La gloire des maudits selon Neo

Article du 23 août 2017

Il porte un beau nom de résistant, et ne s’intéresse qu’aux collabos. Mais qu’est-ce qui fait courir Nicolas d’Estiennes d’Orves alias Néo ? Le plus jeune membre du Club des Cent met en scène un critique gastronomique ayant trempé sa plume dans le venin de la presse collaborationniste, cite par ailleurs Robert Courtine, dont l’un de ses personnages s’inspire, traînant d’une table l’autre pour un quotidien de renom, se passionne pour Lucien Rebatet dont il fut l’ayant droit (voir ses « Fidélités Successives« ), conte l’histoire de Gabrielle Valoria, la fille d’un collabo, exécuté à la libération, qui doit rédiger la biographie de Sidonie Porel, grande écrivain populaire, membre éminent de l’Académie Goncourt. Tout cela se passe autour du Palais-Royal. Gabrielle, Sidonie, Le Palais Royal: on pense vite à Colette, évidemment. Mais il faut aller chercher ailleurs. Néo livre ses clés, brouille les pistes, mélange ses personnages, se gausse des noms, s’amuse avec la chronologie.

Il y a même un François Morland lié à la Cagoule… qui n’est pas François Mitterrand. Plus un personnage clé nommé Licht, qui fait beaucoup penser à Eugène Schueller, le papa de Liliane Bettencourt, qui fait, comme lui, épouser son bras-droit à sa fille. Mais, chut! On ne va pas tout vous raconter. Entre histoire, petite et grande, feuille de chou d’extrême droite et roman-feuilleton popu, coulisses littéraires (le croustillant récit de l’attribution du prix Goncourt 1952 à Roger Ikor pour « les Eaux mêlées »), Néo ne choisit pas. Il égare son lecteur au passage. Le balade dans les méandres de l’édition, des salons, des magazines de l’époque. On disserte avec Jacques Chardonne*, bavarde avec Jean Cocteau, badine avec Gaston Gallimard. On se perd ici soi-même dans cette féerie mensongère. Qui vous balade beaucoup avant de vous mener dans un cul-de-sac…

La gloire des maudits de Nicolas d’Estiennes d’Orves (Albin Michel, 522 pages, 23,50 €)

*une remarque tout de même s’agissant de Jacques Chardonne pour Néo qui cite les titres véridiques, mais de travers : le chef d’oeuvre de JC c’est « le Bonheur de Barbezieux » et non « le Bonheur à Barbezieux », comme l’indique la page 244. Nuance…

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Publié le 23 août 2017 par

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