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Anthon

« Georges Flaig, la perle des Vosges du Nord »

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Article du 1 avril 2011

Georges Flaig, avec son cheval © Maurice Rougemont

Coup de fil ébloui tôt ce matin de Jean-Luc Petitrenaud. Le motif: il revient d’Obersteinbach,  à l’extrême pointe septentrionale de l’Alsace et a découvert, à mon invite, le petit Georges Flaig. Jean-Luc cherchait, pour un prochain tournage de France 5, « un jeune chef qui sorte du lot ». J’ai aussitôt pensé à GF, sauf que je lui ai confié: « Ce garçon a de l’or dans les mains. Mais c’est un timide, un taiseux, à toi de le faire parler ». Je crois que de ce point de vue là aussi, tout fut parfait. Jean-Luc, qui est un accoucheur de talents rare, un généreux d’abord ouvert aux autres, a su brillamment le faire s’exprimer.

Georges Flaig au petit déjeuner © Maurice Rougemont

Depuis quelques années, je ne cesse de vanter ce garçon surdoué et peu hâbleur, qui fut mon « jeune chef de l’année », puis ma « révélation de l’année », au Pudlo Alsace, et qui connaît tous les bons tours de la cuisine moderne, fuyant l’esbroufe avec un soin constant. Voilà mon dernier portrait de lui, avec les photos du fidèle Maurice Rougemont.

Georges Flaig © Maurice Rougemont

Il est le coming man de la cuisine des Vosges du Nord. Discret, modeste, comme on sait l’être dans une famille protestante à la frontière du Palatinat, au bord extrême de l’Alsace et de la Moselle. Gageons que la maison est si loin, si excentrée, que le Michelin, qui manque peut-être d’inspecteurs, a oublié d’aller voir de près ce qui se tramait là. Revenu de ses classes chez les grands, Georges Flaig donne un tour neuf à sa maison familiale.

Il fait dire que rien ici n’est « tendance », et qu’on peut même dire que le lieu, comme la demeure ou la cuisine tournent délibérément le dos aux mets en vogue. Ni jus de légumes, ni émulsion, ni épices d’ailleurs, seulement un petit air du sud, venant d’une formation qui passe par St Tropez et la Pinède (une grande maison d’aujourd’hui, dirigée par les Delion, et qui a vue sur le vieux village historique depuis la plage de la Bouillabaisse). Certes, la maison Anthon ne manque pas de charme, non plus que l’environnement, au pied d’une ligne de châteaux forts. La salle en rotonde, le jardin sous les ombrages, les piquants conseils vineux du maître d’hôtel sommelier Laurent Chiocca, pertinent sur une carte de vins immense, l’accueil souriant et efficace de maman Danièle: voilà, à l’évidence, la demeure du moment à redécouvrir.

La voisine Ferme du Steinbach © Maurice Rougemont

Rappelons que le petit Georges, 34 ans aux dernières quetsches, et que nous avons déjà ici plusieurs fois louangé, joue le jeu d’une cuisine de vérité. Il a fait ses classes chez Bernard Loiseau, à la Côte d’Or de Saulieu,  chez Westermann au Buerehiesel, au Chabichou de Courchevel, de Michel Rochedy, avant la fameuse Pinède tropézienne. Et tout ce qu’i mitonne procède d’un choix de qualité sans faille. Au lieu des jus de légumes et des petites cuillers en vogue, il sert, en guise d’amuse gueule, le fabuleux saucisson de canard d’un charcutier artisan de ses amis (Patrick Goettelmann de Meistratzeim). Et par jour de chaleur, sa soupe froide de tomates au pesto révèle une précision de goût totale.

Le doigté, la virtuosité technique, la précision des goûts : voilà ce qui frappe là, dans le traitement adéquat et juste, sans chichi, de ce qui vient de la terre, des rivières ou de la mer, du sucré comme du salé. Prenez le carpaccio de bÅ“uf à l’huile de truffe et ses copeaux de parmesan, comme un modèle d’un genre vu et revu ailleurs : tranchage fin d’une viande exceptionnelle, dosage au millimètre de l’huile truffée et parmesan affiné à point. Allez le goûter chez les autres : ce sera forcément moins bon ! Il faut se rappeler qu’il y a cinq ans, c’est d’ici même qu’est partie la crème brûlée de foie gras qui a fait des ravages dans la France entière (j’en ai mangé l’été dernier trois fois de suite, malgré moi, dans le Lot, où l’on ne sert plus, hélas, le foie gras qu’en glace, émulsion, crème ou sushi/maki…).

Mosaïque de plats © Maurice Rougemont

C’est dire qu’avant d’apparaître comme un nouveau classique, le petit Georges Flaig sait créer avec un art sans pareil. A la manière sans doute de son maître Bernard Loiseau qui affirmait : « la star, c’est le produit », jouant les jus fins, comme les goûts justes. La carte se divise, chez Anthon, en deux : les classiques et la cuisine du marché. Au chapitre des premiers, le foie gras mi-cuit avec son concentré de porto rouge, les jambonnettes de grenouilles avec une poêlée de champignons et de mini-ravioles ou encore le splendide exercice sur le thème des schniderspätle de truite saumonée aux échalotes confites. Superbe !

Côté cuisine du marché, le tartare de thon rouge avec son gaspacho épicé, le bar au jus de veau à la sauge, la tarte fine de rouget à la roquette, légumes et chorizo ou encore le juteux pigeonneau avec sa galette de pastilla aux fruits secs sont des instants de grâce qui feraient prendre ces parages sylvestres des Vosges du Nord pour un bout de l’arrière-pays cannois.

Georges Flaig avec un cabri, à la ferme du Steinbach © Maurice Rougemont

Ajoutons que les desserts ont toujours été ici une partie forte. Ils le demeurent avec une tropézienne aux framboises ou une tarte sablée aux mêmes fruits avec son sorbet à se rouler par terre (de contentement !). Et rappelons enfin qu’il y a quelques chambres à l’ancienne pour l’étape d’un soir, parfaite pour ceux qui ne veulent pas reprendre la route. D’autant que les prix en sont doux et que les chemins multiples qui sillonnent les ruines à l’entour font autant de promenades romantiques et digestives.

Anthon

40, rue Principale
67510 Obersteinbach
Tél. 03 88 09 55 01
Chambres : 65-98 €
Menus : 25, 48, 65 €
Carte : 65 €
Site: www.restaurant-anthon.fr

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