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Les chuchotis du lundi : le menu Goncourt, Pétrissans rajeunit, Rose quitte Paris, Michelin déclasse NY, Sulpice sacré par GaultMillau, Cagnes chez Stohrer, après Jeannin qui? Le Guen part, Naret arrive, Le Calvez rebondit

Article du 6 novembre 2017

Le menu des Goncourt

Les Goncourt chez Drouant © DR

On ne connaît pas encore le nom du lauréat du prix Goncourt 2017, qui sera décerné ce lundi 6 novembre à 13h chez Drouant, place Gaillon – il sera choisi entre Yannick Haenel (Tiens ferme ta couronne, Gallimard), Véronique Olmi (Bakhita , Albin Michel), Eric Vuillard (L’ordre du jour, Actes Sud) et Alice Zeniter (L’art de perdre, Flammarion). Mais, en revanche, on peut d’ores et déjà vous révéler la composition du menu qui sera servi à l’Académie Goncourt pour ce déjeuner. En amuse bouche, une huître spéciale n° 3 d’Yvon Madec, avec son émulsion au champagne et sa quenelle de caviar Osciètre, un pâté en croûte au foie gras d’oie, gelée aux noix, des coquilles saint Jacques rôties, avec coulis de persil au gingembre, endives crues et caramélisées, un ragoût de homard & turbot au fenouil, une poule faisane rôtie au chou vert, avec leur matignon de légumes d’automne à la truffe noire, jus corsé, le chariot des fromages de Cyrille Lorho fromager-affineur et meilleur ouvrier de France à Strasbourg, enfin la pomme confite au beurre d’orange, pain d’épices et sorbet au fromage blanc. Côté vins, on sortira les grands flacons pour l’occasion, avec un magnum de Champagne Drouant Brut Blanc de Blancs, en apéritif, puis un pouilly-fuissé 2015 « Le Moulin », de Jean Manciat, un Gevrey-Chambertin 2013 « Racines Croisées » d’Henri Pion, un magnum de Bandol 2015 du domaine de Terrebrune, puis toujours en magnum un château Rauzan-Segla grand cru classé de Margaux 2007, enfin un magnum Champagne Pithois, réserve brut, pour le dessert, avant les eaux de vie de chez Hagmeyer à Balbronn. Bref, on s’ennuira pas ce midi, côté Goncourt… mais aussi chez les amis du patron qui auront la chance de partager ce glorieux festin très franco-français, avec quelques jolies notes alsaciennes, rappelant qu’Antoine Westermann détint 3 étoiles à Strasbourg au Buerehiesel, avant de devenir l’aubergiste de Drouant, du Coq Rico de Montmartre et… New York.

Antoine Westermann et son pâté en croûte © Maurice Rougemont

Passage de génération chez Pétrissans

Les Allemoz passent le relais à leur fils © GP

La maison existe depuis 1895. Tristan Bernard y situa le Petit Café, Céline y croisa Abel Gance.  La 5e génération arrive chez les Allemoz. Jean-Charles, qui a fait de brillantes études de maths, s’est finalement rallié à la bonne cause du vin aux Caves Pétrissans et s’apprêtent à succéder à ses parents, Marie-Christine et Jean-Marie. Les restaurateurs du quartier s’y croisent au comptoir, se font la bise, échangent les belles idées du jour. Pascal Fayet de Sormani, Rocco Anfuso du Il Ristorante, Albert Corre du Petit Pergolèse, Bernard Fournier de l’ex Petit Colombier, Didier Bureau sont des habitués et donnent au lieu l’air d’un club privé dédié au vin, d’un QG de copains gourmands. Au menu: pâté de tête, hure d’oreille de cochon, tête de veau, rognons flambés et autres joyeusetés à l’ancienne arrosés de grands vins à prix copains. On en reparle.

Daniel Rose quitte Paris

Daniel Rose à NY © AN

« J’ai retourné ma veste le jour où je me suis aperçu qu’elle était doublée en vison« , disait Serge Gainsbourg. Même réflexion pour Daniel Rose qui, depuis un an, fait un tabac justifié au Coucou de New York, sur Lafayette Street. Ce natif de Chicago, passionné de cuisine française, autodidacte passionné et passé notamment chez Bocuse et Alléno, revient donc aux Etats-Unis, après une brève et brillante carrière à Paris. Il a fermé Spring, sa belle maison de la rue Bailleul, et s’apprête à vendre son mini-empire, avec la Bourse et la Vie, près du Palais Brongniart, et la Vieille aux Halles. Tant mieux pour les USA, tant pis pour la France et sa capitale.

Michelin égratigne NY

J-G Vongerichten chez Jean-Georges © Maurice Rougemont

New York est-elle en en baisse de qualité ? C’est ce qui ressort du dernier Michelin New York, qui vient de rétrograder la table de Jean-Georges Vongerichten dans la Trump  International Hotel & Tower à deux étoiles, pour cause manque de régularité (la qualité y demeure pourtant au sommet, mais la quantité de couverts servis et le nombre de tables gérées par JGV dans le monde entier – une quarantaine – semble donner le tournis aux inspecteurs US). Ce qui donne aujourd’hui cinq trois étoiles à Big Apple (le Bernardin, Per Se, Masa, Eleven Madison Park, Chef’s Table at Brooklyn Fare) contre sept pour San Francisco. Du côté des promus, l’Asie entre en force dans le guide NY 2018, parmi les six nouveaux “une étoile”, dont quatre japonais et coréens (Bar UchūSatsuki, Sushi Amane, Cote). Enfin, une surprise, qui indique bien les incohérences du guide : Sushi Ginza Onodera, pourtant présent depuis trois ans à Paris 18 rue du Louvre, et absent – on se demande bien pourquoi – du Michelin France : il parvient à l’échelon des deux étoiles pour son maillon new-yorkais. Y aurait-il deux poids et deux mesures selon les pays?

Sulpice et Grolet fêtés par Gault-Millau

Jean Sulpice © GP

Non, Gault&Millau n’a pas inventé l’eau chaude. Mais le guide jaune a, une fois de plus, jeté un joli pavé dans la mare du Michelin, son grand concurrent rouge, en sacrant « cuisinier de l’année » – ce sera officiellement annoncé ce lundi midi – Jean Sulpice qui a repris juste avant l’été l’Auberge du Père à Talloires. Le guide managé par Côme de Chérisey et l’équipe de rédaction de Marc Esquerré consacre un jeune chef bien dans ses baskets, âgé de 39 ans, qui possédait deux étoiles à Val Thorens est généralement cité par les postulants légitimes à la troisième étoile 2018. Le Gaul-Millau est, en tout cas, moins bien inspiré en reprenant la promotion des Grandes Tables du Monde en consacrant comme « pâtissier » le beau et mince Cédric Grolet, qui officie au Meurice, mais qui, comme nous le signalions l’autre semaine, n’est pas forcément le meilleur pâtissier de sa rue (Angelina est à côté, Sébastien Gaudard à deux pas) et, en tout cas, pas des palaces parisiens. Car il est fortement concurrencé par ceux du George V (Maxime Frédéric, le plus fortiche du moment), du Ritz (François Perret, le plus expérimenté) et, bien sûr, du Bristol, avec l’équipe mise en place sous l’égide de feu Laurent Jeannin, sans omettre celui du Trianon Palace à Versailles (le malicieux Eddie Benghanem).

Jeffrey Cagnes chez Stohrer

Jeffrey Cagnes chez Stohrer © GP

Un événement double dans la pâtisserie parisienne : les Dolfi de la Mère de Famille, qui ont repris de nombreuses institutions pâtissières en province (Témoin à Caen, Henriet à Biarritz, la Chocolatière à Tours) et multiplié les boutiques dans Paris, ont racheté Stohrer, la plus ancienne pâtisserie de Paris, embauchant celui qui fut le rénovateur du style maison: Jeffrey Cagnes. Ce jeune homme bien de sa personne s’était installé avenue de l’Opéra à l’enseigne de Casse-Noisette avant de faire marche arrière pour cause de mésentente avec son associée. Voici donc l’ex-pâtissier de Jean-François Piège, formé jadis chez Yamazaki et Hédiard, qui oeuvra chez Monsieur Bleu et au Flandrin, libre de rajeunir l’image de cette pâtisserie historique, qui fit florès dans le baba et le puits d’amour. Ses premiers efforts le portent  à renouveler d’abord l’offre maison côté chocolat, avec une splendide tarte du genre.

Après Jeannin qui ?

Laurent Jeannin © DR

Depuis le décès de Laurent Jeannin en juillet dernier, le Bristol, qui s’appuie sur la jeune équipe formée par lui, qui continue les créations du maître (millefeuille au caramel et vanille, citron givré au limoncello, noisette du Piémont en dacquoise à la framboise), cherche une nouvelle tête pensante pour prendre sa place. Profil recherché : un pâtissier charismatique de 35/40 ans qui pourrait continuer à sa marque aux trois étoiles (Epicure) comme à la brasserie gourmande et étoilée de la demeure (le 114 Faubourg). La décision devrait être prise par Eric Frechon, qui ne se presse pas.

Fin de partie pour les Le Guen

Jean-Marie et Patrick Le Guen © GP

Une étoile s’éteint en Finistère. Patrick et Jean-Marie Le Guen ont été fraîchement remerciés du bel hôtel où ils exerçaient, à Nevez, sur le site sauvage de la plage de Raguenès. Le différent entre le propriétaire, Pierre-Yves Roué, et ce duo père-fils est il un prétexte? Toujours est il que cette séparation fait déjà regretter les merveilles marines livrées ici par les Le Guen. Petit génie du golfe du Morbihan aux Hortensias, loué à l’époque par Henri Gault qui en fit le méconnu de son classement des « 50 meilleurs restaurants de France », Patrick, le père fut le druide gourmand à l’orée du pays bigouden, au temps de l’Agape de Sainte Marine. Natif des Côtes d’Armor, arrimé, depuis plus dix ans aux parages de Nevez, il sera regretté. Attendons de savoir quelles seront ses prochaines aventures, et celle de son fiston Jean-Marie.

La Réserve : Naret arrive, le Calvez rebondit

Didier Le Calvez tire sa révérence à la Réserve © DR

Sans doute s’il avait eu plus de pouvoirs dans la groupe Reybier, serait-il resté… Mais Didier le Calvez, qu’on connut au Trump Plaza et au Pierre à New York, au George V et au Bristol, qui a permis à la Réserve de Paris d’entrer dans la catégorie « des palaces » (et d’être classé n°1 au classement du meilleur hôtel au monde par les lecteurs de Conde Nast Traveller), a tiré sa révérence et démissionné de son poste de directeur général après un an et demi de bons et loyaux services. Le 1er novembre dernier, il a passé le relais à Jean-Luc Naret, ex patron du Michelin, exfiltré des Maldives, qui amène ici son sourire, sa bonne humeur et sa légèreté légendaire. A 64 ans, Le Calvez repart au front, à son compte. Et s’apprête à développer Ré Consulting, avec Olivia son épouse, qui gère déjà la Villa Clarisse et le Toiras à l’île de Ré,  opérant le consulting hôtelier pour de futures créations de haut standing. Il crée également « Heloise’s Choice« , où il se charge de conseiller dix hôtels dans toute la France et devrait, au printemps prochain, annoncer un nouveau projet parisien : « son » hôtel encore top secret. L’ironie du sort veut que côté vins son Château Clarisse, 18 ha en Puisseguin-Saint-Emilion, vinifié par l’oenologue de charme Stéphane Derenoncourt devrait accueillir un nouveau partenaire… un certain Michel Reybier, propriétaire non seulement du groupe hôtelier qui porte son nom (dont la Réserve), mais aussi le glorieux Cos d’Estournel à Saint-Estèphe.

J-L Naret au temps du Michelin en 2010 © DR

Les chuchotis du lundi : le menu Goncourt, Pétrissans rajeunit, Rose quitte Paris, Michelin déclasse NY, Sulpice sacré par GaultMillau, Cagnes chez Stohrer, après Jeannin qui? Le Guen part, Naret arrive, Le Calvez rebondit” : 7 avis

  • PEINARD BED

    M. Pudlowski, c’est le fils Jean Marie et le père Patrick…. Mais peu importe, juste que je trouve votre papier léger d’adjectifs car Patrick est plus que ça, il est le chef humble, discret, passionné, technique, têtu, dur mais aussi humain et attachant, il y en a certainement plein d’autres de qualités… Quant on passe dans sa brigade et qu’on évolue à ses côtés, on en sort grandit. Moi j’ai eu la chance de faire l’Agape à Sainte Marine, et ces moments passés là-bas resteront en mémoire. Merci Patrick !!!!!!!!!!

  • Gérard Poirot

    Comme le chantait Gainsbourg, ‘la géographie et toi, ça fait deux’…

  • Rico

    Le message de Daniel Rose est la meilleure nouvelle de la semaine. Merci Monsieur de rester à Paris, vos restaurants sont merveilleux.

  • Daniel Rose

    Cher Monsieur Pudlowski,
    Permettez moi de vous rassurer : ni La Bourse & La Vie, ni Chez La Vieille ne sont à vendre et je n’ai nullement l’intention de cesser mes activités en France … bien au contraire !
    À bientôt,
    Daniel Rose

  • « Y aurait-il deux poids et deux mesures selon les pays? »
    Tout de même, vous le savez !
    Vivant depuis plusieurs années entre Londres et Paris, je vous confirme qu’il y a bien deux poids de mesure.
    Michelin à Londres donne souvent les étoiles à peine quelques mois après une ouverture, et le restaurant s’en vante, alors que souvent il n’y a pas de quoi fouetter un chat.
    Les juges sont anglais, donc avec un palais anglais, et ne vont surtout pas voir ce qui se fait ailleurs.
    Je confirme donc que pour NYC cela doit être pareil.

    Attention lorsque vous titrez « Daniel Rose retraverse la Manche », on pourrait penser qu’il part pour l’Angleterre… S’il repart pour les USA, il traverse l’Atlantique, une autre paire de manches 😉

  • Michel

    Au sujet des étoiles Michelin New Yorkais ; il est évident qu’il y a deux poids deux mesures, j’ai dîné dans des étoilés New Yorkais qui pratiquent la vente à emporter (Café China, Sushi of Gari, Somtum Der…) impensable en France ! Plus proche de nous en Europe ; j’ai pour mémoire des visites dans des double étoilés Portugais à des années lumières de ce que peuvent nous offrir des chefs bien de chez nous…

  • jouyenjosas

    Daniel Rose retraverse la Manche. Il part à New York. Trouvez l’erreur !
    Pourvu que le pot-au-feu de veau de la Bourse & la Vie perdure…
    Bien cordialement.

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