Le Yachtman

Façade © DR

C’est comme une parenthèse enchantée au coeur des choses. Une demeure comme un rêve, reconstituée – ce fut jadis un manoir du Faouet rebâti ici, pierre à pierre, en lieu et place d’une demeure années 1950 face à la mer. On admire, de loin, le port de Roscoff, son clocher effilé et dentelé, l’île de Batz que l’on aborde en un quart d’heure. On prépare les excursions du lendemain depuis le bar à l’anglaise. On séjourne dans les  chambres élégantes, sobres, sans chichi, qui regardent la mer ou le jardin.

Il y a encore le spa, la piscine couverte. Mais la cuisine du jeune Loïc le Bail, ancien de Jeffroy, Gagnaire, Senderens et Savoy, fidèle à la demeure animée avec chaleur par les Chapalain, depuis deux décennies déjà. Ce breton de Quimperlé ne s’en laisse pas compter sur le terrain de la créativité associée à la recherche des produits du terroir authentiques. Il fouine, aux viviers locaux signés Béganton, le meilleur de la mer: tourteau géant, belles araignées, homards et langoustes de casier. Il réalise des prouesses qui raconte la richesse du pays d’ici.

Loïc le Bail © DR

Il aiguise l’appétit avec le tartare de pieds de couteaux aux asperges Blanches, la chair d’araignée lariée aux topinambours, la gelée de poissons de roche ou la crème de vodka et citron vert ou le crémeux de choux fleur et sa gelée de bigorneaux. C’est comme une chanson douce qui fredonne la richesse des produits du Léon. Il y a encore la petite soupe à l’oignon rosé de Roscoff avec son amusante guimauve au parmesan, puis le maquereau mariné et poireaux croquants. Mais ce sont des amuse-gueule qui sont comme un avant-goût du vrai voyage.

Les grosses queues de langoustines justes saisies flanquées de ravioles de poireaux et de lard Paysan plaideront pour un joli mariage de la terre et de la mer. Comme la fricassée d’ormeaux au plat unie rustiquement aux si fines pommes de terre de l’Ile de Batz aux citrons confits. Mais la côte de veau de lait cuite au sautoir avec sa crème d’Ail, sa cocotte de légumes prouve que le pays du Léon est riche de ses beaux produits terriens.

Salle à manger © DR

La partie forte de la maison, comme souvent chez les grands Bretons qui ont le bec sucré: le moment des douceurs. Avec le soufflé de pommes de terre dit « allégé » servi avec sa jolie quenelle de sorbet au lait ribot – il n’y a plus breton bretonnant! Mais le « battu du Léon » qui est la cousin local du baba, avec ses mendiants macérés au vieux rhum, sa glace pain d’épices sont également du beau travail.

On peut aussi faire halte au Brittany pour le plaisir de séjourner sans heurt à l’écart des choses, se « contenter » d’un monumental plateaux de fruits mer, où huîtres sauvages, langoustines bien fermes voisinent avec tourteaux géants et araignées si fines. Revenir encore pour le kouign amann façon Tatin ou le Paris Brest au blé noir. Bref, il y a mille manières d’aborder ce drôle de manoir qui veille en sentinelle sur l’un des plus charmeurs des ports bretons et reste fidèle à son esprit, celui de son pays.

Piscine © DR