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La « lunch-box » d’Emilie de Turckheim

Article du 12 janvier 2021

Ne vous laissez pas « avoir » par le titre ni par la bande annonce inspirée d’un « diner » à Miami : cet ouvrage est grave, humain, profondément humain, comme tout ce qu’écrit Emilie Turckheim. On doit à cette dernière un journal consacré à son accueil en famille d’un réfugié afghan (« le Prince à la petite tasse »), mais aussi des ouvrages sur le sort réservés en Amérique aux Amérindiens (« Pop Corn Melody ») ou encore des récits inspirés de son expérience de visiteuse de prison (« les Pendus », « une Sainte »).

Voilà Emilie à Long Island, dans cette île chic de l’Etat de NY qu’elle connaît bien, où elle passa ses années de jeunesse. Elle y conte l’histoire très troublante, très dérangeante de l’exquise Sarah, prof’ de musique hors norme dans l’école de la petite ville imaginaire de Zion Eights (comprendre Mamaroneck, dans le comté de Westchester), qui, adorée de ses élèves, pour sa pédagogie active et singulière, va voir sa vie et celle de toute la petite ville bouleversée à la suite d’un accident dû à une boîte à déjeuner (une « lunch box ») malencontreusement tombée sous le mini-bus (le « van« ) qui assure le transport des élèves à l’école. Avec Emilie de Turckheim, on pénètre la vie de Zion Eights, de ses habitants aux origines variées, dont une famille française émigrée aux USA, des différents parents, de sa professeure chérie, qui enseigne le piano aux cours particuliers, aux petits comme aux grands. Après avoir démarré en trombe par la mort absurde d’un gardien de piscine fou de la tarte aux noix de pécan.

Emilie de Turckheim écrit avec rondeur et chaleur, en prenant son temps, s’attache à chacun de ses personnages avec la même sensualité compréhensive,  la même empathie bonhomme, la même douceur narquoise. C’est à la fois riche, sensible, prenant et, très vite, bouleversant, mariant drôlerie grinçante et sens du portrait aigu. Une réussite cinglante qu’on achève le coeur serré.

Lunch-box d’Emilie de Turckheim (Gallimard, 250 pages, 19,50€).

A propos de cet article

Publié le 12 janvier 2021 par

La « lunch-box » d’Emilie de Turckheim” : 1 avis

  • Eglé Salvy

    Les personnages existent, de chair et d’os, on a l’impression de les connaître depuis toujours. Le drame – le mot est faible – nous bouleverse : le désespoir de Solène qui « ressasse » indéfiniment le petit-déjeuner, la panique de la prof de piano, les mots maladroits/malheureux de condoléances des parents et amis, les paroles horribles de la teigne-en-chef Carolina. On referme « Lunch-Box », épuisé. Tout peut arriver à un enfant, ça n’arrive pas qu’aux autres.

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