Gualtiero Marchesi © DR

Il fut le premier trois étoiles d’Italie. Artiste débridé, professeur souriant, pédagogue agile, créateur inspiré, visionnaire, gestionnaire, homme du monde, Gualtiero Marchesi fut tout cela à la fois. A Milan, jadis, les artistes, les musiciens du pays venaient s’extasier sur les “ recréations ” de ce Marinetti des fourneaux qui imaginait risotto or et safran ou ravioli ouvert de crustacés. On le trouvait au mieux de sa forme, septuagénaire jamais à défaut de projets neufs, près du lac d’Iseo, dans les vignes de Franciacorta, à l’enseigne de l’Albereta. La famille Moretti de Rosa, qui possède le vignoble bien nommé de Bellavista, avait fait appel au divin Marchesi pour dorer le lustre gourmet de son royaume hôtelier. Dans la véranda ouverte sur lac et collines, l’on dégustait les créations qui ont nom : « dripping » de légumes et coquillages façon Jackson Pollock, gelée de cèpes aux légumes nouveaux, mozarella “ noyée ” dans la tomate et le basilic, saint-jacques frites et panées en brochette, spaghetti servies froides sur leur fourchette, avec crevettes crues, soja et sésame ou encore cette splendide côtelette milanaise dite “ 2000 ”, coupée en dés fermes et tendres à la fois, à tremper dans une sauce vinaigrée et sucrée : c’était délicieux autant que joli à voir, typiquement italien et créatif en diable. Senderens transalpin toujours en quête de nouveautés, une sorte de Gagnaire piémontais qui avait toujours le souci de démontrer, doublé d’un charisme à la Bocuse et d’une élégance à l’italienne, Gualtiero Marchesi avait le souci de sauvegarder ses racines. A 87 ans, il tire sa révérence. Au revoir maestro, Addio professore!