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Auberge St Laurent

« Des auteurs à Sierentz (Haut-Rhin) »

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Article du 8 mai 2011

L’équipe du Dictionnaire Amoureux au St Laurent avec les Arbeit © GP

Les auteurs des Dictionnaires Amoureux, cette collection, qui fête cette année chez Plon son dixième anniversaire, forment une sorte de club secret. Ayant produit 50 titres , signés de fous de leurs sujets qui se rassemblent chaque fois comme pour une cérémonie secrète. Il peut y avoir Vitoux pour les Chats, Fernandez pour l’Italie et la Russie, Alain Rey pour les Dictionnaires (le 50e titre), Tillinac, pour la France et le Catholicisme, Malek Chebel pour l’Islam et les Mille et une Nuits, Antoine de Caunes pour le Rock, Gilles Lapouge pour le Brésil (lisez-le, c’est l’un des derniers, et seule l’introduction, un bonheur d’écriture musicale, indique qu’il s’agit d’un grand livre…). Plus votre serviteur… pour l’Alsace…

Vue de la fenêtre au St Laurent © GP

Et comme nous étions en Alsace, au festival du livre de St Louis, il fallait bien rassembler ce club secret dans une maison sûre, de celles qui rassurent par leur qualité, leur sagesse, leur régularité. Voici donc le Saint-Laurent, à l’extrême sud de la province, entre Mulhouse et Bâle. La demeure ne fait guère de tapage, elle s’amuse à jouer sa partition alerte, classique, certes, mais surtout juste de ton et sans faiblesse.  Il y a la belle façade du XVIIIe siècle, les salles intérieures cossues, la cour, le patio. Et puis les salons chaleureux, les chambres de charme, dix en tout, sur le thème des vieux métiers ou celle des aubergistes fondateurs, dans les tons bleutés, avec de la toile de Jouy, la vue sur l’arrière, les feuillages, et puis l’église au clocher bulbé… Bref, voilà une auberge de bon ton qui joue la carte postale aimable.

Alain Rey et son vacherin (veillé par Pascal Schweitzer) © GP

Aux commandes les Arbeit, depuis trois générations, assurent le relais de la qualité avec régularité et sa faiblesse. Si l’on voulait risquer un mauvais jeu de mot ici, on dirait que ça travaille plus que ça cause. Marco, qui conquit l’étoile à la demeure, a laissé la direction des fourneaux à son fiston Laurent, passé chez Haeberlin et chez Ducasse. Tandis que la belle Anne assure toujours la direction de salle et le service des vins avec prestance, qu’un service prompt veille au grain, que des menus alléchants (celui de midi à 28 € est une bénédiction) donnent envie de prendre pension à demeure.

Malek Chebel et Denis Tillinac © GP

Hier soir, ce fut comme une démonstration de classicisme allégé, remis au goût du jour, à la mode alsacienne, tout en finesse, avec ferveur, sûreté, justesse. Joliesse des produits frais de qualité et saisonnier, sérénité encore pour instiller le mouvement des choses avec des assaisonnements sans faiblesse et des assaisonnements pleins de justesse.  Ainsi, le foie gras de canard cuit au naturel et en terrine flanqué des fruits du berrawecka en gelée et sa confiture de choucroute. Ensuite, le si fin dos de sandre fondant à la vapeur de marjolaine avec ses légumes nouveaux (fenouil, petits pois exquis) et ses écrevisses. Enfin, le pigeonneau de nid du Duwehof avec son jus de cuisson (dit ici « vrai jus ») au vin corsé, ses asperges blanches de Village-Neuf, sa douce sucrine.

Foie gras de canard au confit de choucroute et aux fruits à beerawecka © GP

Il y avait là, je l’ai dit plus haut, les auteurs des Dictionnaires Amoureux, Gilles Lapouge, Alain Rey, Malek Chebel, Denis Tillinac. Et j’entends encore ce dernier (auteur d’un si joli « Dictionnaire Amoureux de la France ») réclamer le pigeonneau très cuit, se régaler de ce classicisme retrouvé – et sauvé – avec tant de malice, de ses produits si justes, de ses sauces si pures et si légères, lui chante davantage la Corrèze, le Limousin, le Périgord et l’Auvergne que les contrées de l’Est qu’il découvre chaque fois avec éblouissement.

Sandre fondant à la vapeur de marjolaine © GP

Toute la petite assemblée – j’oublie au passage l’actif Stéphane Billerey, des éditions Plon, plus Pascal Schweitzer de la Nuée Bleue venu là en invité naturel et régional de l’étape – mais qui ne connaissait pas la demeure – fondre de plaisir sur le « tout petit vacherin glacé » vanille, fraise, dressé au moment, avec son coulis de fruits rouges, sa crème vanillée. Le gourmand Alain Rey, vitrine du Robert et spécialiste encyclopédique des dictionnaires, s’en léchait les babines.

Pigeonneau du Duwehof aux asperges © GP

On ajoutera, pour faire bonne mesure, les vins de roi, tous alsaciens, qui accompagnaient ces agapes de classe : gewurztraminer les Archenets de Josmeyer 2000, plantureux, joli nez de litchi, mais sec, le splendide riesling Geisberg 2002 de Kientzler à Ribeauvillé, pétrolé, presque iodé, au nez plein avec une splendide longueur, enfin ce pinot noir Burlenberg 2003 de Jean-Michel Deiss à Bergheim, avec ses notes profondes et sauvages, très gibier, poil de lièvre et sous-bois, digne d’une côtes de Nuits.

Petit Vacherin glacé vanile fraise © GP

Enfin, pour ne rien oublier, un crémant de Patrick Schaller à Mittelwhir, rappelant que ce haut-rhinois bon teint fut formé jadis à l’école champenoise d’Avize. Bref, un repas de classe, tenu de bout en boit avec maestria et faisant, simplement, bellement, honneur à l’Alsace dans ses grandes largeurs.

La chambre des aubergistes © GP

Auberge St Laurent

1, rue de la Fontaine
68150 Sierentz
Tél. 03 89 81 52 81
Chambres : 80-100 €
Menus : 28 (déj.), 36, 55, 62, 75, 85 €
Carte : 75-95 €
Fermeture hebdo. : Lundi, mardi
Site: www.auberge-saintlaurent.fr

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Publié le 8 mai 2011 par

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