Oxte
« Paris 8e : connaissez-vous Oxte ? »
C’est la sensation mexicaine du moment, après Beatriz Gonzalez, présente chez Neva, Coretta, à la Grande Epicerie de Paris côté Passy, et Indra Carrillo, le wonder kid de la Condesa dans le 9e, voilà un tout bon qui arrive. Enrique Casarrubias – retenez son nom – dit « Kike », pour les amis, a été deux ans durant le lieutenant d’Akrame rue Lauriston, après avoir travaillé dans diverses belles maisons, comme le Crillon ou le George V. Voilà qu’en s’installant à son compte, il n’oublie ni ses racines, ni son terroir.
Le nom du lieu (Oxte) fait référence au village de ses parents, au sud de Mexique, et ce garçon, qui n’a que 31 ans, mais une barbe de prophète qui lui donne l’air d’un vieux sage, n’oublie pas d’avoir de bonnes lectures, car il a lu « Pedro Paramo », dont il cite l’auteur, Juan Rolfo, en liminaire de sa carte: « on travaille avec l’imagination, l’intuition et l’apparence d’une vérité. Quand ceci est atteint, alors on réussit l’histoire que l’on veut faire connaître. » Vaste programme, eût-dit le Général!
Tout ce qui se propose ici, sous le sceau de l’intuition, de l’inspiration et du goût, témoigne d’une finesse sans faille: asperges vertes de Nogaro avec soubressade et boudin noir, foie gras poêlé, maïs « esquites« , caramel bière et moutarde ou encore oeuf à 62 degrés, carottes des sables, cumin, vieille mimolette, éclats d’amandes étonnent, séduisent, ravissent sur le mode du « déjà vu, mais jamais goûté » (ah, l’alliance de la vieille mimolette avec l’oeuf parfait!).
Suivent la barbue de petit bateau accordée aux blettes multicolores, navets, sabayon orange, puis encore le tendre quasi de veau, aux asperges blanches, beurre blanc, coriandre, tamarin qui frappent avec justesse et sincérité. Pas de chichi, ni de moléculaire, ni de chimie, pas d’esbroufe, mais du goût et des produits nets et purs. En issue, gâteau de maïs façon pain perdu (un peu étouffe, certes…), avec sa mousseuse crème au piloncillo (canne à sucre) et sa belle glace noix de coco ou encore la jolie composition sur le thème de la fraise, de la rhubarbe et de la fève de tonka, avec leur biscuit amande ont du répondant.
Voilà bien le lieu où mener un ami cher à qui faire découvrir la « table du moment« . Et c’est bien ce que l’on se dit avec mon vieux pote Jean-François Derec, qui découvrait le lieu, son accueil de charme, son cadre contemporain, tout en pestant contre les couverts modernes (qu’il trouvait peu pratiques, mais qui, moi, m’allaient très bien). Côté vins, en tout cas, c’était l’originalité alliée à la qualité, avec un exquis et fruité tokaij furmint sec de chez Samuel Tinon ou un solide et généreux côtes du rhône bio signé Philipe Cartroux au domaine d’Espiers à Vacqueyras. Bref, visitez en hâte ce Oxte, où l’on trouvera du bon, du cinglant, servi avec sourire et gentillesse. Pas si courant à Paris par les temps qui courent..