1

Les chuchotis du lundi : Mauro super star, le lobbying pro-français d’Hélène Pietrini, Veyrat dégomme le Michelin, Gagnaire rempile au Fouquet’s, Boscus le retour, Justin Schmitt au Laurent, le Relais de la Poste change de mains, Petrone triple la mise

Article du 1 juillet 2019

Mauro Colagreco super star

Mauro Colagreco et François Hollande © GP

C’est son année! Le chef du Mirazur à Menton, qui exporte son talent dans monde entier, est devenu le n°1 mondial grâce au world50best. On peut penser que ce classement – 120 tables classées, et non 50, choisies par un obscur jury de 1040 votants, dont on se doute bien qu’ils n’ont pu tester les tables en compétiton, dans l’année en cours, et même dans la décennie écoulée – est une vaste fumisterie, orchestrée, certes, avec allant et un sens commercial qui laisse pantois. Mais on ne peut, vu de France et de Paris, si longtemps boutés hors du classement, que se réjouir de voir le 1er enfin sacré côté hexagone, avec, dans le haut de la liste des noms comme Alain Passard (8e), Bertrand Grébaut (pour Septime, 15e!), Alain Ducasse au Plaza-Athénée (16e) et Yannick Alléno chez Ledoyen (25e). Pour Mauro Colagreco, argentin d’origine italienne, marié à une brésilienne, mais français de coeur depuis sa formation auprès de certains des grands chefs cités plus haut, c’est une formidable consécration … qui intervient quelques mois après la 3e étoile au Michelin. La mérite-t-il? Mais qui donc mériterait cette place à lui seul? Mauro a, pour lui, l’enthousiasme, l’empathie avec les autres, l’énergie créative, la volonté d’entreprendre qui le fait rayonner, lui, son nom, la France, dans le monde entier. Vive donc Mauro super star!

Le lobbying pro-français d’Hélène Pietrini

Helene Pietrini © DR

Derrière chaque réussite, il y a une femme secrète, dit l’adage. Derrière la réussite française cette année, il y a Hélène Piétrini, que l’on connut comme directrice du marketing au magazine Trois Etoiles, travailla également pour les Relais & Châteaux. Et qui est entrée à la direction des World 50 Best en suivant son mari expatrié professionnellement à Londres. La belle Hélène, qui sillonne ardemment le monde entier, écume avec ardeur la planète des chefs. On l’a vue à Hong Kong avec Vicky Lau en avril dernier au Central, chez la « best female chef 2019 », avec André Chiang à Macao, ou encore, en mai dernier, chez Septime, dans le 11e, avec Théo Pourriat et Bertrand Grébaut. Signe qu’elle n’oublie pas son pays natal. Si Mauro Colagreco est n°1, si Alain Passard a reçu le hochet de luxe du « Chefs’ Choice Award 2019 », si Jessica Prealpato, pâtissière d’Alain Ducasse au Plaza Athénée, a été « élue » « world’s best patry chef 2019 », c’est bien à cette activiste de charme qu’on le doit. Vive la France! Vive Hélène Piétrini!

Marc Veyrat dégomme le Michelin

Marc Veyrat © GP

Il fulmine, déprime, ne digère pas – et on le comprend – sa chute à deux étoiles au Michelin, un an seulement après avoir reçu la 3e. Et ne décolère pas. Envisage même de porter plainte pour tromperie et attend toujours des preuves (copies de notes de frais ou autres) du passage des inspecteurs chez lui en 2018. Marc Veyrat qui s’est longuement confié à notre confrère et ami Thibaut Danancher du Point, a révélé avoir songé mettre fin à ses jours, se souvenant de l’expérience de son ami Bernard Loiseau, qui, lui, n’avait pas perdu d’étoile, contrairement aux assertions de l’époque suggérées par un de nos collègues du Figaro. Marc Veyrat y met, notamment, en cause la déontologie des inspecteurs et s’en prend assez précisément au nouveau directeur du guide rouge, Gwendal Poullennec, dont il conteste le sens de la diplomatie et, plus précisément, la compétence.

En voici deux extraits significatifs :

– « Ma compagne a reçu sur son portable le dimanche 20 janvier à 19 h 54, la veille de la cérémonie du Michelin, un SMS de la part du directeur monde : « Bonjour Monsieur Veyrat, je vous adresse mes meilleurs vœux pour cette nouvelle année. Auriez-vous la possibilité de me rappeler lorsque vous avez ce message, s’il vous plaît ? Sincère salutation, Gwendal Poullennec, le guide Michelin. » Je dormais après avoir effectué mon dernier service de la semaine le dimanche midi. Ma compagne m’a réveillé. J’ai joint Gwendal Poullennec, qui m’a annoncé la mauvaise nouvelle par cette phrase laconique : « Nous sommes dans l’obligation de vous retirer une étoile. » C’était surréaliste. Par SMS il me souhaitait ses meilleurs vœux pour l’année 2019 et par téléphone il m’annonçait que je perdais ma troisième étoile. Ça m’a choqué ! »

– « J’ai sollicité un rendez-vous au siège à Boulogne-Billancourt. J’ai été reçu avec ma compagne pendant une heure trente le 12 mars à 9 heures par Gwendal Poullennec, le directeur monde des guides Michelin, qui était assisté d’un de ses collaborateurs. Quand je lui ai demandé pourquoi j’avais perdu ma troisième étoile, voilà les deux justifications qu’il m’a avancées : « Vous mettez dans un de vos plats une simple tranche de cheddar. Nous avons également trouvé que votre saint-jacques était cotonneuse. » Je suis resté bouche bée, car, d’une part, ce n’est pas du cheddar mais une préparation très technique à base de beaufort que j’utilise dans un de mes classiques baptisé Le torchon disparaissant de Mémé Caravis ; d’autre part, il est impossible que ma saint-jacques soit cotonneuse car je la fais cuire dans une coque de fruits de la passion. Comment peut-on avoir autant de pouvoir en étant aussi incompétent  ? J’ai eu en face de moi un amateur. Je me suis levé pour quitter la pièce et il est revenu me chercher au moment où j’allais passer la porte du bureau. La nouvelle direction du Michelin n’a pas le niveau d’un Bernard Naegelen (NDLR, directeur du guide Michelin jusqu’en 2000). »

Pierre Gagnaire rempile au Fouquet’s

Bruno Gueret, Pierre Gagnaire, Raymond Nordin © GP

Bruno Gueret, Pierre Gagnaire, Raymond Nordin © GP

C’est reparti pour un tour au Fouquet’s. La brasserie incendiée par les gilets jaunes en mars dernier rouvrira le 14 juillet prochain. Cette rentrée estivale se prépare avec ardeur avec Pierre Gagnaire qui conseille ce lieu mythique, sis à l’angle des avenues George V et des Champs-Elysées. Le décor revu par Jacques Garcia, a été reconstruit à l’identique – il est actuellement invisible, caché au vu des passants par des plaques en tôle émaillée. Quant à la cuisine, elle sera toujours signée Gagnaire, selon le mode du classicisme rajeuni avec des notes contemporaines, le sens de la fête et des couleurs. Les nouveaux détails de la carte sont actuellement, mis au point par le grand Pierre, qui doit ouvrir en octobre sa table gastronomique à Nîmes au sein du  nouvel Imperator,  et a imaginé ici quelques pointes modernes, avec les maîtres du Fouquet’s Barrière, le chef exécutif Bruno Guéret et celui du Joy, le jeune Raymond Nordin.

Julien Boscus le retour

Julien Boscus  © Boniface Prod

Il a quitté discrètement le restaurant Climats dans le 7e, où il a laissé son étoile et où il a été remplacé par Emmanuel Kouri, venu de l’Epicure au Bristol. Julien Boscus, disciple de Pierre Gagnaire et de Yannick Alléno, prépare son retour côté Champs-Elysées. Ce sera au 6 de la rue Ponthieu, à l’enseigne d’Origines. Ce fils de restauratrice et de boucher aveyronnais y jouera le produit de saison et du marché bien sourcé. Il s’associe avec Thibault Souchon, rencontré à Séoul à la table de Pierre Gagnaire, qui composera également la carte des vins avec ses 150 références. La décoration contemporaine signée Caroline Tissier sera épurée et relaxe. La maison accueillera les convives avec des tables sans nappes, des banquettes confortables et une cuisine vitrée façon atelier. Ouverture prévue: mi-septembre.

Justin Schmitt au Laurent

Justin Schmitt chez Laurent © GP

Les chefs passent, les maisons demeurent. On a connu, au Laurent, dans cette belle demeure d’un autre temps, toute voisine de l’Elysée, au moins, Marc Pralong, Bernard Guilhaudin, Philippe Braun, Alain Pégouret, avec le conseil de Joël Robuchon, pour ces deux derniers. Un nouveau chef est venu remplacer Alain Pégouret parti au Sergent Recruteur dans l’île Saint-Louis tenter l’aventure gourmande à son compte. Et voilà Justin Schmitt, venu du Crillon côté Brasserie d’Aumont, qui s’y colle, et reprend en main avec sûreté les fourneaux de cette maison vénérable face aux Champs-Elysées. La jeunesse est là – Justin n’a que 33 ans, son adjoint de cuisine Piotr Glodkowski et sa pâtissière, Camille Mansouri, tous deux venus du Crillon, font encore baisser la moyenne d’âge. Mais le style culinaire a soigneusement été conservé, entre grand classicisme allégé (avec le homard en salade, décortiqué à la table) et le côté contemporain, à la fois ludique et graphique (blanc-manger de langoustine au caviar au coulis de laitue, fraîcheur de tomates à l’huile de basilic et pastèque au yuzu ). On en reparle vite…

Le Relais de la Poste change de mains

Thomas Koebel © GP

La maison a changé plusieurs fois de chefs (on y a connu notamment Jérôme Daull, Laurent Huguet, Bruno Sohn, Julien Binz, enfin Vincent Vervisch). Le Relais de la Poste, qui fut longtemps « la » table étoilée de la Wantzenau, le village gourmand proche de Strasbourg, fameux pour son poussin, mais aussi son foie gras et sa matelote, a été tenu quinze ans durant par Caroline Van Maenen. Il vient d’être racheté par la famille Burrus, établie entre la Suisse (côté Boncourt et Lausanne) et l’Alsace, qui possède notamment, avec papa Jean-Paul, sous la holding « Salpa », la marquise de Sévigné, Côte de France, Schaal, les chocolats Yves Thuriès. C’est le fils de Jean-Paul, Jean-Philippe Burrus, en charge de Salpa Restauration, qui gère déjà les Secrets des Grands Expresss, qui prend en mains la demeure, y plaçant le chef Thomas Koebel, vu dans cette dernière maison, voisine du musée du chocolat de Geispolsheim. Objectif, avec cet ancien de chez Jung au Crocodile à Strasbourg et du Cygne à Gundershoffen au temps des Paul : y retrouver l’étoile perdue l’an passée. Ce serait en tout cas la première pièce de leur futur empire gourmand en Alsace. Il se murmure, en effet, qu’ils pourraient s’associer à Cédric Moulot pour la rénovation en cours du Crocodile de Strasbourg-. Affaire à suivre.

Massimo Petrone triple la mise

Massimo Petrone © GP

Il était le Napolitain charmeur de l’angle des rues Moncey et Clichy, à l’enseigne de Spaccanapoli, qui avait remplacé Il Sardo, Napule E, puis Bocca di Rosa. Massimo Petrone avait doublé son empire ouvrant juste en face, au 19 rue Moncey, « GustoMassimo« , bar à vins à l’italienne, promouvant autant les super toscans des Bolgheri, avec Sassicaia et Solaia, que les nero d’avola enjôleurs de Sicile. Le voilà qui vient de racheter la boutique attenante pour transformer son bar cave en trattoria digne de ce nom. Massimo est donc présent ici et là, vantant un cru d’élite, une bruschetta, une planche de charcuteries de montagne comme un plat du jour de qualité et une pizza, dont sa maison vis à vis s’est faite une spécialité avec ses pâtes cuites al dente. A redécouvrir!

Les chuchotis du lundi : Mauro super star, le lobbying pro-français d’Hélène Pietrini, Veyrat dégomme le Michelin, Gagnaire rempile au Fouquet’s, Boscus le retour, Justin Schmitt au Laurent, le Relais de la Poste change de mains, Petrone triple la mise” : 1 avis

  • PEINARD BED

    M. Pudlowski, tout le respect que j’ai pour vous et pour vos chroniques, cette fois-ci, je réagit un peu en toute sincérité. Votre papier sur M. Veyrat est un peu poussé non ?? Vous comprenez son comportement et cautionnez en quelques sortes ces dernières sorties publiques… Arrêtons un peu, ce grand chef de cuisine déplore, ne supporte pas et envisage comme vous dites de porter plainte. Il est sérieux ?? Heureusement que les écolos n’ont pas à leurs tour porter plainte pour destruction de la nature à la construction de son établissement, car quand on voit où il l’a bâtit, ça laisse perplexe comment peut-on avoir un permis de construire… On parle d’un hectare d’arbres non ?? Les structures sont montées à dos d’ânes comme avant ?? Et puis si on va plus loin, combien sont passés par ses cuisines et en sont sortis  » Abîmé  » ??? On cautionne toujours ??? En ce moment, il surfe sur cette perte d’étoile pour alimenter son CA… Je crois que biens des chefs méritent bien plus de papiers sur vos chuchotis car en province, des chefs méritent la troisième étoile, et eux sont dans une démarche éco-responsable, et son pédagogue… Il faut rien enlever à son talent de chef mais faut se ranger et laisser la place aux jeunes quarantenaires au niveau 3 étoiles… Bien à vous

Et vous, qu'en avez-vous pensé ? Donnez-nous votre avis !