Tillinac en poésie
On le connaît essayiste (le Dictionnaire Amoureux du Général, l’Âme Française), romancier (le Bonheur à Souillac, Maisons de famille et bien d’autres). Mais Tillinac, le blueseman de Spleen en Corrèze est un poète qui ne s’ignore pas, pratique la stance avec des grâces verlainiennes, la désespérance et le culte du souvenir façon Apollinaire. Son pont favori ne se nomme pas Mirabeau. Mais c’est lui des regrets où coulent toutes les nostalgies, les « chimères éplorées » et « l’écume triste » du passé. Il chante l’île Saint-Louis et le Pont de Sully, les quais de Béthune et de Bourbon, en souvenant d’un « flipper », d’un « juke box » et des « premiers brames de Johnny ». Fargue moderne, déambulant dans Paris, il chante la tombe de Baudelaire à Montparnasse et s’évade à Monte-Carlo pour évoquer un héros de Zweig ou à Lisbonne pour emprunter les pas de Pessoa. Ce Tillinac-là, sans acrimonie mais non sans grâce, charme avec force le lecteur convié en complice.
Sur le pont des regrets de Denis Tillinac (le Dilettante, 12 €, 96 pages).