Les perles de mémoire de Bernard Pivot

Article du 5 mai 2017

« Roi Lire », comme le surnommait son copain Robert Sabatier, grand lecteur, amoureux des livres comme des écrivains – ce qui n’est pas forcément la même chose -, président de l’académie Goncourt et champion de France des bons mots sur Twitter,  Bernard Pivot nous embarque avec lui dans les méandres de sa mémoire et mène d’une lecture à l’autre, d’un auteur l’autre, ce qui lui suggère de savoureux retours en arrière, nous offrant d’exquis bonheurs de lecture.

Le souvenir d’une enfance de petit Lyonnais turbulent, qui fut élève brouillon, avant de devenir étudiant brillant, les sautillements de la mémoire qui lui rappellent ses débuts au Figaro (on sait qu’il dut partiellement son embauche à son enracinement en pays Beaujolais), son refus de participer au cadeau collectif du trop hautain François Mauriac (il refusait de saluer le tout venant de la rédaction), ses rappels de l’exactitude ou de la volonté de retard chez les grands de ce monde (de Chirac à Mitterrand, en passant par Raymond Barre), sur la télévision, la beauté de Le Clézio (celle, notamment, légendaire de Le Clézio), la gourmandise (« du bon sur du bon, ça ne peut faire que du bon« , écrit Félicien Marceau), l’exigence de pudeur et la plongée dans les jolis corsages donnent lieu ici à de savoureux chapitres brefs comme à de douces évocations, mêlant humeur et humour, rosseries, tendresses.

Ce livre se savoure, se dévore, se grignote, comme une friandise. Notamment ses évocations sur le thème du vin (à ce propos, on fera remarquer à l’auteur, à qui sa mémoire ici joue des tours, qu’Hubert de Montille – et non Montilhe, p. 108 – était propriétaire essentiellement en Côtes de Beaune à Volnay et non en Côtes de Nuits, où il possédait, il est vrai quelques parcelles). Enfin, Robert Sabatier est décédé non chez lui (« dans la compagnie des livres de sa vie« , ce qui est une jolie formule, comme évoqué p. 163), mais à l’hôpital à Boulogne. Nous nous y sommes d’ailleurs relayés, chez Bernard. Mais la mémoire, n’est-ce pas, n’en fait qu’à sa tête…

La mémoire n’en fait qu’à sa tête de Bernard Pivot (Albin Michel, 230 pages, 18 €).

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Publié le 5 mai 2017 par

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