L’Amante de l’Arsenal de Gabriel Matzneff
Du 14 août 2016 au 12 août 2018, l’auteur quasi mourant de la « Et la musique souvent s’est tue« , vit, aime, survit, se raconte, peste contre l’époque, commente l’actualité du jour, n’hésite pas à communier, dit sa foi en l’orthodoxie, commente la présidentielle, avoue voter Mélenchon (ce qui ne l’empêche pas de fréquenter ses amis d’extrême-droite), disserte de la politique italienne (de préférence, dans la langue de Dante), pleure la mort de Thierry Lévy, son avocat, son ami, donne une chronique ici, un conseil là, voyage de Naples à Rome, sans oublier Nice et Bordighera, suit ses propres leçons de diététique à la Byron revue par Cambuzat, alterne jeûne et gloutonnerie, note précieusement les jolies bouteilles vidées avec plaisir et ses mets fétiches, a ses habitudes chez Lipp, ne dédaigne pas le Récamier, commet au passage quelques menues bourdes orthographiques (moret-saint-denis au lieu de morey-saint-denis, soufflet au lieu de soufflé). Mais s’affirme comme un stylise brillant, souvent drôle, parfois poignant, lorsqu’il évoque sa solitude dans sa garçonnière bien froide l’hiver, les amis qui l’oublient. Mais il prouve qu’à 83 ans, il n’est pas mort, ni même moribond. Loin de là. Nul n’est plus vivant ce vieil amant octogénaire survivant à la maladie, enveloppé dans sa « pelisse Arnys », qui pèse moins de 65 kg, et connaît l’amour partagé avec une jolie Virginie de 30 ans, qui ressemble à Ornella Muti dans Senza parole de Dino Risi. Cette belle amante rencontrée à la bibliothèque de l’Arsenal, qui donne son titre au livre, lui confère aussi son sel et son piment, songe à entrer au carmel, à s’installer en Angleterre, au pays de Shakespeare, mais sans omettre de faire l’amour avec le double de Nil Kolytcheff. Gab la rafale, qui s’affale sur le boulevard, retrouve avec elle, une énième jeunesse. Et le lecteur aussi, qui le suit avec fidélité, depuis « Cette camisole de flammes », « L’archange aux pieds fourchus » ou encore « Nous n’irons plus au Luxembourg » (avouons qu’il a le génie des titres!) s’amuse, s’émeut, renâcle mais à peine, bref, retrouve goût à la vie et se montre apte au bonheur. Lisez Matzneff : son journal au jour le jour constite une formidable antidote contre l’ennui.
L’Amante de l’Arsenal de Gabriel Matzneff (Gallimard, 417 pages, 24 €).
« D’extrême-droite »… avec trait d’union ?
« une antidote » ??
Lecture « rapicolante » en effet, comme dirait GM… Dans les bourdes (ou coquilles) nichées au coeur du texte, on notera, lors d’un repas pris au Grand Véfour, un échange de l’auteur avec… Jacques Martin (sic pour Guy Martin). GP ne l’a pas relevée, celle-là !