La Nationale 7 de Clément Pétreault
« De toutes les routes de France, d’Europe
Celle que j’ préfère est celle qui conduit
En auto ou en auto-stop
Vers les rivages du Midi
Nationale Sept
Il faut la prendre, qu’on aille à Rome, à Sète
Que l’on soit deux, trois, quatre, cinq, six ou sept
C’est une route qui fait recette
Route des vacances
Qui traverse la Bourgogne et la Provence
Qui fait d’ Paris un p’tit faubourg d’ Valence
Et la banlieue d’ Saint-Paul de Vence
Le ciel d’été
Remplit nos cœurs de sa lucidité
Chasse les aigreurs et les acidités
Qui font l’ malheur des grandes cités
Tout excités, on chante, on fête
Les oliviers sont bleus, ma p’tite Lisette,
L’amour joyeux est là qui fait risette
On est heureux Nationale 7″
Ainsi chantait Charles Trénet. C’était en 1955. Depuis, la mythique Nationale 7 a été partiellement déclassée en tronçons départementaux. Mais son tracé existe bel et bien et nombre de ses bornes magiques. Clément Pétreault, qui est journaliste au Point et qui a gardé la fraîcheur de l’enfant qu’il fut, admirant Trénet chantant à la Maison de la Culture de Nevers, jadis, alors qu’il avait douze ans, a refait l’itinéraire en sens inverse. Il récupère un camping-car à Lagny-sur-Marne, file au camping de Ferrières-en-Gâtinais, rallie Menton par l’autoroute, puis, après une mauvaise nuit passée sur une place impossible pour garer son « Char« , il prend enfin la N7 qu’il remonte en douceur vers Paris. Nous sommes fin février (2017). Le voyage durera un mois. Clément part à la rencontre d’une France non pas oubliée, comme le dit le titre, mais négligée, déprimée, offensée, en proie aux doutes, comme aux utopies variées, qu’il rencontre avec curiosité, raconte avec tendresse. Courtier en assurance et as du citron à Menton, nettoyeuse de chiens à Saint-Laurent-du-Var, spécialiste de la radicalisation à Golfe Juan, militants FN, PS, rapatriés d’Algérie, à Toulon, Fréjus, Saint-Raphaël, pharmacienne nonagénaire – qui a vécu toute sa longue vie sans prendre un seul médicament – ou belges immigrés à Vidauban, retraités actifs au Cannet-des-Maures: voilà quelques uns des Français rencontrés au fil du chemin, contés avec tendresse, ironie sans rosserie, malice et compréhension mêlée. Notre journaliste camping-cariste s’interroge sur l’image de Paris en province – pas vraiment bonne ….- met la main à la pâte dans un bistrot de Valence, rencontre un vigneron mégalo et passionné à Tain-l’Hermitage (n’est-ce pas Michel Chapoutier?), s’arrête chez Troisgros (épisode drôlatique), copine avec les uns, se fond vite chez les autres, retrouve le Nevers de son enfance avec émotion. On épilogue… On ne va pas tout vous dévoiler. Sachant qu’après un mois d’errance, son retour à Paris sera difficile, car il faudra se réadaptée. Cette France négligée, laissée de côté, laisse des traces attachantes et donne envie de repartir. Voilà une parfaite lecture de pré-vacances!
Nationale 7 – Voyage dans une France Oubliée de Clément Pétreault (Stock, 220 pages, 18,50 €).