L'Erguillère
« Je vous écris de Port Racine… »
Je vous écris de Port Racine… Je suis au bout du monde. La fenêtre s’ouvre sur une côte dentelée, déchiquetée, de granit, de bruyère, de sable et de sel. C’est cette petite Irlande que constitue l’extrême Ouest du Cotentin vers le cap de la Hague au pied de St Germain des Vaux. La mer est là comme une offrande, se confond avec le ciel.
L’hôtel, une demeure des années 1960 revue à l’ancienne, avec sa pierre d’ici, sa tour, sa terrasse, surplombe l’anse St Martin. Il y a dix chambres, nettes et sobres, sans chichi, qui laissent place, comme les salons vitrés, au spectacle extérieur magique. Ce « Finistère le plus proche de Paris« , comme disait Jacques Prévert, qui séjourne pour l’éternité au cimetière voisin d’Omonville-la-Petite, se touche ici du doigt.
Parfois aussi le calme, les barques tirent sur leurs cordes, elles tremblent puis reprennent peu à peu leur respiration au rythme de la marée. Le port racine, du nom d’un corsaire qui se réfugiait là alors même que nous tous étions encore dans le néant. Le soir il veille sur les âmes endormies, il les éveille parfois, en trainant sa grosse voix à l’endroit délicieux où vous avez dormi, à flanc de falaise. Merci d’écrire sur notre Hague, ce mot interdit, qui manque tellement de chaleur, depuis que son poète est mort. Vous vous placez avec autant d’articles d’un coup sur notre pays tel un journaliste contrebandier, alors merci.