Si Ducasse rédigeait un blog, il ferait fureur dans la nouveauté comme dans le classique sûr. S’il était un touriste américain ou japonais, il serait le plus savant des néophytes, le plus rigoureux des béotiens, le plus ardent des découvreurs, goûtant avec autant d’exigence un croissant, un sandwich, qu’un repas raffiné. S’il était journaliste… Mais sans nul doute est-ce son rêve secret. Et ce livre-ci, édité par lui, indique bien qu’il sait jouer, avec la complicité de Frédérik Grasser-Hermé, les rédacteurs en chef de talent pour montrer les mille et une facettes d’un Paris que lui, le Landais devenu monégasque, « gobe-trotter »,  arpentant les capitales du monde, de Tokyo (où il anime Beige, entre autres) à New York (où il est chez lui à l’enseigne d’Adour), connaît par coeur. Et qu’il n’est jamais aussi à l’aise qu’entre le marché de Passy, près de son domicile parisien, et le onzième des bobos. Là où on ne l’attend pas.

Voilà donc son Paris: chic et populaire, non sans sophistication, luxueux et simple comme bonjour, aristo et canaille, monumental et bucolique, bref ducassien en diable, à la manière du Relais-Plaza, comme des Lyonnais, de Rech et de Benoît, traversant les modes du temps, du Chateaubriand, où il flirte avec Inaki Aizpitarte à une improbable guinguette des Buttes Chaumont (Rosa Bonheur). Bref, drôle, sympa, artiste, savoureuse, la capitale vue par le grand Alain donne envie d’être croquée par tous les bouts. AD nous partager son amour des caboulots, des traiteurs asiates, des nourritures terriennes ou ethniques. Entre les quartiers populaires et les Champs-Elysées, Ducasse se met à l’aise, dévoilant un formidable appétit. Quelle santé !

J’aime Paris, d’Alain Ducasse, avec Frédérik Grasser-Hermé (éd. A. Ducasse, 596 pages, 35 €).