Les chuchotis du lundi : les Bretons au Quai d’Orsay, l’Innocence selon Anne et Jonathan, le succès de Goût de France, le rebond de Petitrenaud, Ranvier s’en va, le phénomène Grolet, le feu chez Champeaux, Ducasse au musée, Chaucesse chez Apicius

Article du 26 mars 2018

Les Bretons investissent le Quai d’Orsay

Au Quai d’Orsay avec Jean-Yves Le Drian © SD

Solidaires comme jamais, soutenus par leur président de région devenu ministre de l’Europe et des Affaires Etrangères, les meilleurs chefs bretons, rassemblés dans l’association « Tables & Saveurs« , ont présenté, avec leurs producteurs favoris, leur nouveau guide, rajeuni, épuré, dépoussiéré au Quai d’Orsay, lundi dernier 19 mars, tandis que Jean-Paul Abadie, le deux étoiles de l’Amphitryon à Lorient, vendu à Olivier Beurné et Anthony Rauld, faisait ses adieux publics au métier.  Les ormeaux de France Haliotis cuisinés par Nicolas Conraux de la Butte à Plouider, le caviar Sturia avec les saint-jacques fumées, les crêpes et le sarrasin sous toutes leurs formes jouaient notamment les vedettes. Et le ministre breton et gourmand, Jean-Yves Le Drian, de prêcher les saine vertus de la rigueur bretonne en goûtant joyeusement à tout. Notamment en présence du trois étoiles breton parisien Christian Le Squer, originaire de la Ria d’Etel, près d’Hennebont, mais aussi de Gwendal Poullennec, secrétaire général du guide Michelin, qu’on cite souvent comme futur remplaçant de Michael Ellis. Absences remarquées: celles d’Olivier Roellinger et Patrick Jeffroy de Bretagne, mais aussi d’Alain Passard et de Bernard Pacaud à Paris. Même si leur coeur était un peu là…

Jean-Yves Le Drian avec les Chapalain du Britanny à Roscoff, Christian le Squer et Gwendal Poullenec © GP

L’Innocence selon Anne et Jonathan

Jonathan Caron et Anne Legrand © DR

L’adresse on la connait: 28 rue de la Tour d’Auvergne à Paris 9e. Ce fut celle de Spring lorsque Daniel Rose y prit son envol. Puis celle de Raphael Rego qui y lança Oka. Jonathan Caron, qui fut le maître d’hôtel de ce dernier, après avoir été à la Bigarrade avec Christophe Pelé rue Nollet, ainsi qu’à l’Ambroisie avec Bernard Pacaud. Il reprend la maison, la rebaptise l’Innocence, embauche, comme chef, la jeune Anne Legrand qui fut sous-chef junior au Clarence, avec Christophe Pelé déjà cité, après avoir exercé à la Belle Étoile à Niort, où elle fut jeune talent Gault-Millau 2018. Le restaurant , qui ne compte que vingt couverts, ouvre le 2 avril.

Le succès de Goût de France

Jean-Yves le Drian parle face à Alain Ducasse au Meurice © GP

Hommage à Paul Bocuse, avec une recréation de la soupe aux truffes VGE sous le nom de « soupe Elysée », mise en scène de qualité, autour du bar en écaille et de la volaille de Culoiseau aux champignons, fromages de France et chocolat « de notre manufacture », à la fois chaud et glacé: ce fut l’hommage d’Alain Ducasse, en col bleu blanc rouge de MOF, pour ce mercredi 21 mars, au Meurice avec un brillant exercice de style orchestré par la brigade de Jocelyn Herland, tandis que, dans de nombreux pays et ambassades du monde entier, les chefs français donnaient, ce soir-là, des repas de prestige. Au Meurice, en navire amiral de cette manifestation désormais culte, ce fut assez grandiose. Hommage aux terroirs de France, confiance réaffirmée de l’actuel ministre de l’Europe et des Affaires Etrangères, Jean-Yves le Drian, certitude que la France joue sa partition gourmande avec sérénité, dans un monde où les stars venus d’Amérique, d’Asie et de l’Europe du Sud et de Scandinavie viennent contester sa suprématie, Goût de France/GoodFrance indique bien que la France demeure au sommet de la gourmandise du monde avec son leader naturel. Ministres et présidents changent, Ducasse demeure.

Le rebond de Petitrenaud

J-L Petitrenaud le 21 mars 2018 © GP

La 5 a annoncé la suppression de ses « escapades » et, parallèlement, la rediffusion de ses anciens épisodes. Jean-Luc Petitrenaud contre-attaque. Lui, qui fait figure aujourd’hui de « trésor national », s’apprêtait, après un « bon repos » bien mérité, à faire son retour en ce mois de mars, indique que la 5 se refuse désormais à produire du neuf en oeuvrant pour le renouveau du patrimoine. Il s’apprête à produire coup sur coup un documentaire et une série indiquant, avec sa fille Louise, présente déjà sur France 2, que les Petitrenaud sont au service de la France gourmande « de père en fille« . Parallèlement, circule sur Facebook une pétition pour protester contre la suppression des Escapades de Petitrenaud. On va vite reparler de JLP…

Michel Ranvier s’en va

Michel Ranvier et le service chez Conti © GP

Un des très bons artisans de la cuisine italienne à Paris a pris sa retraite en douceur. Il s’agit de Michel Ranvier, natif de Roanne, ancien de Troisgros et de l’Orient-Express, qui se prit de goût pour la cuisine de la Sérénissime en accomplissant souvent le voyage ferroviaire Paris-Venise et vice-versa. Le carpaccio comme au Harry’s Bar, la moutarde de Crémone, les pâtes sous toutes leurs formes n’avaient guère de secret pour le virtuose de Conti, rue Lauriston, où il avait remplacé jadis Pascal Fayet, fameux ensuite chez Sormani. Conti, avec ses airs chics et vénitiens des années 1950, ses lustres de Murano, son service en smoking, continue sous l’égide du patron, le franco-libanais Steve Abiagui, et le chef Laurent Bourdin, qui fut vingt-cinq ans ici même le lieutenant de Michel Ranvier. Formé jadis au Véfour, au Crillon époque Constant, chez Duquesnoy et à Pile ou Face, Bourdin, qui s’est mis à la cuisine italienne avec sérieux, connaît la musique.

Le phénomène Grolet

Chez Cédric Golet, vendredi 23/03 à 15 h © GP

C’est le phénomène de mode du moment : l’ouverture, mardi dernier 20 mars, de la pâtisserie signée Cédric Grolet par le Meurice, au 6 de la rue de Castiglione. La queue qui s’allonge, l’attente qui se fait sans heurt sous les arcades, pour de mini-gâteaux à de maxis prix (de 8 à 17 € l’unité, du Paris-Brest et du fondant au chocolat à la pomme rouge ou la noisette), le service au visage blême pour ne pas dire moins : il y a sûrement des manières plus ludiques d’user de son temps ou de dépenser son argent à Paris. Mais c’est sans compter sans l’instinct grégaire et le doux masochisme d’un public toujours avide de nouveautés. Cédric Grolet, élu meilleur pâtissier de restaurant par les Grandes Tables du Monde, lors de leur dernier congrès à New York, possède 850 mille abonnés sur Instagram. Chapeau l’artiste!

Le feu chez Champeaux

Champeaux © DR

Mais non, le torchon ne brûle pas entre Alain Ducasse et Olivier Maurey. Et non, ce dernier, propriétaire d’un domaine à Porticcio, n’a pas réglé son « problème de loyer à la corse« , selon le propos des humoristes du milieu (gourmand de Paris). Simplement, la brasserie de la Canopée des Halles du performant duo qui possède, en commun, Benoît et les Lyonnais, a connu un malencontreux incendie de fourneau (Molteni) le mardi d’autre semaine. Et devrait normalement rouvrir d’ici dix jours, pour mieux défendre la cuisine de tradition parisienne… tout feu tout flamme.

Ducasse au musée

Le Bistrot Benoît au Louvre © GP

On n’arrête pas Alain Ducasse. Il vient d’ouvrir cette semaine, avec sa société Ducasse Culture, liée à Elior, sous nouveau partenaire financier, un « Bistrot Benoît » au sein du Musée du Louvre, sous la pyramide inversée, revisitant avec une équipe performante l’oeuf mayo, le pâté en croûte, le foie gras, la quenelle de grenouille à la lyonnaise et le poulet à la basquaise, pour un public international qui découvre la cuisine française de tradition à prix modique (formule à 29,50 €). Il est déjà présent à Versailles (Ore), au musée d’art islamique de Doha, mais aussi très bientôt au musée du Quai Branly, où il reprendra les Ombres sous la forme d’un restaurant (panoramique) et asiatique, Près de 40 points de vente signés Ducasse Culture sont envisagés, du Musée d’Orsay à l’Orangerie, de Grand Palais à la BNF. 400 collaborateurs sont dans les starting-blocks à cet effet.

Chaucesse chez Apicius

Jérôme Chaucesse © GP

Il avait dû prendre congé brusquement du Crillon pour des raisons « managériales » ou de caractère, un brin mystérieuses. « En raison d’une attitude contraire aux valeurs et à l’éthique de l’établissement, la direction a dû être dans l’obligation de prendre la décision de se séparer de notre Chef Pâtissier Jérôme Chaucesse malgré l’excellence de ses réalisations et son savoir-faire français » , expliquait la direction du palace de la place de la Concorde en décembre dernier. Jérôme Chaucesse, MOF 2015, créateur de talent, devenu consultant à son enseigne s’apprête à rebondir, en imaginant une nouvelle équipe pâtissière pour le nouvel Apicius de Mathieu Pacaud, à partir de mi-avril. A suivre.

Et vous, qu'en avez-vous pensé ? Donnez-nous votre avis !