Au Rendez-Vous des Pêcheurs

Christophe Cosme au bar © Maurice Rougemont

Un bistrot ? Mais comme en rêve partout en France, au pied ou presque de ce château où Henri III fit assassiner son rival, le géant du Duc de Guise (« Il est encore plus grand mort que vivant », se serait-il exclamé devant son – immense  – cadavre). Ce fut jadis une épicerie qui faisait également bar que fréquentaient les pêcheurs et mariniers de la Loire.

Celle-ci coule à deux pas. C’est elle, le fleuve roi, qui déverse, mais pas toujours, les brochets, anguilles, sandre, mais pas le saumon encore interdit de pêche, pour cause de protection de l’espèce, dans les jolies assiettes. Le bistrotier d’aujourd’hui est un vrai cuisinier. C’est Christophe Cosme, normand de l’Aigle dans l’Orne, passé jadis au domaine de Valaudran à St Bris en Sologne, après ses classes chez Christian Willer au Martinez de  Cannes et  Bernard Loiseau à Saulieu.

La façade © Maurice Rougemont

Comme ce dernier, Christophe, en technicien sage, sait que « la star, aujourd’hui, c’est le produit », pas le cuisinier, qui se cache derrière avec habileté, redonnant, selon le mot de Maurice-Edmond Saillant dit Curnonsky, l’angevin, « aux choses le goût de ce qu’elles sont ». Des témoignages de ce que vous goûterez ici, dans un cadre de bistrot d’un autre temps, sur lequel les mode ne passe pas ? Des choses bonnes et douces.

Mosaïque de plats © Maurice Rougemont

Ainsi, l’escalope de foie gras frais de canard poêlée avec son ravioli  de poire et betterave au vin rouge avec son sorbet sangria, le velouté de lentilles vertes du Puy avec les poissons marinés, la mousseline de saumon, façon quenelle, avec sa grecque de chou fleur aux moules, enfin le sandre qui pourra être farci en papillote (comme le brochet), cuit vapeur, pourvu d’une cassolette de gnocchis de pommes de terre et de champignons boutons. On y ajoute des desserts légers comme une plume, telle la mousse aux pommes avec glace vanille et coulis de caramel, ananas Vicoria avec mangue cuits dans un jus aromatisé  à la coriandre puis poché et frappé au citron avec sorbet passion ou encore la crème brûlée à la vanille et sorbet chocolat.

Christophe au boulot © Maurice Rougemont

La carte des vins fait la part aux reuilly, quincy, sancerre, menetou-salon, cour-cheverny, touraine ou montlouis qui escortent, naturellement, les fins plats marins ciselés par maître Cosme. Et si la table est fine, le geste sûr, les mariage savant, les saveurs nettes, précises et claires, l’esprit bistrot demeure. Dans la chaleur de l’accueil, la simplicité du lieu. Bref, ce rendez-vous des pêcheurs n’est pas seulement un QG de gourmand de haute volée, mais une table d’amis, propices à des agapes douces, sereines, paisibles. Comme la Loire qui coule à deux pas, en contrebas.

La serrure de l'entrée © Maurice Rougemont