,  puis d’apprentissage, leurs amours, leurs voyages, leurs vies de famille en parallèle, traversent les dernières quarante années au pas de charge. Reste que « la » Cusset est bien là au centre de de tout. Et que ses deux personnages lui ressemblent, empruntent à ses origines, ses racines, ses étés bretons, sa vie new-yorkaise. L’une réside à Paris, l’autre à Manhattan. L’une est sage, l’autre non. L’une stable, avec un travail régulier et un mari écrivain, réside à Manhattan, ne néglige pas sa Bretagne. L’autre cherche le bonheur au loin, se marie avec un séducteur radin, paresseux et bourlingueur, se montre accro au sexe. L’autre est plus mesurée.

Mais on ne va pas tout vous raconter. On gardera le secret sur ce qui les lie, les unit, les assemble. Au deux tiers du livre, la trame change, la narratrice aussi. Le lecteur, lui, est happé. Il ne peut échapper à cette toile d’araignée, cette trame sensible et mouvante qui dit sinon tout du moins beaucoup sur le désir des femmes. Il y a là des pages magistrales, un drôle de viol dans un camp de vacances varois, un accouchement tragi-comique dans un taxi new-yorkais. Où l’on reconnaît la maîtrise naturelle de l’auteure de « Trois fois au bout du monde », la drôlerie sardonique de la diariste de « New York journal d’un cycle », l’ironie mordante de la chroniqueuse de « Haine de la Famille« , le formidable culot de l’autobiographe de « Jouir ».

Bref, si vous n’avez jamais lu Cusset, commencez par celui-ci, et commandez vite tous les autres. Et si vous n’en n’être pas à votre premier, soyez sûr que ce morceau de bravoure – comme un résumé de son oeuvre – ne vous décevra pas. Bonheur de lecture assuré!

La définition du bonheur de Catherine Cusset (Gallimard, 352 pages, 20 €).

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Publié le 15 août 2021 par

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