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Kasbür

« Le Kasbur: un jardin dans la nuit »

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Article du 3 juillet 2010
Découpe du turbot en croûte de sel de crustacé

Découpe du turbot en croûte de sel de crustacé

C’est une demeure que je suis depuis ses débuts et qui prend ces temps-ci son envol. Hier soir, dans la chaleur de l’été, avec l’air apporté par les proches sommets vosgiens et la forêt attenante, la maison prenait un tour autre. Cela s’appelle le « Kasbür », autrement dit le paysan fromager, hommage au grand-père d’Yves Kieffer, le propriétaire des lieux qui officiait là jadis. Disons le d’entrée: l’enseigne et la grande fresque qui y fait référence sur les murs paraît un peu obsolète. Il y a désormais un jardin zen, des planches en teck, un mince cours d’eau, qui fait redécouvrir, sur un mode zen, paisible et rassurant, une salle à manger intime, en verrière et une terrasse, elle aussi boisée, avec vue sur le Haut-Barr.

Nous sommes à la porte de Saverne, près du carrefour de sa brasserie, en lisière du Kochersberg, à deux pas de Dettwiller, et du fameux magasin d’usine des chaussures Heschung. Voilà pour situer l’endroit. Yves et Béatrice, qui sont aux commandes, ont créé la demeure il y a plus d’une décennie. Depuis deux ans, Yves, formé chez Meneau à Vézelay et à la Tour d’Argent, figure sur la liste des « espoirs à l’étoile » du Michelin. Au Pudlo, il détient, bien sûr, une assiette. Et si sa manière fut parfois hésitante dans le passé, sur un mode rustico/raffiné, assurons qu’elle est devenue précise, avec ses gestes sûrs, son sens du beau produit magnifié, prenant, ses temps-ci, un tour plus rayonnant.

La terrasse du Kasbür

Il y a le velouté de petits pois (un bol de fraîcheur!) en amuse-gueule, puis la tomate garnie frite avec olives, anchois, féta, menthe, qui donne au lieu, avec un sablé au parmesan une glace au basilic, un tour méditerranéen inédit. Et, avec le sot l’y laisse de volaille marinée avec son céleri rémoulade, taillé en fine julienne, son jus de volaille qui joue sur le même thème de la fraîcheur, voilà deux entrées vives, sapides, séveuses.

Ensuite? On hésite entre le bel exercice de la fougasse de gambas de Madagascar avec jus de piperade, l’épais filet de cabillaud avec ses « shots » au parmesan, son risotto au céleri et citron. Avant de craquer sur le royal turbot en croûte de sel de crustacé (et de pain), avec son beurre rouge, sa tombée d’épinard frais. Ce plat à partager (pour deux) permet au service de s’en donner à coeur joie pour remettre son beau métier à l’honneur, avec une découpe au guéridon, précise, fine, juste, qui fait de l’effet en salle. Et l’on se rappelle alors qu’on goûta ce plat à l’identique ou presque chez Meneau à Vézelay, avec la fine chair blanche du turbot relevée de son « huile de crustacé », confectionnée avec les carcasses de homard concassé. Voilà un petit chef d’oeuvre d’architecture culinaire à l’ancienne mode, savamment remis au goût du jour et, pour ce qui nous occupe, répété avec verve et naturel.

Tomate garnie frite

Pendant le temps de la dégustation et de la découpe, le ciel s’est assombri sur la ligne bleue des Vosges. On a goûté le riesling Bruderthal de 2005 signé de Gérard Neumeyer à Molsheim, vif, iodé, altier, avec son joli nez de pétrole (on peut dire aussi fossile) qui, sur une cuisine végétale et marine, fait un contrepoint de grande classe.

J’épilogue sur le dessert, la douceur de fraises et rhubarbe pochée avec son jus de fraise, sa glace au fromage blanc et son arlette à la cannelle, qui fait une issue digeste et fraîche. Mais il y a encore les « souvenirs d’Alsace: le Picon bière », qui marie marmelade d’orange amère, glace au picon, mousse de bière, à goûter dans le verre comme un « café liégeois » nouveau style. En insistant sur le fait que les prix sont doux pour tant de bonheur, que les plats cités se déclinent au gré d’un menu carte à 42 €. Qu’il y a encore la formule du midi en semaine, imbattable à 19,80 €, que la traversée du jardin dans la nuit au retour est un bonheur. Et que, bref, si le Michelin, ne donne pas son étoile cette année au doux Yves, c’est simplement qu’il a perdu la boule.

Kasbür

8, rte de Dettwiller
67700 Monswiller
Tél. 03 88 02 14 20
Menus : 19, 80 (déj., sem.), 42, 54, 70 €
Site: www.restaurant-kasbur.fr

A propos de cet article

Publié le 3 juillet 2010 par

Kasbür” : 2 avis

  • ROUSSELOT LILIANE

    1ère étoile au MICHELIN??? Il reste quelques progrès à faire!!!
    Notre expérience du 4 juin 2010 au déjeuner 4 personnes:
    – Pendant l’apéritif, les petits pains qui nous sont destinés sont posés sur une table voisine. (on ne touche pas!)
    – Mise en bouche au concombre avec un petit « grissini ». On n’aime pas forcément. Rien d’autre pour remplacer.
    – Entrée: carotte au foie gras (supplément 4 euros): sur 3 assiettes, une n’était pas correctement dénervée.
    – Plat: Faux-filet en croûte de chorizo. Difficile d’y enfoncer la fourchette. Après une longue mastication on avale ou on repose sur l’assiette et on signale le problème et nous nous contentons de manger les 5 ou 6 « pommes gonflantes » (seule garniture) qui accompagnaient la viande. Après un long moment la serveuse repropose le même plat > non merci.
    – Fromage au lieu de dessert (on a encore faim): 10 euros.
    Au final, pas un mot d’excuse de la patrone qui est restée prudemment à l’écart en nous observant depuis le bar et bien sûr aucun geste commercial.
    A EVITER

  • Passion Alsace

    Eh oui, cher Gilles, le macaron Michelin, vous devriez l’avoir compris, après tant de repas dans des maisons distinguées, ne se gagne pas qu’avec le seul contenu de l’assiette mais davantage avec la manière de mettre en valeur la cuisine. Or à mon dernier repas à Kasbür j’ai vu une orchidée artificielle sur chaque table… Avez-vous pensé signaler ce détail qui tue ?

Et vous, qu'en avez-vous pensé ? Donnez-nous votre avis !

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