Domaine de Châteauvieux
« Genève/Satigny : au royaume de Philippe Chevrier »
Sept ans pile sans retourner chez Philippe Chevrier : pire qu’un crime, une faute ! Sa maison s’embellit, sa vieille ferme vigneronne se vêt de bois se mêlant aux pierres, jouant la modernité sans rupture avec la tradition. Vrai chef, suisse authentique, élève de Louis Outhier à la Napoule et de Frédy Girardet à Crissier, formé jadis au Chat Botté du Beau Rivage, il est, depuis trois décennies, le roi de son domaine champêtre, cumulant les maisons, bistrots, espaces, concepts, entre Genève et ses environs, mais peaufine, cxhez lui, sur les hauts de Satigny, sa manière d’artisan ciseleur.
Un repas chez lui, dans un cadre à la fois chaleureux, élégant et de grand confort, sous la houlette d’un service aux aguets? Forcément une belle expérience. Il y a les petits amuse bouche liant parmesan, betterave, raifort, les prémices avec le parfait de foie gras de canard avec sa crème de panais à la truffe noire, la royale de crevettes aux oeufs de poissons volants plus l’émulsion au pain brûlé et éclats d’amandes Avola.
Les choses sérieuses? Elles commencent avec la tarte fine de pommes de terres grenailles aux oignons confits, truffe noire et sa compote de persil simple, le pavé de cabillaud Skrei poêlé aux épices avec son étuvée de poireaux aux huîtres, son émulsion au champagne fumé ou encore l’oeuf de cane poché à la tétragone, ses coraux d’oursins de Galice et caviar osciètre. C’est à la fois iodé et terrien, vif et riche, généreux et frais.
Les morceaux de bravoure ? Ils arrivent avec les jambonnettes de grenouilles sautées avec leur fine mousseline de pommes de terre à la tomate séchée et à l’ail noir ou encore la somptueuse déclinaison de pigeon aux topinambours, foie gras, jus de truffe noire: un plat de ciseleur, livrant une chair juteuse, des accompagnements vifs et nacrés, un contraste de texture d’une franchise de goût bouleversante.
Là-dessus, le malicieux sommelier Florent Labonne proposent des escortes vives, suisses et séductrices, comme le sauvignon barriques genevois les Hutins à Dardagny, le rare et savant gamaret vinifié en fût de chêne et titrant 15,5° mais d’un équilibre sans pareil, signé Christian Guyot à Bernex ou encore le subtil et épicé cornalin valaisan de Gillioz au domaine de St Léonard.
On ne fait pas l’impasse sur le magnifique chariot de fromages helvétiques, ni, bien sûr, les desserts, comme le croustillant miel-cacao avec émulsion cigare, espuma chocolat fumé et marmelade d’orange plus glace au cognac ou encore les clémentines flambées au curaçao qui offrent l’occasion d’un grand service au guéridon et sur lequel l’exquise Tsenevi en amigne flétrie du Valais d’Alexandre Deletraz constitue un accompagnement exceptionnel. L’exception, c’est d’ailleurs le maître mot de Philippe Chevrier en son royaume.