La Scène par Stéphanie Le Quellec
« Paris 8e : Stéphanie Le Quellec entre en Scène »
Elle démarre en fanfare dans sa nouvelle Scène. Quelques mois après avoir quitté le Prince de Galles, où elle venait de gagner la 2e étoile, Stéphanie Le Quellec remet le couvert avenue Matignon. En lieu et place d’une ancienne galerie d’art, qui fut un restaurant dans une vie antérieure, elle a créé un lieu à part, avec son comptoir, son coin brasserie qui sert des plats au gré du marché et où l’on peut prendre café et croissant le matin, plus, bien sûr, la grande table en sous-sol avec sa verrière, qui laisse passer la lumière du jour, sa trentaine de couverts face à une cuisine ouverte, dans un cadre très contemporain signé des designers à la mode Toro et Liautard, dont il est question ici.
Le lieu a du chic, donne le sentiment déjeuner ou de dîner vraiment face à la scène, comme au théâtre et le service qui découpe ainsi la fameuse tarte de foie gras au porto – en amuse-gueule- se déploie avec malice. On retrouve avec plaisir les grands classiques de Stéphanie, comme ces splendides grenouilles dorées avec leurs « mollets » en blanquette ou les si jolis rougets « cuits de peur », qu’on avait adoré dans son ancienne Scène du Prince de Galles – dans une version neuve. Stéphanie qui elle fut révélation de l’année au Pudlo 2014 et la lauréate de Top Chef 2011 montre bien qu’elle a tout d’une grande.
Des exemples de sa (riche) manière, solide, vive, savoureuse, généreuse : la joie composition encore estivale des dernières tomates, avec groseille, framboise et sorbet aux herbes, le jaune d’œuf (un oeuf issu d’une basse-cour d’ile de Franc) servi tiède acidulé, avec ses cèpes en éventail comme une tarte, relevé de miso blanc ou encore le bouleversant couplet sur le thème du pain perdu avec son soufflé de pommes de terre Pompadour au caviar Osciètre: un plat beau et bon à la fois, d’apparence simple, mais si subtil et, à franchement parler, à tomber par terre.
On ajoute la langoustine pochée avec vinaigrette à la vanille de Tahiti, son blanc manger de pinces et oseille, le fameux rouget cité plus haut, proposé avec ses sucs de bouillabaisse, les taglioni aux cèpes (les cèpes utilisés pour la confection des pâtes!) et jus de persil, qui figuraient au menu de midi le jour de mon passage. Et enfin le ris de veau laqué d’une harissa avec son chou fleur rôti, son quinoa. Là-dessus, le malicieux sommelier Cédric Maupoint vous propose, au verre, les coups de coeur du moment.
La finesse iodée du riesling cuvée Albert d’Albert Mann, les fines notes boisées du savigny-les-beaune de Decelle et Villa, le condrieu les Chaillères de l’Enfer de Vernay et Amsellem, le pinot noir en Clos de la Faille du domaine Mann des Barthelmé, enfin le châteauneuf du pape du Vieux Télégraphe aux notes de venaison si amples. On n’omettra pas de louanger les beaux desserts du jeune pâtissier Pierre Chirac (natif de Corrèze, ça ne s’invente pas!), comme cette crème brûlée à la vanille intense, flanquée de sa glace vanille ou encore le chocolat criollo du Venezuela avec ganache onctueuse et son huile d’olive maturée.
A déguster sans se lasser! Mais les petits fours (biscuit sablé breton, calissons) et le pré-dessert (sorbet citron huile d’olive si rafraichissant) sont au paroxysme du charme. Bref, voilà une grande table qui s’annonce. Rendez-vous très vite au 32 avenue Matignon!