Le Royal au Royal Champagne
« Champillon-Epernay : les gourmandises du Royal »
C’est une table connue, nouvelle, ancienne : tout cela ensemble. Même si elle paraît totalement neuve et si on y a connu de nombreux chefs, de Jean-Claude Pacherie à Christophe Dufossé, de Marc Dach à Alain Guichaoua. Jean-Denis Rieubland, MOF 2007, ancien deux étoiles au Négresco à Nice et au domaine de Terre Blanche dans le Var, relève le gant et un challenge de classe: venir, dans cet OVNI hôtelier qu’est le Royal Champagne nouvelle vague, avec son talent, sa manière, ses idées, son savoir-faire, forgé sur la Côte d’Azur, celui d’un natif du Sud Ouest (d’Agen, exactement) nouvellement enraciné en Champagne, à deux pas du trois étoiles d’Arnaud Lallement à Tinqueux et du deux macarons de Philippe Mille aux Crayères.
La déco ? Ou vous en a un peu parlé: panneaux en l’honneur des dames qu’aima Napoléon, l’un des hôtes historiques de la maison, relais depuis le XVIIe, assiettes signées Maison Fragiles reproduisant les lettres de l’empereur à Joséphine de Beauharnais ou Marie Walewska, vue sur le côté vers Hautvillers, Epernay, plus le panorama des vignes, quoique seulement depuis les premières tables. Mais on n’est pas venu là « manger les rideaux« , comme disait Curnonsky. La cave est riche, les cuvées champenoises nombreuses, tarifées sans outrance, avec de jolis flacons à (beaucoup) moins de 100 € – rare à Paris!-, conseillées avec malice par le sommelier Daniel Pirès, ancien du Laurent et de la Scène Thélème.
Au programme: amuse-bouche avec melon et granité de champagne, gravlax de bœuf avocat et caviar, plus fleur de courgette en tempura, puis entrée en matière avec raviole de turbot, crème de petits pois et citron caviar. Ensuite? Tourteau, caviar prestige, mangue et marmelade d’agrumes au combawa, langoustines rôties au piment d’Espelette, cromesquis de tête de veau aux feuilles de roquette, sole et homard bleu sauce champagne ) alliance un peu riche, assez audacieuse, très « plat de concours », avec ses barbajuans (les raviolis frits monégasques) de pinces de homard au vert de blette.
Côté viandes, l’agneau allaiton de l’Aveyron aux salicornes, poivrons multicolores, tempura de fleur de courgette ou le ris de veau clouté au chorizo, fricassée de girolles, petits oignons caramélisés, jus court de jerez sont pile poile. Le plateau de fromages d’ici et d’ailleurs fait envie. Mais il fait garder de la place pour les créations sucrées du maestro pâtissier Matthieu Siegrist, ancien du Bueheriesel à Strasbourg, sa ville natale, mais aussi de chez Lallement à l’Assiette Champenoise. Mini-crumble aux fraises, craquant chocolat au lait sur un croustillant praliné, sorbet chocolat noir, écume pimentée ou fraises des bois, réduction de vinaigre balsamique, crème de mascarpone et sorbet fraise font merveille.
On ajoute le frais blanc de blancs les Terres Fines de Dhondt-Grellet, la magique cuvée 741 si vineuse du champagne Jacquesson, le vif blanc nature de JM Sélèque à Dizy, le charmeur rouge côteaux champenois de chez Geoffroy à Cumières au joli nez de géranium mâtiné de de framboise ou encore le ratafia de Champagne en Solera d’Henri Giraud. Assez pour se donner envie de venir ici prendre pension et de recevoir des cours de savoir-vivre à la champenoise, bercé par un service aux aguets.