Royale Baie de Saint-Brieuc

Article du 25 mai 2011

La route longe l’océan, souligne les falaises escarpées, dérive vers le phare qui signale le bout du chemin. Landes de Fréhel, anse du Croc, plage de la Fosse s’alignent comme sur une carte imaginaire. Les oiseaux sont les rois du lieu : goéland marin ou argenté, fulmar boréal, pingouin torda, guillemot marmette, huîtrier pie, mouette tridactyle ou cormoran huppé. Ils sont plus de 700 couples à vivre en liberté, sur 400 ha d’une réserve protégée.

Les falaises de grès rose sont fichées en mer. De là, par temps clair, on devine Jersey ou Guernesey, Dinard et Saint Cast, le Cotentin et Bréhat. Le phare s’élève à 103 mètres au-dessus de mer et porte jusqu’à 110 km. Il est comme la proue du Cap face aux flots, une de ces pointes de la France, sauvage et à la fois sereine, dominant le paysage.

On peut lorgner ses grottes, creusées dans le roc, depuis la mer, en kayak, ou encore l’admirer de loin, depuis le Fort la Latte, superbe forteresse médiévale, restaurée à flanc de mer et qui se visite avec lenteur. Avec un peu d’imagination, on reconstitue la vie seigneuriale d’autrefois. Le donjon date de 1341. La pierre de grès rose a la majesté impétueuse, contrastant avec le bleu de la mer. On comprend que le château édifié à partir du XIIIe, assiégé par les Anglais en 1490 et les Ligueurs en 1597, rebâti sur les directives de Vauban en place-forte, ait servi de décor de film. Richard Fleischer y tourna « les Vikings » et Philippe de Broca « Chouans ».

C’est là terre de légende, lieu magique, battue par le vent. Son lieu de séjour le plus rêveur : Sables d’Or les Pins. Imaginez une réplique du Touquet ou de Deauville créée dans les années 20 et qu’on aurait oublié d’achever. Comme un décor de théâtre, avec ses manoirs anglo-normands en forme de villas/pensions, ses demeures dans les dunes et les pins, ses auberges construites, non pas directement sur la mer, mais, sur l’avenue qui y mène.

Cela se nomme Diane ou les Pins, Morgane ou les Ajoncs d’Or. On y organise au mois d’août des concours d’élégance et on y élit « Miss Charleston ». C’est aussi là qu’officie l’un des chefs les plus doués de Bretagne. Michel Hellio a racheté deux hôtels voisins, la Voile d’Or, années 60 revu contemporain façon bateau, avec son solarium et ses couloirs dotés d’hublots en forme de miroirs, et la Lagune, qui a conservé le cachet années 70.

Les gourmands du Cap Fréhel y posent leurs valises comme leurs rucksacks entre deux randonnées – elles se comptent ici par dizaines, soigneusement balisées -, mais aussi leurs cannes de golf, car le « dix huit trous » local est à deux pas. Ils viennent s’y faire fête à coup de d’encornets à l’aubergine confite, amande et gingembre ou tourteau crémeux de chou-fleur, mitonné par Maximin, le fils de la maison, qui a repris les fourneaux de la maison, après ses classes chez Haeberlin et Anton au Pré Catelan. Idéal pour se requinquer juste avant la balade au grand air.

Mais le Cap Fréhel et les Sables ne sont qu’une des étapes – la la plus sauvage ? – de la baie de Saint-Brieuc que le voyageur des Côtes d’Armor peut parcourir en liberté. Il y a Erquy et son cap, dont le site a été classé en 1978, fameux pour la pêche de la saint jacques (voir encadré), mais aussi le grès rouge qui lui donne sa couleur particulière. On peut vivre ici toute l’année, respirer l’air marin, manger dans l’une ou l’autre des bonnes tables, l’Escurial ou la Ferme Saint-Aubin, et profiter des plaisirs de la plage, sans négliger un œil intéressé à la criée, ni une flânerie au Cap d’Erquy.

Comme sur son voisin de Fréhel, les plantes ont su ruser avec le vent, s’adapter aux bruines et aux températures changeantes. La bruyère se décline en espèces multiples selon l’humidité du sol. Le coucou y voisine avec la primevère, le bel engoulevent qui entonne un chant éructant les nuits de printemps ou d’été. Pléneuf et sa station familiale du Val-André est à deux pas, avec son casino en forme de rotonde années 30, sa large digue de front de mer, sa belle plage. Fondée en 1880, la cité balnéaire a conservé son charme rétro. Les promenades longent la grève des vallées ou aboutissent à la pointe de la Guette.

Face à la pointe de Pléneuf, l’ilôt du Verdelet constitue une réserve ornithologique abritant mouettes, goélands, sternes ou cormorans. Le port du Dahouët, dont usèrent les envahisseurs Vikings, accueille chalutiers et plaisanciers sur l’estuaire de la Flora. A deux pas, c’est Hillion, puis l’arrivée à Saint-Brieuc après le détour par Port-Morvan, le plage de Granville, puis l’anse d’Yffiniac, qui indique que la capitale des Côtes d’Armor, qui cumule une série de quartiers divers, demeure comme la proue du pays face à la mer.

La ville se visite au pas du flâneur. S’aborde avec charme aux abords de la cathédrale Saint-Etienne dotée de deux puissantes tours. Le vieux Saint-Brieuc, c’est, aux abords de ce chef d’œuvre gothique, une série de rues piétonnes. Saint-Guéno, Saint-Gilles, Charbonnerie, Saint-Guillaume et, plus loin, Général Leclerc, les vitrines de mode succèdent aux échoppes gourmandes. On faut prendre le temps de regarder, de discuter, de comprendre. Le charme de Saint-Brieuc, vieille bretonne soumise au modernisme, ne se livre pas d’emblée.

Mais la vérité de la baie est aussi vers le Nord. On a quitté la côte du Penthièvre, au sud, pour aborder le Goëlo. Ce sont d’abord le Légué, et la tour de Plérin, puis Pordic et la chapelle du Vaudic, Binic et son port de plaisance, sa baie encadrée de falaises, sa rampe d’accès qui mène au chemin de douane, mais aussi son musée d’histoire locale et des traditions populaires. La « vraie Bretagne », celle des images populaires? Elle est ici.

On monte vers Etables-sur-Mer, ses plages des Godelins ou du Moulin, puis la chapelle Notre-Dame de l’Espérance qui livre un panorama splendide sur les îles. Puis, c’est Saint-Quay-Portrieux, son port en eau profonde, unique en Bretagne, son casino, son hôtel Kermoor, qui cumule façade néo-mauresque années 1880 qui appartint au comte de Calan et chambres années 1980.

La station balnéaire, qui a gardé quelques demeures Art déco, le chemin de la corniche, le parc de la Duchesse Anne évoquent un riche passé mondain. C’est aujourd’hui le golf de 18 trous qui attire les amateurs. Comme les chapelles semées à l’entour, la fontaine Saint-Quay, le moulin Saint-Michel qui semble défier le ciel de ses hautes ailes, puis l’île de la Comtesse et le quartier de Kertugal, comme le vieux port. Le phare, dessiné par Eiffel, veille sur la baie depuis 1852.

Au-delà, c’est Tréveneuc et son église paroissiale, Lantic et son centre sportif des Ajoncs d’Or, Trégomeur et le parc zoologique du Moulin de Richard. On y ajoutera cette perle préservée qu’est la plage de Bréhec, préservée, avec son mini-port, ses falaises, ses maisons sur sa rade, ses chemins piétonniers balisés. Plouha, la pointe de Moguer à 104 mètres d’altitude se visitent, comme chapelle de Kermaria-an-Iskuit, avec ses peintures de la danse macabre. Le trésor : le petit hameau bretonnant de Lanloup, avec son église du XVe, son calvaire, le cimetière avec la tombe du compositeur Guy Ropartz.

Ce dernier créa la musique de « Pêcheur d’Islande ». Paimpol, qui inspira Pierre Loti pour son roman, est là déjà, comme un terme du voyage. Les chalutiers ne s’en vont plus guère pêcher la morue à Terre-Neuve. Mais le port de plaisance a gardé son charme. Les belles et bonnes auberges se sont multipliées. La vieille ville, autour de la place du Martray, non loin du quai Morand, fait le coup du charme. De là, on s’en va visiter Ploubazlanec et son cimetière des disparus en mer, le petit port de Poz Even, cher à Loti, ou encore Loguivy-de-la-Mer où les bateaux pêcheurs de homard. De la pointe de l’Arcouest, on aborde à Bréhat, île fleurie, disciplinée et charmeuse. Mais c’est déjà un autre monde.

Se renseigner:

CDT des Côtes d’Armor, 7, rue Saint Benoît, BP 4620, 22046 Saint-Brieuc Cédex 2. Tél. 02 96 62 72 01. www.cotesdarmor.com

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Publié le 25 mai 2011 par

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